Le nom de Gabon Express est désormais irréparablement associé à l'un des plus gros scandales de la république. Non seulement à cause de la morbidité de cette association, qui a vu bon nombre de compatriotes mourir irréparablement dans un crash d'avion qui aurait pu être évité, mais aussi à cause des profondes pratiques de corruption qui ont mené aux diverses négligences fatales entourant ce scandale. Le BDP vous révèle, ci-dessous, les dessous sacndaleux de l'affaire Gabon Express.
Tout commence en 1978 quand un compatriote du nord du pays, originaire de Bitam est contacté par un certain Ange Peter, qui vit maintenant aux Etats-Unis. Les discussions entre Ange Peter et Jean-Bernard Ondo Ngoulou portent sur la possible création d'une compagnie de transport aérien. Les concluantes discussions qui s'ensuivent mènent Ange Peter à organiser une rencontre entre Jean-Berrnard Ondo et un Belge d'origine tchèque du nom de Robert Sobeck. Sobeck a travaillé pendant plus de 35 ans au Congo-Kinshasa à l'époque où ce pays s'appelait encore Zaïre sous le règne dictatorial de Joseph-Désiré Mobutu Sese Seko. Sobeck servait alors de mercenaire pilote. Quand le régime de Mobutu chute suite au coup d'état accompagné de guerre civile mené par Laurent-Désiré Kabila, la plupart des mercenaires employés par Mobutu prennent la fuite. Robert Sobeck est parmi les fuyards. Un des associés de Sobeck, Kiki Lemaire, se réfugie en Afrique du Sud, mais Sobeck décide quant à lui d'aller tenter sa chance du côté du Gabon.
Robert Sobeck arrive donc au Gabon avec ses avions immatriculés au Liberia et commence à y exercer "ouvertement" son métier de mercenaire pilote spécialisé dans le transport clandestin de personnes et de biens. Il monte l'affaire en y associant un compatriote du sud du Gabon du nom de Boulingui. Mais les choses ne marchent pas aussi bien que Sobeck l'espérait car des mésententes s'installent entre Sobeck et Boulingui. Entre alors dans la danse l'ami Jean-Bernard Ondo (plus connu dans le monde aéroportuaire gabonais comme "J.B."). J.B. est alors chargé de s'occuper de tout ce qui est dossier administratif pour rendre "légales" les activités de la compagnie au Gabon, tandis que Sobect continuerait à s'occuper de fournir les avions et les pilotes.
Ce que Ange peter omet de dire à J.B. au moment où il organise la rencontre entre J.B. et Sobeck est que Sobeck, ancien et présent mercenaire était un homme qui avait roulé sa bosse par monts et par vaux en vendant ses services au plus offrant, et qu'à ce titre, il pouvait se révéler dangereux. Mais J.B. est bon travailleur. Grâce à ses efforts, la compagnie qui sera plus tard connue par le nom de Gabon Express prend peu à peu forme. Seulement, quelques problèmes interpersonnels émergent assez vite. Tandis que J.B. est, de par ses responsabilités, la deuxième personnalité de la compagnie, les employés blancs de Gabon Express ne lui accordent aucun respect, contrairement aux employés gabonais ou africains qui eux, respectent J.B. et saluent sa compétence. Avec le temps, J.B. finit par découvrir le passé tumultueux de ses associés.
Evidemment, avec de tels associés, le contournement de la loi est la chose la mieux partagée. Au fil du temps, la corruption s'installe. Robert Sobeck, en bon mercenaire voulant se faire rapidement un pactole au moindre coût, préfère payer des dessous de table aux contrôleurs qui veillent à l'état du matériel plutôt que de faire réellement les contrôles techniques qui s'imposent pour la préservation de la santé technique des avions de Gabon Express. J.B., qui ne cautionne la pratique que du bout des lèvres, demande plusieurs fois à Sobeck pourquoi il préférait perdre de l'argent à corrompre éternellement les inspecteurs au lieu de tout simplement se mettre à jour, vu que cela coûterait moins cher de cette manière. Mais Sobeck ne l'entend pas de cette oreille. Il préférait, répondait-il souvent, que les choses se passent de cette manière car comme cela, il n'avait de compte à rendre à personne. Les choses en restèrent donc là, pour un temps.
Puis un jour arrive un nouvel avion commandité par Sobeck. L'avion est une Caravelle SE 210 immatriculé, comme bon nombre d'autres, au ... Liberia. Mias cette fois, les choses tournent quelque peu au vinaigre car les concurrent de Gabon Express commencent à sentir le roussi qui se dégage des soutes de cette compagnie pas comme les autres. La pression venant des concurrents semble forcer des inspections qui dérangent grandement Sobeck, mais les vieilles habitudes ne se perdent pas. Comme pour tirer la langue à l'encontre de ses "jaloux" détracteurs, Sobeck décide un jour de changer lui-même l'immatriculation libérienne de sa Caravelle sans passer par le processus administratif requis. Il avait, dit-on, pris cette habitude en RDC où, sous Mobutu, tout était permis. Mais au Gabon, Sobeck a quelques problèmes car le changement informel de l'immatriculation de sa caravelle soulève un tollé général au sein de l'Aviation civile qui un jour débarque sur le tarmac de l'aéroport Léon Mba pour voir ça de ses propres yeux.
Mais l'ami Sobeck n'en démord pas autant. Il a ses relations en haut lieu, dit-il à qui veut l'entendre. Les agents de l'Aviation civile ne l'entendent cependant pas de cette oreille. Ils décident de prendre des mesures. Sobeck les prend cependant de court et décide de ré-immatriculer l'avion avec la précédente immatriculation libérienne. Personne ne comprenait plus rien aux manoeuvres pas très catholiques de Sobeck. Pire, les autres avions de Sobeck, les HS748 immatriculés au Liberia, changèrent eux aussi soudainement d'immatriculation. Ils affichaient maintenant des immatriculations équato-guinéennes!! Le but de Robert Sobeck semblait être, par ces changements, d'échapper au contrôle de l'aviation civile et commerciale du Gabon.
Evidemment, puisque c'était J.B. qui était le Directeur des opérations, il ne voyait plus d'un très bon oeil toutes ces manipulations, surtout qu'avec les avions circulaient des PNT (personnels navigant techniques, donc des pilotes) pour lesquels il n'avait fourni aucune autorisation. Par ailleurs, personne ne semblait le consulter pour l'embauche de ces pilotes. Les licences des pilotes, semble-t-il, étaient secrètement établies par Robert Sobeck lui-même, avec la complicité de son Directeur technique, un certain Daniel Galieni. Les licences semblaient bien évidemment valides puisqu'elles portaient le cachet de... la Guinée Equatoriale, et ce aussi bien pour les PNT (pilotes) que les PNC (hôtesses de l'air). Les avions eux aussi semblaient maintenant détenir des documentations similaires qui semblaient indiquer des immatriculations officielles en Guinée Equatoriale. Mais que pouvait faire J.B. Il n'était qu'un simple "nègre" dans un monde contrôlé par les blancs et leurs complices d'en haut. Robert Sobeck avait apparemment, avec la complicité de son Directeur Technique Daniel Galieni, décidé de se lancer tous azimuts et sans freins dans le faux et usage de faux pour échapper au contrôle des agents de l'Aviation civile et ainsi ne pas avoir de comptes à rendre à qui que ce soit.
Robert Sobeck pouvait apparemment se permettre ce type de manèges dans l'impunité, parce qu'il avait, de son propre aveu, des "appuis" en haut lieu. Car comment expliquer en effet que malgré le fait que les agents de l'Aviation civile et, donc, leurs supérieurs hiérachiques (Directeur de l'Aviation civile, Ministres, Premier ministre, Président de la république) aient su comme tout le monde à l'Aviation civile la pratique qui était celle de Sobeck, aucune mesure n'ait été prise non seulement pour réprimander le bonhomme, mais aussi pour, éventuellement, lui retirer tout droit d'exercer au Gabon tant qu'il ne se serait pas mis en situation régulière? Vu que Gabon Express était une compagnie domiciliée au Gabon, comment, par ailleurs, a-t-on pu laisser cette compagnie opérer avec des avions faussement immatriculés tantôt au Liberia, tantôt en Guinée Equatoriale? N'y a-t-il donc pas au Gabon de lois forçant une immatriculation gabonaise pour les avions des compagnies domiciliées au Gabon, et n'y a-t-il pas, en même temps, un suivi et des vérifications pouvant permettre de suivre la trace des avions immatriculés ailleurs qui seraient affrétés par des compagnies gabonaises avant même que ces avions n'arrivent au Gabon?
Tant de questions qui, au vu de l'impunité avec laquelle Robert Sobeck a semblé évoluer au Gabon, ont effectivement tendance à montrer qu'il avait des complicités en haut lieu. Ces complicités sont celles que seule la corruption et l'esprit d'association de malfaiteurs peut élucider.
Voilà pour ce qui est des dessous de la compagnie Gabon Express en ce qui concerne les expatriés qui l'animent. Dans la deuxième partie de cette série, que nous intitulerons "Les dessous de l'affaire Gabon Express: Les complicités gabonaises (2ème Partie)", nous nous chargerons de révéler qui au Gabon, du plus bas au plus haut de l'administration publique, a profité des largesses de Robert Sobeck au point de laisser opérer en toute illégalité ce mercenaire, permettant ainsi que des compatriotes perdent leurs vies dans un crash résultant d'une négligence qui n'est pas juste une négligence, mais bel et bien un crime contre la nation gabonaise.