Le Staff report for a Request for Stand-By Arrangement (M�morandum des services du FMI sur une demande d�Accord de confirmation) du 17 mai 2004 indique que des discussions entre le Fonds et les autorit�s gabonaises ont eu lieu � Libreville entre le 3 et le 16 mars. Ses auteurs affirment,
L��quipe a rencontr� le pr�sident Omar Bongo Ondimba, le premier ministre, les pr�sidents de l�Assembl�e nationale et du S�nat, le ministre de l�Economie et des finances, d�autres hauts fonctionnaires ainsi que des repr�sentants du secteur priv� et des bailleurs des fonds. (p. 1)
Des cinq interlocuteurs cit�s, trois sont forestiers.
1. Qui sont les autres � hauts fonctionnaires � avec qui le FMI a discut�?
La demande officielle du Gabon pour un Accord de confirmation de 14 mois a �t� pr�sent�e par le ministre de l�Economie, Paul Toungui, dans une lettre du 6 mai 2004 adress�e � la Premi�re Directrice g�n�rale adjointe du Fonds ; la demande a �t� accompagn�e par un � Aide-m�moire de politique �conomique et financi�re pour 2004-05 � de 18 pages.
La concession foresti�re de Paul Toungui � 56 800 hectares dans le d�partement d�Okondja dans la province du Haut-Ogoou� � expirera en 2011.
2. Combien de revenus provenant de la sous-traitance de cette concession le ministre a-t-il per�us depuis l�attribution du titre en 1996, en supposant une part �gale � 10 % du chiffre d�affaires total ?
Le communiqu� de presse du Fonds publi� le 28 mai 2004 annon�ant l�octroi de l�Accord de confirmation affirme que le programme de politique �conomique du Gabon pour 2004-05 � vise � approfondir les r�formes structurelles, y compris la privatisation et la gouvernance de l�administration publique � tous les niveaux, afin de promouvoir la croissance dans le secteur non p�trolier de l��conomie [...] �. Plut�t qu�en termes de privatisation et de gouvernance, nous voyons la promotion effr�n�e par le Fonds de la croissance non p�troli�re en termes de privatisation de la gouvernance.
En R�publique d�mocratique du Congo, la r�forme foresti�re que m�ne la Banque mondiale depuis 2002 a pris comme cible principale la fonction renti�re d�une industrie foresti�re n�o-patrimoniale, au moins officiellement. La Banque a jou� un r�le � majeur � (p. 86) dans la conception de l�Accord de confirmation pour le Gabon ; le succ�s �ventuel de celui-ci � d�pendra de l�action compl�mentaire de la Banque mondiale [�].� (p. 86)
3. Quel pourcentage de la for�t gabonaise dite � productive � se trouve actuellement sous contrat de fermage?
En RDC, la Banque affirme que les autorit�s ont annul� pas moins de 23,4 millions d�hectares de concessions � d�tenues en sp�culation �. Au Gabon, par contre, aucune mesure pour r�duire des comportements rentiers ne semble avoir �t� envisag�e.
Dans un article r�cent, M. Alain Karsenty, consultant de la Banque mondiale, cite l�exemple classique d�une � logique client�liste � en mati�re d�exploitation foresti�re africaine :
[�] L�attribution r�serv�e de certaines portions du territoire (par exemple la zone c�ti�re au Gabon) aux � entrepreneurs � nationaux permettait � et permet toujours � � des notables de s�installer dans une confortable position renti�re en � affermant � leurs permis � des exploitants �trangers. (nous soulignons)
4. Pourquoi la Banque lutte-t-elle contre la logique renti�re de l�exploitation foresti�re en RDC mais pas au Gabon?
Dans son bref encadr� consacr� � la r�forme du secteur forestier (� Forestry Sector Reforms Under Way [en cours] �), le staff report du FMI affirme qu� � une carte des concessions sera finalis�e avant fin 2004, comportant une liste de tous les d�tenteurs de permis. � (p. 25) L�Aide-m�moire de politique �conomique et financi�re r�dig� par le ministre de l�Economie le 6 mai 2004, indique que cette liste existait au moment de la r�daction du staff report. La premi�re des � mesures cl�s � de r�forme foresti�re que qualifie le ministre d�� appliqu�es en 2004 � est � la pr�paration en janvier 2004 d�une liste de toutes les concessions foresti�res, qui a �t� communiqu�e � la Direction g�n�rale des imp�ts pour assurer que tout d�tenteur de concession paie la taxe de superficie �. (p. 65)
5. Si la liste officielle des d�tenteurs de permis a �t� disponible en janvier 2004, pourquoi sa publication n�a-t-elle pas �t� une condition pour l�autorisation par le FMI, en mai, de l�Accord de confirmation?
6. Pourquoi sa publication ne figure-t-elle pas parmi les vingt crit�res d�ex�cution et rep�res � satisfaire durant la premi�re phase d�application de l�Accord de confirmation (mai - d�cembre 2004)?
La deuxi�me des mesures que liste le ministre de l�Economie comme � appliqu�es en 2004 � � sans plus de pr�cision � est � un contr�le rigoureux des paiements fiscaux effectu�s par les d�tenteurs de concessions et l�annulation des concessions non conformes �. (p. 65) Le staff report indique que la collecte de la nouvelle taxe de superficie et de la taxe d�abattage a d�marr� au dernier trimestre 2003 (11). La liste officielle des d�tenteurs de permis, elle, n�a vu le jour qu�en janvier 2004.
7. Comment ces taxes ont-elles �t� collect�es en l�absence d�une liste valide des concessionnaires?
8. Pourquoi la publication de la liste des � concessions non conformes � annul�es avant le 6 mai 2004 n�a-t-elle pas �t� une condition d�autorisation par le FMI de l�Accord de confirmation?
9. Quand les listes de titres valides et de titres annul�s seront-elles publi�es?
En 2003, les experts de la Banque ont rapport� qu�en R�publique d�mocratique du Congo, seuls 29 % des forestiers imposables pour la taxe de superficie l�ont pay�e cette ann�e-l�. Le staff report du FMI pour le Gabon cite des probl�mes dans la collecte de la fiscalit� foresti�re comme un des deux facteurs responsables d�un d�ficit de 25 milliards de FCFA en revenus hors p�trole en 2003.
[...] Le paiement par les forestiers des imp�ts dus en taxe de superficie et en taxe d�abattage, introduites en 2003, restait en de�� des projections, parce que les collectes ne commen�aient qu�au dernier trimestre 2003 ; du c�t� positif, celles-ci se sont montr�es en hausse depuis octobre. (p. 11) (nous soulignons)
L�autre raison donn�e pour le d�ficit en 2003 des revenus hors p�trole est que :
L�am�lioration attendue dans la collecte de l�imp�t sur les b�n�fices ne s�est pas produite, parce que la soci�t� de mangan�se, la COMILOG, a rechign� au paiement des arri�r�s fiscaux [...]. (p. 11)
Ce passage laisse clairement entendre que, tandis que le gouvernement a rencontr� une r�sistance fiscale de la part de la Comilog, il n�en a rencontr� aucune de la part du lobby forestier. Ceci est faux. Apr�s qu�une d�l�gation des forestiers m�contents ait �t� re�ue par le pr�sident Bongo en avril 2003, la taxe de superficie s�est vue subitement r�duite de 1 000 FCFA/ha � 600 FCFA/ha. Il ne nous appara�t pas clairement comment cet �pisode, largement rapport� dans la presse, a pu �chapper � l�attention des auteurs du staff report. Mais, enfin, la poursuite d�une collecte efficace des imp�ts forestiers n�est gu�re synonyme de poursuite de l��radication du n�o-patrimonialisme forestier. Au contraire, les �lites d�un r�gime sont souvent parmi les forestiers les plus capables de respecter leurs obligations fiscales.
Comme nous l�avons dit, il est de notre avis qu�aucune des r�formes annonc�es par le FMI n�est cens�e augmenter la transparence. Il ne nous appara�t pas non plus clairement laquelle d�entre elles est cens�e donner l�impression de l�augmenter. Le mot � transparence � n�appara�t nulle part dans le volet for�t de l�Aide-m�moire de politique �conomique et financi�re du ministre de l�Economie. Le terme est utilis�, par contre, dans le communiqu� de presse du 28 mai :
Les autorit�s accordent une priorit� aux r�formes en cours dans le secteur cl� de la for�t. La pr�paration d�une lettre de politique du d�veloppement pour le secteur forestier confirme leur engagement envers les principes du d�veloppement durable et de la transparence en ce qui concerne la gestion des ressources foresti�res.
Si le terme � transparence � est absent du sommaire que contient le staff report des ces r�formes (� Forestry Sector Reforms Under Way �), il r�appara�t dans un sommaire pr�liminaire de ce sommaire :
Une r�forme globale du secteur forestier est en cours d�ex�cution avec l�assistance de la Banque mondiale [...]. Les objectifs principaux de la r�forme [sont] l�augmentation de la contribution du secteur � la valeur ajout�e, tout en renfor�ant l�adh�sion aux principes du d�veloppement durable, en assurant la transparence dans l�attribution des permis forestiers ainsi qu�une meilleure fixation du prix d�une ressource rare. Une r�forme � fond de la SNBG est aussi un �l�ment cl� du programme. (p. 24)
Ce passage sugg�re que la transparence du secteur sera am�lior�e, au moins en partie, en � assurant � la transparence dans l�attribution des concessions. Le rapport affirme qu� � un syst�me d�appels d�offres sera �tabli pour l�attribution des nouvelles concessions [�] et qu�aucune nouvelle concession ne sera attribu�e avant la finalisation de ce syst�me �. (p. 25)
Au Cameroun, l�attribution des concessions foresti�res par appels d�offres a �t� introduite en 1997.
10. Depuis lors, quel pourcentage de la for�t � productive � de ce pays a-t-il �t� attribu�, avec l�approbation de l�Observateur ind�pendant aupr�s de la commission interminist�rielle d�attribution des concessions foresti�res, aux soci�t�s qui ne sont pas associ�es � un membre de la famille pr�sidentielle, � un g�n�ral de l�arm�e, � un maire, � un d�put�, ou � un haut responsable du parti au pouvoir ?
En R�publique d�mocratique du Congo, un gel de toute nouvelle attribution des titres forestiers a �t� parmi les plus urgentes des premi�res recommandations de la Banque mondiale au gouvernement de Kinshasa en 2002. Adopt� officiellement en mai 2002, ce moratoire a �t� viol� deux semaines plus tard. En tout, au moins 6 millions d�hectares ont �t� attribu�s depuis � l�adoption � de cette mesure.
11. Quand le syst�me gabonais d�appels d�offres sera-t-il finalis�, et combien de concessions sont programm�es pour attribution ou r�-attribution avant cette date?
On constate que chacune des cinq mesures de � gestion durable � �num�r�es dans l�encadr� � Forestry Sector Reforms Under Way � se conjugue au futur : � Un plan d�action sera adopt� [�] �, � Les petites concessions seront regroup�es [�] �, � Un syst�me d�appels d�offres sera �tabli [�] �, � [�] La r�glementation sera renforc�e [...] �, � Une carte des concessions sera finalis�e [�] �. (p. 25) (nous soulignons)
12. En quoi ces r�formes futures �taient-elles � en cours � ?
L�Accord de confirmation semble supposer, sans proposer de justifications, que ce qu�il appelle � le d�veloppement durable et la transparence � sont au moins compatibles avec ce qu�il appelle le r�le � crucial � du secteur forestier dans la croissance du PIB hors p�trole (p. 7) � croissance sur laquelle il affirme que le succ�s du programme du gouvernement r�pose � enti�rement � (� crucially �). (26) Il quantifie cette d�pendance ainsi :
[...] Si le taux de croissance du secteur non p�trolier est sup�rieur � deux pour cent de moins que pr�vu dans le sc�nario de base, l�analyse de viabilit� de la dette montre que [le rapport de] la dette [ext�rieure au PIB] deviendrait non viable. (26)
A notre avis, l�expansion de l�exploitation foresti�re et l�augmentation de la transparence sont deux objectifs contradictoires plut�t que compl�mentaires. Nous doutons que la poursuite du premier objectif dans des conditions d�opacit� � ce qui poserait un obstacle �vident au d�veloppement durable � soit apte, non plus, � contribuer � la simple croissance �conomique � longue �ch�ance. En tout cas, la rentabilit� de ce secteur forestier � crucial � d�pend, elle, de la pr�servation du statu quo.
Le directeur du groupe Vicwood, la plus grande soci�t� foresti�re active au Cameroun, a exprim� ce dernier point avec �loquence dans une r�cente interview. Bruno-Charles Doinet a d�clar� :
Les gouvernements nous demandent beaucoup. Ainsi, au Cameroun, v�ritable laboratoire du Bassin du Congo, plus aucun forestier ne peut encore gagner sa vie de fa�on honn�te. On est en train de faire partir les forestiers s�rieux qui iront vers d�autres pays mais ces pays voudront aussi, peut-�tre, copier la fa�on de faire du Cameroun.
Une croissance hors p�trole insuffisante est le deuxi�me des deux � risques majeurs � qu�identifie le staff report du FMI. Le premier risque est de nature politique :
Le programme est sujet aux risques majeurs. Il y a eu une tendance � assouplir la rigueur fiscale � l�approche des �lections ; avec des �lections pr�sidentielles programm�es pour fin 2005 les risques pour le programme fiscal sont donc augment�s ; l�imminence des �lections pourrait aussi affaiblir la d�termination � mener � bien les r�formes structurelles. [...] Dans le domaine structurel, le programme comporte une concentration consid�rable en d�but de programme des mesures de privatisations, puisque celles-ci risquent d��tre difficiles dans une p�riode pr��lectorale. (pp. 26-7) (nous soulignons)
Tandis que le calendrier d�application de l�Accord de confirmation montre bel et bien une importante concentration en d�but de programme des crit�res d�ex�cution et des rep�res en ce qui concerne la privatisation, il ne comporte qu�un seul indicateur portant sur le secteur forestier, bien que celui-ci constitue � une priorit� � (p. 70) dans les r�formes structurelles. Pour ce qui est de � l�adoption d�un plan d�action pour rationaliser la SNBG �, l�opinion qu�elle repr�sente plus une mesure de privatisation qu�une mesure de r�forme foresti�re nous semble tout � fait d�fendable.
13. Pourquoi � l�imminence des �lections � mettrait-elle en p�ril les mesures de privatisation et pas les r�formes foresti�res ?
Au moment de la r�daction du staff report, les autorit�s gabonaises n�avaient pas encore pr�sent� � la lettre de politique de d�veloppement pour le secteur forestier � qu�elles �taient en train de pr�parer � en consultation avec la Banque mondiale �. (p. 70) Ce texte a �t� adopt� en Conseil des ministres le 18 mai, le lendemain de la mise en circulation du staff report. Un Suppl�ment au staff report dat� du 25 mai 2004 indique que la lettre pr�sent�e � contient les composantes cl�s des r�formes souhait�es par la Banque mondiale �. Nous constatons que la premi�re r�forme list�e dans le staff report � � Un plan d�action sera adopt� pour soumettre la totalit� du domaine forestier [�] aux plans d�am�nagement durable avant fin 2005 � (p. 25) � cette r�forme a disparu de la version r�vis�e que contient le Suppl�ment.
Le Suppl�ment fait savoir qu�
On s�attend � ce que la lettre soit renforc�e encore dans le contexte de la pr�paration du projet For�t et Environnement en coop�ration avec la Banque mondiale et d�autres bailleurs de fonds, dont la finalisation est attendue pour avant fin 2004.
14. Renforc�e encore de quelle mani�re?
L�histoire r�cente de la participation de la Banque mondiale � la r�forme du secteur forestier gabonais nous donne peu d�espoir que le projet en pr�paration promouvra effectivement la transparence du secteur. Le Projet For�t et Environnement (PFE) que la Banque a conduit au Gabon entre 1992 et 2002 est ainsi d�crit dans le staff report du FMI :
En juin 2002 la Banque a achev� un projet de dix ans d�une valeur de 22,5 millions de dollars cens� am�liorer la gestion et la protection des ressources foresti�res et environnementales du Gabon. Le projet visait l�application et le renforcement des politiques gouvernementales en mati�re de foresterie et d�environnement, ainsi que le renforcement de la capacit� de programmation et d�op�ration des institutions gouvernementales et des organisations non-gouvernementales locales (ONG). (p. 86)
En d�cembre 2002, la Banque a �valu� son PFE dans un Implementation Completion Report (#24900) de 35 pages.
15. A quel moment l�Implementation Completion Report fait-il allusion aux ONG locales ?
Le staff report du FMI encha�ne :
Un nouveau programme [de la Banque] dans le m�me secteur est en cours de pr�paration pour pr�sentation au Conseil durant l�exercice 2005. Ce programme s�appuie sur les le�ons apprises [...] et compte �largir ses objectifs en atteignant un plus grand nombre de b�n�ficiaires, en attirant des investissements dans [�] le secteur forestier [�] et en aidant ainsi le gouvernement dans ses efforts pour diversifier l��conomie gabonaise [�]. (p. 86)
Nous constatons que 31 des 46 permis forestiers dont nous d�signons ci-dessus les d�tenteurs ont �t� attribu�s au cours de la p�riode de dix ans de mise en �uvre du PFE. Nous estimons exacte la remarque de la Banque selon laquelle son programme � convenait parfaitement aux priorit�s du gouvernement �. (24900: p. 16) En effet, le fait qu�un programme de � r�formes � de cette ampleur ait pu exclure de fa�on si flagrante toute initiative visant � une augmentation de la transparence nous pousse � nous demander si son but n��tait pas justement de faire barrage � de telles initiatives.
L�Implementation Completion Report est lui-m�me tr�s critique envers le projet. Apr�s dix ans, l�impact du PFE sur le renforcement des capacit�s institutionnelles �tait seulement � modeste � (p. 11) � des responsables du Minist�re des Eaux et for�ts ont �t� pourvus � des bureaux, du logement et des v�hicules en l�absence de formation destin�e � l�am�lioration [�] du monitoring et du contr�le [�] � ; en 2002, il �tait � presque certain que [�] le renforcement de l�administration [�] ne se poursuivra[it] pas sans nouveau projet �. (p. 14) Les auteurs remarquent que � Le PFE a fait une petite contribution au cadre r�glementaire, mais celle-ci est plut�t sujette � discussion. [�] La loi [sur l�Environnement] a en effet �t� adopt�e en 1993, mais son premier d�cret d�application n�est arriv� qu�en 2002 �. Une annexe au rapport indique que le premier d�cret d�application �tait aussi le dernier. (p. 23) A l�ach�vement du projet, un seul des dix projets de d�cret avait �t� adopt�.
L��valuation de la Banque estimait que la contribution du PFE � la formation foresti�re, le deuxi�me objectif du projet, serait viable � uniquement si un autre projet [venait] appliquer la r�forme propos�e �. (p. 15) La contribution du PFE � la recherche foresti�re � malgr� � l�achat des placards de conservation pour l�herbier national � (p. 9) � a �t� jug�e � non satisfaisante � (p. 9) et � inviable �, les investissements approuv�s � insuffisants et fragmentaires �. (p. 15) Les progr�s effectu�s par le projet, sur dix ans, pour la cr�ation des aires prot�g�es ont �t� not�s � non satisfaisants �. (10)
Nous ne comprenons pourquoi, en d�pit de ces critiques, l��tude de la Banque a n�anmoins conclu que � Le PFE est un bon exemple d�un projet � probl�mes devenu projet � succ�s �. (p. 20) L�auteur du rapport, Jean-Christophe Carret, f�licite l��quipe de la Banque pour sa � vision � de � l�importance �conomique, �cologique et sociale de la for�t � et d�avoir � communiqu� efficacement cette vision au-del� du Minist�re, � travers tout le pays et la sous-r�gion, en �tablissant et en mettant en �uvre un plan de communication, et en utilisant les m�dias disponibles [�] �. (p. 21) Notre souci est justement qu�en ce qui concerne la r�forme foresti�re dans le Bassin du Congo, la Banque a toujours pr�f�r� les relations publiques au concret.
Il est vrai que le Projet For�t Environnement comportait un �objectif secondaire� (p. 7) que la Banque, r�trospectivement, n�a pas jug� �tre un �chec : la partie � am�nagement durable � de la composante, d�une valeur de 4,06 millions de dollars, appel�e � Am�nagement for�ts naturelles et plantations �.
Si � l�impact � de ce projet-pilote a �t� � un peu moins important que pr�vu �, le rapport affirme que � tout de m�me, le plan d�am�nagement produit par le PFE dans la premi�re zone a �t� vendu � un op�rateur forestier en 2000 par l�administration foresti�re, et donc n�a pas �t� produit en vain �. (p. 7)
Deux pages plus loin, ce jugement est r�it�r� avec une qualification curieuse :
[...] 250 000 hectares du plan d�am�nagement dans l�Estuaire sud ont �t� r�alis�s en 1999 (le plan d�am�nagement produit par le PFE a �t� vendu � une soci�t� priv�e. Pourtant, son prix de vente n�est pas connu officiellement) [�]. (p. 9) (nous soulignons)
Deux ans auparavant, dans son �tude � R�former la fiscalit� foresti�re au Gabon: Les constats de d�part � l�auteur du rapport de la Banque a �t� plus explicite :
[...] L�Industrielle et Foresti�re du Komo (IFK), entreprise r�cemment cr��e par le groupe Sogafric sp�cialis� dans l�importation de mat�riels industriels au Gabon, a obtenu un permis de 200 000 hectares dot� d�un plan d�am�nagement durable r�alis� par l�Etat gr�ce � un pr�t de la Banque mondiale. (p. 5)
Dans sa discussion sur la difficult�, � l��poque o� il �crivait, d�estimer le co�t des plans d�am�nagement au Gabon, M. Carret affirmait :
On ne peut en effet retenir le co�t de r�alisation du plan d�am�nagement durable d�IFK, beaucoup plus �lev� [que celui du plan d�am�nagement de la CEB], celui [d�IFK] ayant �t� con�u dans le cadre d�un projet-pilote du Projet For�t-Environnement (PFE). De plus, le montant de la transaction entre l�administration foresti�re et l�entreprise est rest� confidentiel, le permis forestier n�ayant pas fait l�objet, comme le recommandait la Banque mondiale, d�une offre publique d�ench�res. (p. 7)
16. Pourquoi l��valuation de la Banque n�a-t-elle pas fait �tat de cette recommandation, et de son refus par l�administration gabonaise?
17. Pourquoi le montant de ce contrat public n�est-il pas � connu officiellement � et quand le sera-t-il ?
18. En quelles circonstances le plan d�am�nagement PFE a-t-il �t� vendu � IFK ?
Les remarques de M. Carret laissent entendre que l�attribution de la concession � IFK et la vente du plan d�am�nagement sont intervenues au m�me moment.
19. A quelles autres soci�t�s la concession et / ou le plan d�am�nagement ont-ils �t� propos�s?
L�Implementation Completion Report comporte peu de d�tails concernant l�investissement en question. � La mise en �uvre d�un plan d�am�nagement pour 40 000 hectares d�Okoum� naturel dans les 275 000 ha du massif forestier dans la localit� du village de Foulenzem � comprenait � un inventaire de la faune et de la flore sur 6 % de la zone foresti�re ; l�ex�cution des op�rations sylvicoles ; des services de conseil ; la construction des bureaux et des logements pour des agents et des stagiaires au village de Foulenzem ; et l�acquisition des v�hicules et du mat�riel �. (6)
20. Qui utilise aujourd�hui les v�hicules achet�s par la Banque?
Dans un discours donn� en f�vrier 2001 sous le titre � Am�nagement durable des for�ts du Gabon � Gabriel Azizet, directeur g�n�ral des Eaux et for�ts du Gabon, fait allusion �
une CFAD [Concession foresti�re sous am�nagement durable] de 200.000 ha dont le plan d�am�nagement a �t� r�alis� par le Projet For�t Environnement (pr�t Banque Mondiale) sur 270.000 ha et attribu� � la Soci�t� IFK (Soci�t� gabonaise).
Dans son texte de septembre 2000, M. Carret affirme que la concession d�IFK couvre 200 000 ha ; la superficie du plan d�am�nagement n�est pas sp�cifi�e. Dans l�Implementation Completion Report de 2002 il affirme, page 9, que le plan d�am�nagement couvre 250 000 ha. Le m�me rapport sp�cifie, page 6, que le plan d�am�nagement ne couvre que 40 000 ha. Gabriel Azizet affirme que le plan d�am�nagement couvre 270 000 ha.
21. Quelle est la superficie de la concession d�IFK et celle couverte par son plan d�am�nagement?
22. Quel pourcentage du bois produit par IFK provient de sa for�t � sous am�nagement durable �, et quel pourcentage du reste de sa for�t?
Il serait pour nous un vrai d�fi de nommer une soci�t� foresti�re plus �troitement li�e � la famille pr�sidentielle et � son entourage que l�est IFK. Comme M. Carret le remarque en passant, la soci�t� est une filiale de la Compagnie du Komo / Sogafric, le groupe industriel multisectoriel le plus important du Gabon.
La Compagnie du Komo, contr�l�e par les int�r�ts fran�ais, d�tient 25 % de la Banque gabonaise et fran�aise internationale (BGFIBANK), dont le pr�sident du Conseil d�administration, Patrice Otha, est aussi le directeur de cabinet adjoint du pr�sident Bongo. En 2000, la BGFIBANK a rachet� pour une somme non communiqu�e � la presse les actifs gabonais et congolais de la tristement c�l�bre Banque fran�aise intercontinentale (FIBA), la banque au c�ur de l�affaire Elf. La liquidation de la FIBA en 2000 est intervenue apr�s que les magistrats fran�ais et suisse aient r�v�l� son implication dans le blanchiment d�argent et le trafic d�armes au b�n�fice de nombreux dictateurs africains.
Outre Christian Kerangall et Robert Boutonnet, respectivement le PDG et le co-fondateur de la Compagnie du Komo, les dix administrateurs de la BGFIBANK comprennent Pascaline Bongo (la fille et directrice de cabinet du pr�sident), Christian Bongo (un des fils du pr�sident), Richard Onouviet (ministre des Mines et ancien ministre des Eaux et for�ts (1999-2002)), et Jean Ping (ministre des Affaires �trang�res, pr�sident de session actuel � l�Assembl�e g�n�rale de l�ONU). Le directeur g�n�ral de la BGFIBANK, Henri-Claude Oyima, qui est un petit-neveu du pr�sident Bongo, est pr�sident de la Conf�d�ration patronale gabonaise, dont Christian Kerangall est secr�taire g�n�ral. En 2003, la BGFIBANK a d�clar� un b�n�fice de 8,3 milliards de FCFA.
Henri-Claude Oyima est le seul membre gabonais du conseil d�administration de la Komo. Le site web d�IFK indique que � les dirigeants � de la BGFIBANK ont visit� sa concession en mai 2001, en compagnie de l�ambassadeur de France et du directeur g�n�ral de l�Agence fran�aise de d�veloppement (AFD). Ce dernier a rendu visite � la concession � trois reprises en moins de trois ans.
Le staff report du FMI de mai 2004 identifie � l�exposition �lev�e � des banques gabonaises aux soci�t�s foresti�res comme une des � faiblesses cl�s � du secteur financier. (p. 21) Il affirme �galement :
Les banques se sont montr�es r�ticentes � accorder de nouveaux pr�ts au secteur forestier, apr�s une rapide augmentation des cr�dits dans les ann�es r�centes pour financer de nouveaux investissements, avec pour cons�quence un bond des cr�ances douteuses, au fur et � mesure que les op�rateurs les plus faibles se trouvaient en difficult�. Pourtant, la restructuration d�envergure et la fusion des soci�t�s actuellement en cours seraient probablement suivies par une reprise des cr�dits au secteur pour financer des initiatives nouvelles. (p. 9)
23. Quel financement de la BGFIBANK IFK a-t-elle re�u pour ses � initiatives � foresti�res depuis sa cr�ation en 2000 ?
Henri-Claude Oyima est le pr�sident et Christian Kerangall un membre du Club de Libreville, un groupement des principaux cr�anciers du gouvernement gabonais r�cemment cr��. En f�vrier 2004, le ministre de l�Economie a accept� de rembourser les membres du Club de Libreville avant les autres cr�anciers priv�s de l�Etat, et d�accorder des cr�dits d�imp�ts en cas de non-paiement. Les membres du Club de Libreville, pour leur part, se sont engag�s � � ne pas transf�rer � l��tranger, pendant au moins un an, les sommes re�ues de l�Etat en r�glement de ses dettes �.
Le staff report du FMI estime que � les accords de dette conventionnelle aux fournisseurs � atteignaient 21,2 milliards de FCFA en 2003. (p. 20)
24. Quel pourcentage de cette dette �tait d�tenu par la Compagnie du Komo?
Les liens de la Compagnie du Komo avec la famille pr�sidentielle vont au-del� de son r�le dans la co-gestion de la banque de la famille pr�sidentielle. Christian Bongo, un des fils du pr�sident et ancien directeur g�n�ral adjoint de la SNBG, a �t� directeur g�n�ral adjoint de l�Union gabonaise de banque (UGB) (groupe Cr�dit Lyonnais) quand, en 2000, celle-ci �tait arrangeur d�un financement d�une valeur de 5 milliards de FCFA � la Compagnie du Komo pour la � mise en valeur d�une concession foresti�re pour une gestion durable �.
En d�cembre 2002, Christian Bongo a �t� nomm� directeur g�n�ral de la Banque gabonaise de d�veloppement (BGD). En 2003, la BGD a accord� � l�IFK un pr�t financ� par l�AFD d�une valeur de 519 millions de FCFA. L�interlocuteur principal du Club de Libreville, Blaise Louemb�, le tr�sorier payeur g�n�ral, est un administrateur de la BGD.
Depuis juillet 2001, Christian Bongo est pr�sident du conseil d�administration du Transgabonais, qui d�pend largement de l�industrie foresti�re. La Compagnie du Komo en est un actionnaire de longue date.
L�exploitation foresti�re d�IFK n�est qu�une des activit�s foresti�res de la Compagnie du Komo. Sa filiale, la Soci�t� gabonaise industrielle (SOGI), fabrique des grumiers utilis�s au Gabon, Congo-Brazzaville, Cameroun, et Guin�e �quatoriale. En 1998 elle en a livr� 30 � la soci�t� malaisienne Bordamur. Elle a aussi construit la charpente de plusieurs unit�s de transformation du bois, y compris celles de Bordamur, de la CEB-Thanry, et de la CEMA.
Compagnie du Komo a r�cemment rachet� la Foresti�re des bois d�Azingo (FBA), une filiale du holding � capitaux fran�ais Lipart. En 2000, la soci�t� soeur de la FBA, Menuiserie des bois d'Azingo (MBA), s�est vue attribuer un contrat d�une valeur de 450 millions de FCFA pour la r�habilitation du rez-de-chauss�e du si�ge de la SNBG. Les travaux comportaient l�installation d�un syst�me de s�curit� � in�dit dans le pays � ainsi que d�une infirmerie. Holding Lipart est le leader au Gabon dans l�importation de mat�riels de s�curit� et de mat�riel biom�dical.
26. Pourquoi la Compagnie du Komo a-t-elle rachet� la FBA?
Les filiales non-foresti�res de la Compagnie du Komo sont d�importants fournisseurs du gouvernement gabonais. Sogafric Froid domine le march� r�gional de la climatisation; le palais pr�sidentiel du Gabon est parmi les nombreux b�timents publics gabonais qu�elle a �quip�s.
En janvier 2002, le bulletin �Ensemble� (#14) que diffuse la Compagnie du Komo a rapport� les informations suivantes :
Nos 3 soci�t�s, Electra, Sogafric Froid et Sogi, sont intervenues dans leurs secteurs de comp�tences respectifs pour la r�alisation du nouveau Minist�re des Eaux et For�ts. Electra a fourni et install� 200 bureaux et plus de 500 fauteuils choisis � la carte, le mobilier du bureau du Ministre, la caf�t�ria et tous les si�ges de l'auditorium. Ce march� est le plus gros jamais r�alis� dans toute l'existence d'Electra et a mobilis� plusieurs personnes pendant plus de 5 mois. Sogafric Froid a fourni et install� la climatisation centralis�e, la production d'eau glac�e, le d�senfumage et la ventilation [...]. Sogi pour sa part, est intervenue sans rel�che jour et nuit pendant 3 mois pour r�aliser la charpente m�tallique, toute la menuiserie aluminium et la vitrerie ainsi que les �l�ments d�coratifs monumentaux qui ornent l'�difice. F�licitations � toutes nos �quipes!
Jusqu�� r�cemment, la Compagnie du Komo contr�lait cinq concessions Mercedes en r�gion parisienne. Par le biais de la Soci�t� financi�re des Ternes (SFT), elle poss�de 50 % du cabinet conseil informatique Artaud, Courth�oux et Associ�s (ACA), dont les clients, selon le site web de la soci�t�, comprennent � un �quipementier du secteur de l�a�ronautique � ainsi qu�� un groupe industriel international sp�cialis� dans le traitement des m�taux pr�cieux �. La filiale de la Compagnie du Komo Services on-line & syst�mes informatiques (SOLSI) est le premier fournisseur d�acc�s internet et le cr�ateur du site web du S�nat gabonais.
A Paris, la Compagnie du Komo poss�de une entreprise qui a pour nom Bureau technique d�approvisionnement (BTA) Services, qui exporte des machines � glace vers l�Angola.
27. Quelles sont les autres activit�s de cette entreprise ?
* Comme vous le savez, l�Accord de confirmation pour le Gabon a �t� critiqu� pour son timing malheureux. Apr�s des mois de blocage et le refus en septembre 2003 d�un M�canisme �largi de cr�dit, le Conseil d�administration s�est trouv� approuver l�Accord deux jours apr�s une visite du pr�sident Bongo � la Maison blanche. Certains ont vu la d�cision du FMI comme une r�compense offerte par l�administration Bush au r�gime Bongo pour avoir accept� l�ouverture d�un bureau de la Defense Intelligence Agency � Libreville, et avoir r�cemment adopt� des positions pro-Washington sur la Cour internationale p�nale, l�Irak et le Darfour. Washington a aussi �t� vu comme voulant s�insinuer dans les bonnes gr�ces d�Omar Bongo en anticipation de la pr�sidence de session gabonaise � l�Assembl�e g�n�rale de l�ONU. Peu apr�s la finalisation de l�Accord, le Gabon a achet� quatre nouveaux Boeing pour 300 millions de dollars ; le FMI s�est vu obliger de faire r�duire la commande � un seul.
Le FMI semble aussi avoir �t� l�objet de pressions de la part de l�ambitieux ministre fran�ais des Finances, Nicolas Sarkozy pour approuver l�Accord. B�n�ficier de la gratitude du pr�sident gabonais, dont l�ami et client le plus ancien de France � ou d�ailleurs � est le grand rival de M. Sarkozy, serait pour ce dernier un atout politique majeur.
La non utilisation par le FMI de la conditionnalit� foresti�re semble bien coh�rente avec une interpr�tation de l�action du Conseil d�administration qui la suppose guid�e par des consid�rations politiques. A notre avis, l�octroi dans un contexte pr��lectoral d�une assistance de balance des paiements qui laisse intacte la fonction n�o-patrimoniale du secteur forestier ne peut gu�re �tre compt� comme un geste politiquement neutre. Il nous semble, au contraire, �tre un feu vert � la politique qui, apr�s 37 ans, garde le r�gime actuel au pouvoir et 62 % des Gabonais sous le seuil de pauvret�.
Bien qu�elle soit une source tr�s pr�cieuse de profits et de pr�bendes, l�industrie foresti�re gabonaise, �g�e de 120 ans, a encore � d�montrer son potentiel en mati�re de d�veloppement durable. Ceci n�est pas surprenant : elle n�y a jamais �t� oblig�e. Nous esp�rons que dans l�avenir le FMI et la Banque mondiale feront de cette obligation une condition de leur aide.
Nous attendons avec impatience votre r�ponse.
Veuillez agr�er, Monsieur, l�assurance de mes meilleures salutations,
Arthur Paul
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