Pierre Akendengué: chanteur Le musicien gabonais sort un 14e album et se produit au Bataclan, à Paris.
Il Sort un nouvel album, Ekunda-Sah, le quatorzième d'un parcours commencé en 1967 au Petit Conservatoire de Mireille. Chanteur-philosophe, musicien-conteur, il croise la luxuriance des rythmes et des voix de la forêt équatoriale d'Afrique centrale avec la chanson française. Après vingt ans en France, il est retourné au Gabon en 1985 où il est devenu conseiller culturel du président Bongo. Il se produit le 4 avril au Bataclan, à Paris.
Vos chansons, en langue myéné et en français, ont des allures de conte. quel est le sens de ce parti pris dans votre écriture ?
Le conte, c'est un héritage de la société ancestrale. Je reste fidèle à cette civilisation de l'oralité. Au-delà, c'est aussi pour moi une manière d'exprimer ce que j'ai sur le coeur. L'art doit être un ferment de contestation dans une société, pour lui éviter de se scléroser. Le conte offre cette possibilité ; il dit une chose et en signifie une autre. Quand j'étais étudiant, j'ai été interdit d'antenne et de séjour chez moi. Les choses ont évolué. La preuve : j'ai accepté le poste de conseiller culturel. Notre culture, bien plus que le fer ou le manganèse, est la première richesse de notre pays et devrait être plus valorisée. Mais les politiques pensent qu'il y a d'autres priorités. Un conseiller n'est pas un décideur. Je donne des avis. Quant à ce qu'ils deviennent après...
Panafricain convaincu, vous n'avez jamais été gagné par le découragement ?
J'y crois de plus en plus. Pour se construire une indépendance politique et économique, l'Afrique doit nécessairement faire unité. Ce rêve n'est pas du tout utopique. Il a donné naissance à l'Organisation de l'unité africaine (OUA), qui a resurgi sous la forme de l'Union africaine. Celle-ci est d'ailleurs bien plus efficace que ne l'était l'OUA. Elle s'implique davantage dans les conflits africains, par exemple en Côte d'Ivoire ou au Togo.
Vous êtes perçu comme un pionnier de la musique africaine en france. assumez-vous cette présentation ?
Cela me gêne un peu. En réalité, je me suis inspiré d'autres, moi aussi. D'abord de mon peuple, dont je n'ai fait que réécrire la tradition, en essayant de lui rester fidèle. Mon premier 45-tours, Le Chant du coupeur d'okoumé, au début des années 1970, je l'ai produit à compte d'auteur, car les maisons de disques n'avaient de faveur à l'époque que pour les artistes qui faisaient danser. Mes chansons, "d'inspiration philosophico-religieuses", ne les intéressaient pas. Ce disque est tombé entre les mains de Pierre Barouh -créateur du label Saravah-.
Il a sorti mon premier album, Nandipo, en 1974. Ce sont des gens comme lui qui sont les pionniers. Ou bien d'autres chanteurs, tels que le Congolais Franklin Boukaka, assassiné en 1972, qui avait chanté avant moi Les Immortels, ceux qui ont cru en la libération de l'homme et en particulier des peuples sous le joug colonial.
Ekunda-Sah, 1 CD Taxi Records/ Codaex. Concert le 4 avril au Bataclan, 50, bd Voltaire, Paris-11e. M° Oberkampf. Tél. : 01-43-14-35-35. 29,50 €.