Pensée et action politique du BDP-Gabon Nouveau |
17 janvier 1999 Le bilan de la situation socio-économique que se préparent à rendre public les agences des Nations-Unies au Gabon en dit long sur les progrès qu'au Gabon nous avons encore à faire en matière socio-économique, surtout dans des domaines tels que l'économie, l'éducation, l'habitat, l'emploi, la pauvreté, la santé, etc. Pour ceux qui aiment lire et qui veulent tous les détails du rapport, vous pouvez toujours vous référer à la page Rapports sur les droits humains de notre site. Cliquez sur le lien Bilan Commun des agences des Nations Unies au Gabon: Année 1998. Ce rapport commun des agences des Nations-Unies au Gabon, bien plus que des mots ou des discours résume parfaitement l'état déplorable dans lequel se situe notre pays et confirme, sans détour, les craintes du BDP-Gabon Nouveau quant à l'avenir du Gabon avec Bongo à sa tête. Au risque de décevoir ceux qui, aujourd'hui, osent encore croire en la capacité de Bongo de sortir notre pays de l'impasse actuelle, l'on sera par exemple choqué d'apprendre qu'au Gabon: 1) Sur une base primaire initiale de 84,4%, seuls 26,3% de nos élèves atteignent l'école secondaire, et que, ô scandale, seuls 2,5% de nos élèvent atteignent l'université. Les causes: pauvreté, inefficacité du système éducatif, manque d'allocation de ressources matérielles et humaines, etc. Si ce n'est pas une négligence scandaleuse de l'éducation ça, alors nous au BDP ne savons plus de quoi nous parlons! Pour nous, c'est là le signe même d'un assassinat des intelligences du pays, comme nous l'avons souligné dans notre tout dernier article "Quelles leçons peut-on tirer ". Des chiffres aussi scandaleux constituent un vrai suicide économique pour le pays, à cause du manque chronique de ressources humaines adéquatement formées que lui a coûté plus de trente ans de pouvoir Bongo. Ce rapport rajoute même que: "Aussi bien chez les chômeurs que dans la population active occupée, plus de 70% ont un niveau scolaire inférieur ou égal à la classe de 3ème (Fin du premier cycle secondaire). Cette situation qui traduit l'inefficacité du système éducatif ainsi que le déficit de qualification et de technicité de la population active pourrait être une entrave à la reprise de la croissance faute de disposer de ressources humaines adaptées." Que diront les défenseurs de Bongo face à un verdict aussi impitoyable venant d'analystes autres que ceux du BDP? Mais le rapport ne s'arrête pas là. Il stipule que: 2) "A Libreville la capitale administrative, 80% de la population habitent dans des quartiers sous-intégrés où les maisons de bonnes qualités (construites avec des matériaux solides) jouxtent des maisons en matériaux peu solides, généralement sans fondation et qui présentent des risques pour leur vie essentiellement sous l'effet de la pollution". 3) La proportion des personnes vivant en dessous du salaire minimum se serait, en 1994, située à 83%. Pendant la même période, la population vivant en dessous du seuil de pauvreté fixé au 2/3 de la consommation moyenne se situait 62%. La pauvreté extrême, elle, se situait 23% de la population. De plus, près de 20% de la population de Libreville et de Port-Gentil vivent en dessous du seuil de pauvreté absolue, tandis que 25% vivent en dessous du seuil de pauvreté relative. 4) "En 1993, à peine 26% de la population dispose d'un WC hydraulique". 5) Malgré le statut de pays le plus riche d'Afrique noire en termes de PNB (Produit National Brut) dont jouit le Gabon, "pour 95% de la population rurale et 57% des habitants des centres urbains, la santé constitue un problème prioritaire. Malgré un niveau élevé des dépenses publiques et privées en faveur de la santé, le profil démographique et épidémiologique du Gabon reste caractéristique des pays pauvres. L'espérance de vie à la naissance de l'ordre de 53 ans est faible, le taux brut de mortalité (15,6/1000) et le taux de mortalité maternelle (600/100000) sont très élevés. La morbidité également élevée est dominée par les maladies infectieuses et parasitaires; la nutrition est un problème de santé publique car 11% des naissances vivantes enregistrent un poids inférieur à 2500 grammes." Voilà pourquoi nous pensons qu'il est absolument impératif que Bongo s'en aille s'il ne veut pas laisser notre pays sur la paille de la banqueroute irrévocable. Ceux qui parlent de nouveau gouvernement, et qui semblent même, surprise, considérer Bongo comme un NOUVEAU président, veulent nous convaincre que Bongo s'est refait une santé morale qui, après 31 ans d'incompétence notoire, va soudain le transformer en lumière capable de sortir notre pays du gouffre! Alors que le pays est plus que jamais endetté et appauvri! Face à de tels arguments, nous ne pouvons que constater la naïveté de ceux qui, faute de mieux, se lancent dans de telles croyances. Ils ne savent tout simplement pas ce qu'ils disent et semblent se préoccuper plus de leur pain personnel que des 80% de notre peuple qui croupissent actuellement dans la misère la plus abjecte. Il est donc plus que jamais clair pour nous et pour la majorité de la population, que Bongo doit partir. Nous lui avons fixé les modalités de son départ. Qu'il fasse le choix qui lui convient, mais qu'il sache que personne n'est dupe. C'est à ce départ que le BDP, plus que jamais, s'attelera. Nous osons cependant espérer que Monsieur Bongo saura faire le bon choix, qui est celui de la paix, en choisissant les formes de départs pacifiques que nous avons soulignés dans nos analyses précédentes. Il y va du bien-être de tout un peuple. Le BDP-Gabon Nouveau BILAN COMMUN DES AGENCES DES NATIONS-UNIES AU GABON: ANNEE 1998 MACRO-ÉCONOMIE Le budget de l'Etat a été excédentaire en 1997 avec des recettes recouvrées de 937,5 milliards et des dépenses de 725,4 milliards de fcfa dépassant ainsi l'objectif initialement fixé par le Gouvernement. De même, la dette publique gabonaise, bien que d'un niveau élevé, a considérablement été améliorée sous l'impulsion du programme d'ajustement structurel. L'encours de la dette publique extérieure est passée de 1987,3 milliards en 1996 à 1754,8 milliards de francs cfa en 1997 soit une baisse de 11,7%, tandis que le service se stabilise autour de 411 milliards de francs cfa. Elle demeure toujours dominée par la dette bilatérale qui occupe 73,5% de la dette totale. Cet effort de gestion contraste avec les dernières tendances. En effet, le budget 1998 a été construit sur une hypothèse de hausse du prix du baril de pétrole qui passerait à 16,5 $ US. Mais les cours ayant chuté au-dessous de 14 $ US, et l'économie forestière ayant baissé suite à la crise asiatique, il est à craindre que les résultats de 1998 ne contribuent à déséquilibrer le budget et à détériorer la situation dans le futur. L'activité économique est dominée par l'exploitation des matières premières du sol et du sous-sol, notamment le pétrole, le bois, le manganèse et l'uranium (dont la fin de production est prévue en l'an 2000). Le secteur primaire occupe donc la première place avec 50,5% du PIB en 1997. Le secteur tertiaire occupe 29,9 % du PIB et le secteur secondaire participe pour 10,1%. Il est à noter que l'exploitation des ressources pétrolières, de par son intensité capitalistique, augmente les ressources de l'Etat mais a très peu d'effet d'entraînement durable sur les conditions de vie des populations et sur les autres secteurs de l'économie. Par contre, l'exploitation forestière, à haute intensité de main d'oeuvre, a des conséquences plus directes sur les populations. De sorte que les difficultés du secteur forestier observées suite à la crise asiatique, auront plus de conséquences sociales que le mini choc pétrolier observé au premier trimestre 1998. L'agriculture est très peu développée, ne représentant que 5% du PIB en 1997 et couvrant seulement 20% des besoins alimentaires. Le tourisme regorge d'énormes potentialités mais demeure inexploité à cause de la faiblesse des infrastructures nationales de transport et les coûts élevés qui en découlent. SITUATION DÉMOGRAPHIQUE DU PAYS: Urbanisation L'urbanisation connaît un essor rapide et préoccupant car la proportion de la population vivant en milieu urbain est passée de 13% en 1960 à 73% en 1993. Cette évolution résulte d'un exode rural intense qui désorganise les systèmes ruraux de production, engorge les villes et exacerbe les problèmes déjà épineux d'emploi, d'éducation, de santé, de logement et d'hygiène. Situation sanitaire La situation sanitaire demeure préoccupante. Espérance de vie: 54 ans pour l'ensemble de la population, la longévité des femmes (55 ans) étant légèrement supérieure à celle des hommes. Il existe une persistance des niveaux élevés de mortalité infantile (91/1000), juvenile (148/1000) et maternelle (500/100000). EDUCATION L'enseignement préscolaire est très peu développé : il est majoritairement géré par le privé. Aussi les écoles maternelles sont-elles essentiellement fréquentées par des élèves habitant en zone urbaine et dont les parents peuvent payer les frais de scolarité dans un établissement préscolaire privé. Selon le recensement de la population de 1993, seulement 9,6% de la population âgée de 3 à 5 ans est allée à l'école maternelle.
Emploi-formation Aussi bien chez les chômeurs que dans la population active occupée, plus de 70% ont un niveau scolaire inférieur ou égal à la classe de 3ème ( Fin du premier cycle secondaire). Cette situation qui traduit l'inefficacité du système éducatif ainsi que le déficit de qualification et de technicité de la population active pourrait être une entrave à la reprise de la croissance faute de disposer de ressources humaines adaptées. Du fait des déperditions scolaires et de leur précocité, un grand nombre de demandeurs d'emploi est sans formation avec un faible niveau d'instruction; 40% des jeunes chômeurs inscrits à l'Office Nationale de l'Emploi n'ont aucune formation professionnelle. De même que l'éducation de base, l'enseignement professionnel est très peu développé au Gabon et l'efficacité de ces formations (pour la plupart privé) souvent remise en cause par les employeurs du fait de l'externalité de la formation aux besoins de l'économie limite la portée. On en arrive ainsi à une situation paradoxale dans laquelle on note d'une part plusieurs jeunes se présentant sur le marché du travail et n'y trouvant pas d'emploi, d'autre part un déficit de compétences capables d'occuper les emplois disponibles en raison des insuffisances du système éducatif. EMPLOI 56 % d'actifs, dont 12% de chômeurs. Les tendances macro-économiques montrent que la croissance économique n'est pas une condition suffisante à la création d'emplois. Certes le Gabon enregistre des taux de croissance économique élevés suite à l'exportation du pétrole, mais cette croissance ne génère pas d'emploi. Bien au contraire on remarque une stagnation et parfois un recul des emplois rémunérés ainsi que des faiblesses institutionnelles notamment dans le domaine de la planification des emplois. Dans la période allant de 1994 à 1995 on compte 8% d'emplois en moins alors que le secteur primaire formel (tiré essentiellement du bois) enregistre un taux de croissance de 24% de 1992 à 1995 et crée plus de 2 000 emplois et le secteur secondaire, grâce au BTP enregistre une croissance de 17% et permis la création de 500 nouveaux emplois dans la même période. Enfin le secteur tertiaire quant à lui progresse avec 700 nouveaux emplois et enregistre un taux de croissance de 5 %. Aussi, pour une meilleure gestion et un plus grand profit il serait utile que les ressources du secteur pétrolier soient réinvesties dans les autres secteurs susceptibles de générer plus d'emplois. ( ) La crise qu'a traversée le Gabon à partir de 1986 a eu des conséquences néfastes sur l'emploi du fait de la compression d'effectifs qu'elle a occasionnée dans les entreprises (54% des chômeurs ont déjà travaillé) et du manque de création d'emploi. C'est dans les zones urbaines que l'on retrouve le plus grand nombre de chômeurs : 78,8% d'entre eux vivent en zone urbaine. On compte en moyenne 3 personnes occupées pour 2 personnes à charge en zone rurale, alors qu'en milieu urbain le même rapport passe à 4 personnes occupées pour près de 7 personnes à charge. D'où l'importance croissante des phénomènes de dégradation des conditions de vie, de délinquance, d'insécurité, et de compression du pouvoir d'achat... Les perspectives d'emploi Une enquête menée auprès de 83 entreprises de Libreville et Port-gentil en 1995 révèle que 59% des entreprises ne sont pas favorables à de nouveaux recrutements. La majorité d'entre elles (61,2%) justifient leur position par l'incertitude économique. Si l'on s'en tient aux estimations des entreprises du secteur moderne favorable à l'emploi, il y aura environ 1120 créations d'emplois par an, soit moins de 8000 emplois crées dans ce secteur à l'horizon 2003. Ce chiffre est largement en dessous des besoins exprimés précédemment. Aussi il serait souhaitable que des efforts particuliers soient entrepris pour encourager la création d'emploi. HABITAT La qualité de l'habitat reflète et influence directement le niveau de bien-être de la population. Pourtant, conformément à la situation observée dans les autres pays en développement, un bon nombre de personnes ne dispose pas d'un logement décent au Gabon. A Libreville la capitale administrative, 80% de la population habitent dans des quartiers sous- intégrés où les maisons de bonnes qualités (construites avec des matériaux solides) jouxtent des maisons en matériaux peu solides, généralement sans fondation et qui présentent des risques pour leur vie essentiellement sous l'effet de la pollution. Evacuation des déchets Dans les centres urbains, la collecte des ordures constitue un véritable problème. Jusque là, seules les populations résidant dans des quartiers tracés et celles qui sont à proximité des voies bitumées bénéficient de la collecte d'ordures. Laissant ainsi à l'arrière de chaque quartier une importante population dont les ordures sont généralement déversées à l'air libre (c'est-à-dire dans les rues, caniveaux et pourtour des maisons ). En milieu rural, les problèmes inhérents à la collecte des ordures se posent avec moins d'accuité du fait que la pression démographique y soit moins forte. Il n'empêche que le problème demeure dans la mesure où il n'y existe quasiment pas de collecte d'ordure à proprement parlé et lorsqu'elle existe, la surface couverte reste négligeable : la majorité de personnes déposent leurs ordures dans la nature. Evacuation des eaux et des excréta En 1993, à peine 26% de la population dispose d'un WC hydraulique. On compte par ailleurs un grand nombre de caniveaux à ciel ouvert lorsqu'ils ne sont pas bouchés; ce qui constitue un véritable problème lorsque les eaux de pluies s'y ajoutent. En zone rurale, le problème d'évacuation des excréta se pose avec d'autant plus d'acuité qu'une importante partie de la population ne dispose pas de lieu d'aisance. L'ensemble des problèmes d'évacuation de déchets, d'eau et d'excréta associés à l'humidité du climat favorisent la multiplication de microbes et exposent les populations aux infections et autres maladies. Rappelons d'ailleurs que les principales causes de mortalité, aussi bien chez les enfants (diarrhé)que chez les adultes (maladies respiratoires aigües), sont des affections engendrées par le manque d'hygiène. Abonnement au téléphone Le téléphone reste considéré comme un "produit de luxe au Gabon". En 1996 on compte en moyenne 33 lignes pour 1000 habitants ce qui est relativement faible. La demande de ligne téléphonique est largement supérieure à l'offre au point que l'Office des Postes et Télécommunications a suspendu l'octroi de lignes téléphoniques pour étendre son réseau d'installation actuellement saturé. PAUVRETE La pauvreté frappe tous les pays, mais la situation est particulièrement grave dans les pays en développement. Malgré son produit intérieur brut (PIB) par habitant élevé, Le Gabon n'est pas épargné par ce fléau. Longtemps exclu des débats et ignoré par les responsables, le problème de la pauvreté est devenu préoccupant après la crise financière occasionnée par le contre-choc pétrolier de 1986. La publication du Rapport mondial sur le développement humain par le PNUD en 1990 a montré l'existence des inégalités et de la pauvreté au Gabon. Ce rapport a établi un écart de 46 points entre le classement du Gabon selon l'indice du développement humain (IDH), 120 ème sur 174, et le classement d'après le PIB par habitant, 74ème sur 174. On constate cependant que cet écart se réduit progressivement : le Rapport mondial sur le développement humain 1998 estime cet écart à 24 points en 1995. Le rapport de la Banque Mondiale publié en 1997 a corroboré l'existence d'inégalités flagrantes et de plusieurs formes de pauvreté dont la pauvreté extrême. Après avoir dressé le profil et examiné les facteurs, ce rapport se termine par une stratégie de réduction de la pauvreté. Notons cependant que jusque là le gouvernement n'a pas définie de stratégie de lutte contre la pauvreté. Les lignes suivantes présentent un aperçu de la pauvreté au Gabon en partant de différentes études et en introduisant les aspects liés au développement humain. Définition et mesure de la pauvreté Le concept de pauvreté peut être appréhendé de plusieurs façons. On utilise généralement le critère revenu ou dépense, mais le point de vue du développement humain est plus large encore. Celui-ci intègre d'autres critères tels que la brièveté de la vie, l'analphabétisme, l'exclusion et le manque de ressources matérielles.Pour mesurer la pauvreté au Gabon, la Banque Mondiale a utilisé trois seuils de pauvreté: le premier se situe au niveau du salaire minimum, le deuxième aux 2/3 de la consommation moyenne, et le troisième à un dollar par jour et par personne qui correspond au seuil de pauvreté extrême. Par ailleurs, l'Enquête Budget Consommation des ménages (EBC) organisée en 1993 a permis d'établir des seuils de pauvreté absolue et relative. Le seuil de pauvreté absolue est défini comme le revenu nécessaire pour satisfaire des besoins nutritionnels minimum compte tenu des habitudes alimentaires et d'un minimum d'autres dépenses de base (habillement, logement, transports). Il est estimé à environ 29 000 FCFA (environ 58 $) par mois et par personne. Le seuil de pauvreté relative a été fixé au quart du revenu moyen. Le salaire minimum, fixé autour de 64 000 FCFA (environ 120 $) par mois, est une bonne approximation de ce seuil. Celui-ci est également utilisé par la Caisse Nationale de Garantie Sociale (CNGS) pour définir l'indigence dans ces termes: "Est considérée comme indigente toute personne de nationalité gabonaise, non salariée, dont le revenu monétaire est inférieur au SMIG, soit 64 000 FCFA par mois (sans soutien familial, matériel ou financier)". AMPLEUR, TENDANCE ET LOCALISATION DE LA PAUVRETÉ A partir des seuils de pauvreté: Les observations faites de 1960 à 1994 montrent que la pauvreté a toujours été considérable sous tous ses aspects, en particulier lorsque les deux premiers seuils définis ci-dessus sont considérés.La proportion des personnes vivant en dessous du salaire minimum est passée de 87% en 1960 à 83% en 1994. Pendant la même période, la population vivant en dessous du seuil de pauvreté fixé au 2/3 de la consommation moyenne a varié de 68 à 62%. En somme, la pauvreté relative avec une incidence supérieure à 60% de la population, a légèrement baissé entre 1960 et 1994. Par contre, la pauvreté extrême dont le seuil est fixé à un dollar par personne et par jour, a beaucoup baissé entre 1960 et 1994 en passant de 66 à 23% de la population. Près de 20% de la population des deux plus grandes villes, Libreville et Port-Gentil, vivent en dessous du seuil de pauvreté absolue, tandis que 25% vivent en dessous du seuil de pauvreté relative.Les revenus des ménages vivant en milieu rural ne sont pas bien connus. Mais les observations montrent que les populations rurales vivent dans un grand dénuement. Elles sont isolées et n'ont qu'un accès limité à l'eau potable, aux services de santé et d'éducation.Dans l'optique du développement humain, il y a lieu de considérer des indicateurs non monétaires afin de percevoir la pauvreté des populations sous tous ses aspects. Du point de vue de la santé : Pour 95% de la population rurale et 57% des habitants des centres urbains, la santé constitue un problème prioritaire. Malgré un niveau élevé des dépenses publiques et privées en faveur de la santé, le profil démographique et épidémiologique du Gabon reste caractéristique des pays pauvres. L'espérance de vie à la naissance de l'ordre de 53 ans est faible, le taux brut de mortalité (15,6/1000) et le taux de mortalité maternelle (600/100000) sont très élevés. La morbidité également élevée est dominée par les maladies infectieuses et parasitaires; la nutrition est un problème de santé publique car 11% des naissances vivantes enregistrent un poids inférieur à 2500 grammes. Du point de vue de l'éducation: La situation est telle que l'insuffisance des enseignants et des infrastructures crée des conditions défavorables à l'émergence d'un enseignement de qualité, avec cependant des différences entre milieu rural et milieu urbain. Le surpeuplement des classes est caractéristique du milieu urbain. Il a entrainé l'instauration de la double vacation ainsi que la réduction du nombre d'heures d'enseignement offertes aux élèves. Les problèmes en milieu rural concernent la précarité des infrastructures et le manque de mobilier qui compliquent le travail aussi bien des élèves que des enseignants. La dégradation des conditions de travail a des conséquences fâcheuses sur les rendements du système éducatif. La faiblesse du système éducatif se manisfeste notamment par son caractère répulsif dû à l'importance des redoublements, des abandons et des coûts de l'enseignement. Dans un tel contexte, l'analphabétisme est l'une des conséquences du système, soit parce que certaines personnes n'ont pas eu accès à l'éducation, soit parce que certains élèves ont abandonné leur scolarité avant terme. Les pauvres sont naturellement les plus frappés car ils ont plus difficilement accès à une éducation de qualité et sont les plus exposés aux redoublements, aux abandons et à l'analphabétisme. Du point de vue de l'emploi : Dans ce domaine, la pauvreté en matière d'emploi se mesure à l'offre de travail qui devrait mettre l'accent sur la participation des individus et sur leur potentiel productif en tant que moyen de libérer leurs aptitudes. L'offre de travail devrait également tenir compte des revenus qui constituent l'expression de la croissance économique dans la vie des individus. Or le Gabon fait face à une croissance économique qui ne génère pas d'emploi du fait que ses revenus proviennent essentiellement du pétrole dont la production ne dépend pas de l'investissement humain. La pauvreté en matière d'emploi se traduit par une absence de stratégie de croissance opérationnelles spécifiquement créatrice d'emplois qui induit une pénurie d'emplois productifs et rémunérateurs. Par ailleurs, les emplois disponibles ne sont pas toujours pourvus soit parce qu'ils sont dépréciés, soit parce qu'ils nécessitent un savoir faire que les gabonais n'ont pas. Enfin, aux effets dûs à la rareté des emplois on peut associer l'inflation qui s'exerce sur les travailleurs et qui les amènent, pour survivre, à exercer des emplois n'obeissant pas aux normes et aux conditions de sécurité, faute d'alternatives plus favorables sur le marché du travail. Ce type d'emploi n'est pas le seul fait de secteurs informels mais se retrouve de plus en plus dans le secteur moderne formel. Du point de vue des conditions de vie des ménages: a- L'accès à l'eau potable n'est assuré que pour 66% de la population avec des inégalités profondes selon le milieu de résidence, les provinces et les niveaux de revenus. Si à Libreville, 15% de la population n'a pas accès à l'eau potable, cette proportion atteind 46% à Port-Gentil et dépasse 80% dans les provinces de la Nyanga et de la Ngounié. b- La précarité et l'insécurité caractérisent la situation générale du logement, à l'exception de Libreville et Port-Gentil où respectivement la moitié et le tiers des ménages occupent des logements de type moderne. Le statut d'occupation le plus fréquent sur le plan national et en milieu urbain est la location. En milieu rural, la plupart des ménages sont propriétaires ou logés gratuitement. La situation de locataire est la plus redoutable à cause notamment du coût du loyer qui reste élevé. Société civile : La participation des populations à la société civile s'accroît également. La participation des ONGs reste cependant limitée dans la mesure où, contrairement aux autres pays de la sous-région, le Gabon n'a pas une tradition d'associations. Cette absence s'explique - du moins en partie - par le fait que les gabonais ont jusque là vécu grâce à une économie de rente tout leur était offert par l'Etat. Il n'ont par conséquent pas eu l'occasion d'éprouver et de développer le désir de participer à la construction de leur pays en s'organisant pour s'offrir ce que l'Etat ne peut fournir. Dans un tel contexte, la vie associative avec ce qu'elle comprend, constitue un apprentissage. Il n'empêche que les ONGs se multiplient et jouent un rôle de plus en plus important en tant que porte-parole des aspirations populaires mais aussi en tant qu'acteurs de développement. En plus des aspects énumérés ci dessus la pauvreté humaine au Gabon englobe un certain nombre d'aspects que l'on a, jusque là, du mal à mesurer. La violence augmente dans les villes et les enfants qui, semblent-ils, étaient les mieux protégés dans la société tradionnelle sont de plus en plus abandonnés dans la rue et victimes de négligences et/ou de quantités de mauvais traitements. La consommation d'alcool, de drogue et l'accroissement de la criminalité constituent autant de menaces ressenties par les populations mais contre lesquelles il n'y a aucune mobilisation faute de statistiques fiables susceptibles d'attirer l'attention des décideurs. La corruption s'intensifie également faisant naître une nouvelle forme de pauvreté. En effet, d'une part elle diminue les recettes fiscales et donc les ressources des services publics, d'autre part elle favorise le mépris des lois exposant ainsi les plus pauvres (ceux qui n'ont pas de soutien parmi les décideurs et/ou ne peuvent payer le prix) à davantage de misère. En comparaison avec les autres pays et au regard des potentialités dont dispose le Gabon, la situation décrite ci-dessus montre l'ampleur de la pauvreté, quel que soit le critère utilisé. Pour le rapport complet, allez sur cette adresse: http://www.globalwebco.net/bdp/droitshumains93-94.htm. Cliquez sur le lien "Bilan Commun des agences des Nations Unies au Gabon: Année 1998".
Quelles leçons peut-on tirer de l'instabilité post-électorale actuelle au Gabon? 17 janvier 1999 L'observateur averti n'aura point manqué de noter l'intéressant paradoxe qui se dessine peu à peu dans le paysage sociopolitique du Gabon. Un paradoxe qui oppose l'apparente euphorie avec laquelle Omar Bongo annonça sa victoire contestée à l'élection présidentielle du 6 décembre dernier, et l'instabilité politique à fond de revendications socio-économiques qui secoue actuellement notre pays. Ainsi, aux 66,55% de résultats plébiscitaires annoncés avec grande pompe par le pouvoir en place semble aujourd'hui répondre une grogne populaire qui laisse planer les plus gros doutes sur la légimité d'une victoire qui, sur le plan international, fut accueillie avec un profond scepticisme. Selon un article publié le 9 décembre dernier par Le Monde, le Centre Carter, avant même la tenue de l'élection présidentielle, aurait apparemment renoncé à envoyer une délégation d'observateurs au Gabon. Les raisons de ce désistement, l'on serait tenté de conclure, relevaient probablement d'un refus du Centre Carter de donner, par sa présence, caution à une élection dont le résultat semblait programmé d'avance. A l'exception des médias d'état gabonais et de l'administration française, l'acceuil de la réélection d'Omar Bongo ne sembla positivement surprendre personne. Cette réélection provoquait même un véritable tollé d'indignation auprès de journaux français tels Le Monde ou L'Humanité, parmi d'autres. Personne ne semblait donc dupe quant à ces résultats que l'Humanité qualifia de nouvelle "auto-proclamation" (L'Humanité du 10 décembre 1998), faisant ainsi écho aux sentiments exprimés par l'Associated Press qui estimait qu'Omar Bongo s'était déjà, en 1993, "autoproclamé élu au premier tour" (AP, 9 décembre 1998). C'est dire que la réélection d'Omar Bongo le 6 décembre dernier allait, en réalité, à contre-courant de la logique sociologique et sociale qui prévalait dans le pays. Par conséquent, ceux qui ont suivi l'évolution politique du Gabon depuis 1989 ne seront point surpris de la grogne populaire qui, aujourd'hui, vient saluer la victoire de Bongo, à peine un mois et quelques jours après l'euphorie de la victoire. Cette grogne sonne même comme le glas d'un cinglant démenti qui aujourd'hui accule le pouvoir soit à une prise d'action immédiate, soit à un désistement immédiat pour cause d'incompétence. C'est que le peuple n'aura accordé aucune nuit de noces à Omar Bongo, son "illustrissime" président, dans ce mariage forcé dans lequel il s'est vu engagé malgré sa volonté. Quelles leçons peuvent donc être tirées de l'instabilité qui paradoxalement aujourd'hui ressurgit dans le pays, malgré les promesses de "paix" de l'ex-candidat Bongo? La première considération est que cela fait tout simplement au moins dix ans que notre pays n'a pas connu la paix sociale. Il n'y a point d'année qui soit passée depuis, au moins, 1989, qui n'ait vu quelque secteur économique commencer une grève, les étudiants grogner ou des manifestations politiques rappeler à Bongo que les Gabonais n'en pouvaient plus de leur situation socio-économique déplorable. Le manque de stabilité qui, en ce mois de janvier post-électoral, vient nous rappeler que les problèmes du Gabon étaient demeurés inchangés malgré les grosses promesses et corruptions électorales, est lourd de conséquence pour notre pays et n'augure point d'un avenir prometteur. La deuxième considération est que, comme nous le disions dans un précédent article, il ne peut logiquement y avoir de paix sociale dans un pays où le peuple meurt de faim, subit les effets d'un taux de chômage chronique, d'un système de santé en état avancé de délabrement, d'une économie de rente qui, à chaque soubressaut pétrolier, est désarçonnée par manque de stabilité, etc. Pour le Gabon, cela veut tout simplement dire une complexité de faits et facteurs que nous voulons ici développer pour nos lecteurs. En termes socio-économiques, dix années d'instabilité ne peuvent que se traduire en conséquences très graves pour une économie de rente comme celle du Gabon: 1) La première conséquence est celle d'un immobilisme socio-économique: en termes simples et directs, l'on peut dire que cela fait au moins dix ans que notre pays ne travaille plus. Quand une population en est réduite à revendiquer, année après année, la satisfaction de ses besoins les plus élémentaires, il est évident que cette population sera incapable de se concentrer sur son travail. On peut donc dire que cela fait au moins dix ans que les Gabonais ne travaillent et ne produisent plus rien. Economiquement, cet immobilisme social ne peut que se traduire en un manque à gagner dont l'issue fatale ne manquera point de compromettre toute reprise de l'activité économique au Gabon. Par manque de ressources humaines motivées, l'on comprend donc qu'il se produise une atrophie des valeurs qui devient un facteur crucial dans la disponibilité et le désir de travailler de la population. 2) La deuxième conséquence est celle d'un immobilisme psychologique: quand, de par une activité économique en pleine récession et une atmosphère politique répressive qui lui enlève toute volonté de produire, une population est acculée dans les derniers retranchements de son instinct de survie, cette population, comme un enfant autiste, ne peut que se recroqueviller sur sa douleur, refusant ainsi de servir ou de répondre aux injonctions d'un état qui l'avilit et le transforme peu à peu en animal acculé à une mort lente. Aujourd'hui, la population gabonaise semble confinée dans les extrémités d'une psychose silencieuse qui la ronge à petit feu, la rendant ainsi paradoxalement à la fois très nerveuse et amorphe en même temps. Cette situation paradoxale conduit donc les Gabonais à la perte de toute volonté de produire car, comme ils le savent, les fruits de leur dur labeur ne lui sont jamais redistribués. Années après années, ce peuple s'était vu travailler pour ne récolter que les miettes d'une manne économique à laquelle il croyait avoir droit. Sa déception ne peut alors se mesurer qu'à la profondeur de son découragement. 3) La troisième conséquence relève de l'immobilisme culturel: quand la diversité d'une population multi-ethnique est utilisée par l'état comme moyen d'asseoir son pouvoir en menant cette diversité à une confrontation socioculturelle exclusive, l'on aboutit forcément à un immobilisme socioculturel qui empêche le brassage des groupes qui composent cette diversité. Depuis 1967, le pouvoir de Bongo a axé son action culturelle sur les divisions ethniques. Aujourd'hui, les Gabonais sont plus que jamais divisés selon des contours ethniques qui, de nos jours, ne devraient plus exister dans notre pays. Le brassage qui aurait dû se produire pour donner naissance à une nation à la fois socioculturellement intégrée et respectueuse des particularités des uns et des autres n'a malheureusement pas eu lieu. La preuve: un Gabonais de Mayumba, à moins d'y être administrativement affecté, n'arrive pas encore à se sentir chez lui parmi ses compatriotes de Bitam. De même, un Gabonais de Franceville, à moins d'y être affecté, se sentirait presque en pays étranger dans un village de Makokou. Ce manque de mobilité socio-économique et, surtout, culturel montre que le Gabon, près de 40 ans après son indépendance, n'a point encore entrepris le genre de brassage culturel qui favoriserait la naissance d'un état-nation véritable. C'est ainsi que, lors des campagnes électorales, l'on voit des candidats hésiter à se rendre dans telle ou telle autre province du pays par peur de représailles que les originaires de ces provinces ne font rien pour contenir. Le pays est ainsi condamné, depuis au moins trente et une années, à vivre des rivalités ethniques qui retardent malencontreusement la construction d'un état véritablement nation. Sur le plan de la démocratie, ceci enlève toute crédibilité à tout processus qui use de l'ethnie comme instrument de subversion de l'esprit national. 4) La quatrième conséquence recouvre le domaine de l'immobilisme intellectuel: quand dans un pays, le régime en place craint ses intellectuels, l'on about it forcément à une situation de négligence qui ne favorise point l'émergence d'une classe intellectuelle capable de mener au développement du pays. Au Gabon, les trente et une années de pouvoir Bongo ont vu en les étudiants une race dont il fallait proscrire l'émergence. Tandis qu'ailleurs, l'éducation a représenté l'un des plus importants moteurs du développement économique d'un pays, au Gabon, l'école a été vue comme un danger permanent dont il fallait absolument contrôler la progression et l'accès à l'information. Les revendications étudiantes de ce mois de janvier viennent encore une fois nous rappeler que cette éducation devrait être l'une des priorités de notre système économique. En investissant dans une éducation de qualité, le pays s'assurera forcément un avenir compétent grâce à une classe intellectuelle en pleine effervescence. Or, que voit-on au Gabon? Des écoles de plus en plus inaccessibles pour les pauvres parce que payantes, une université sans ressources bibliographiques, informatiques ou humaines, à cause d'un manque d'allocations financières capables de mener à la formation et à l'enrichissement des intelligences potentielles dont le pays regorge. Tandis que l'Internet, accompagné d'une informatisation totale de l'Université gabonaise aurait dû devenir l'investissement de choix qui aurait pu favoriser l'accès à l'information et développer la recherche académique, on a vu ces outils éducationnels de choix confinés dans les bureaux d'une administration politique qui ne peut en faire un usage véritablement productif. C'est que l'on craint encore au Gabon une ouverture trop grande de l'intellectuel gabonais au monde extérieur. L'autarcie intellectuelle devient donc une politique tout indiquée pour le régime Bongo. Or, ne se souvient-on pas que les revendications qui semblent être celles des étudiants gabonais aujourd'hui sont celles-là même que la génération d'étudiants de 1989-1990 faisait déjà à l'époque? Les dix ans qui séparent ces deux générations n'ont donc pas suffi au régime pour résoudre, de façon définitive, les problèmes qui causent le malaise étudiant au Gabon. En termes sociopolitiques, d'autre part, l'accueil paradoxal fait à la réélection de Bongo ne peut se traduire qu'en un seul mot: manque de confiance. En pays démocratiques, le manque de confiance est une notion lourde de sens. Au sein de certains parlements tels le parlement français ou anglais, un vote de censure ou vote de confiance adverse mène inévitablement à la chute du premier ministre, poussant ainsi le pays à la tenue de nouvelles élections législatives ou à la formation d'un nouveau gouvernement. Venant de la rue, dans le cadre d'un pays sans institutions démocratiques comme le Gabon, tout mouvement d'humeur populaire contre le régime en place ne peut être perçu que comme un vote de confiance à l'encontre de ce régime. Le pouvoir en place se doit donc ainsi de tirer les conséquences qui s'imposent face non seulement à un tel rejet populaire, mais aussi face à une gestion désastreuse du pays qui n'a fait qu'empirer. Des dictateurs tels le Suharto indonésien surent au moins avoir le courage d'une telle décision, tandis que d'autres, tels Bongo, n'ont su rien faire d'autre que s'accrocher désespérément au pouvoir, faisant ainsi fi du manque de confiance démontré par le peuple. Ceux qui ont observé l'économie des pays développés savent qu'une économie ne se développe que dans le cadre d'une atmosphère politique et sociale qui inspire confiance aux citoyens et aux hommes d'affaires. C'est ainsi que de grandes places boursières telles Wall Street, Paris ou Tokyo semblent toujours réfléter l'humeur exacte du consommateur et/ou de l'investisseur, devenant ainsi l'instrument idéal de mesure du poul socio-économique. Ce que ces places boursières ont démontré au cours des années est que quand le peuple n'a aucune confiance en la capacité de ses dirigeants à résoudre ses problèmes, l'économie tourne au ralenti et finit toujours par plonger dans une recession intense. Le découragement populaire qui s'ensuit alors est souvent fatal pour l'économie des pays dont les dirigeants s'entêteraient à se maintenir au pouvoir. La seule chose capable de donner un nouveau souffle à l'économie réside, dans ce cas, dans un changement d'équipe susceptible de redonner confiance aux citoyens. Une fois cette confiance retrouvée, tout le pays se remet au travail et l'économie progresse dans le bon sens. La seule différence ici c'est que dans les pays développés, les leaders, par patriotisme, choisissent souvent d'eux-mêmes de s'effacer devant l'intérêt national, alors que nos leaders eux veulent se faire roi à vie. Tel Bongo. A quoi nous exposons-nous donc au Gabon? A une crise sociale perpétuelle qui ne prendra fin qu'avec le départ de Bongo et un changement de régime. L'évidence montre aujourd'hui que chaque année que Bongo passerait au pouvoir au Gabon ne ferait qu'empirer une situation déjà précaire. Déjà, le pays vient de perdre, par une instabilité causée par un régime incapable de répondre aux attentes socio-économiques de ses citoyens, dix années précieuses qui, coiffées de la crise pétrolière qui vient de frapper notre pays de plein fouet, ne peuvent qu'annoncer des temps encore plus durs. Ainsi, si Bongo venait à terminer son mandat actuel, notre pays aura connu, depuis 1989-1990, au moins dix-sept ans d'instabilité dont on ne pourra prédire les conséquences à court, moyen ou long terme. Le Gabon peut-il alors encore se permettre sept ou quatorze années d'immobilisme(s) sous Bongo? Il semble que non car, avec la crise pétrolière qui vient de nous enlever toute capacité de reprise économique, le pays va être confronté à des choix difficiles. Comme l'avait confié un économiste à l'AFP, à chaque fois que le prix du baril baisse d'un dollar, le Gabon perd dramatiquement en revenus: "A chaque fois que le cours du pétrole chute d'un dollar, l'Etat gabonais perd 36 MD de F CFA (360 M de FF)", résume ainsi un économiste tout en précisant "qu'avec un budget primitif 98 établi sur la base d'un baril à 17 USD, des dizaines de milliards se sont envolés et ne rentreront pas dans les caisses de l'Etat" (AFP, 11 décembre 1998). Il suffirait alors dans ce contexte que le dollar américain chute pour que notre pays, dont les ressources pétrolières représentent entre 78 et 83% des revenus d'exportations, tombe dans la banqueroute totale. Or, plutôt que le mouvement opposé, la dépendance du Gabon sur les revenus pétroliers n'a fait que s'accroître ces dernières années. Ainsi, "En 1997, le précieux liquide représentait 41% du produit intérieur brut, contre contre 37% en 1995 et, selon les prévisions initiales, la part du pétrole devait revenir à 38% du PIB. Mais cet objectif sera loin d'être atteint, le baril ayant chuté à moins de onze dollars, entraînant l'économie gabonaise dans le rouge." (AFP, 11 décembre 1998) Et si, en sus de cela, il se produisait une nouvelle dévaluation du Franc CFA comme des rumeurs persistantes avaient semblé indiquer récemment, ce serait une véritable hécatombe pour le pays. Ayant manqué, à l'époque où ses vaches étaient grasses, d'investir dans un après-pétrole dont l'agriculture aurait été la pierre angulaire, le régime, à tous les coups, va être obligé de demander, non seulement un réechelonnement de sa dette par le FMI, la Banque Mondiale et ses autres créanciers, mais aussi de s'endetter davantage pour, au moins soutenir son activité économique de base (payer les salaires, principalement). Cependant, cela risque de ne point être une solution durable car en végétant ainsi grâce aux ressources venues de l'endettement, et en consacrant une partie de ses revenus au service de cette même dette, le pays n'aura aucune capacité d'investir dans des activités économiques capables de soutenir, de l'intérieur, l'activité économique. Déjà, le Gabon n'a pu en 1998 assurer le service de sa dette qui, aujourd'hui, représente 70% du PIB (Produit Intérieur Brut) du pays (AFP, 11 décembre 1998), ce qui, en termes économiques, équivaut à un surendettement dont le pays, à l'allure actuelle, ne pourra se défaire avant au moins cent ans. Et puisque l'épuisement des réserves pétrolières du pays, au rythme de pompage actuel, est prévu pour dans dix ans, il est prévisible que des temps très durs attendent le Gabon à son entrée dans le troisième millénaire. Evidemment, le régime gabonais pourrait être tenté de doubler sa production pétrolière pour contrer les effets de la baisse du prix du baril. Ce serait là une erreur fatale qui réduirait forcément à 5-6 ans de production les réserves du pays, au lieu des dix prévus. Le régime Bongo semble donc aujourd'hui acculé à un cul-de-sac structurel dont il ne voit point l'issue à cause de la lourdeur même du système sur lequel il repose. La conséquence la plus démoralisante de cet échec économique est donc que notre pays sera tout simplement bientôt livré aux enchères publiques internationales et prenable par le plus offrant. En échange de monopoles accordés à des multinationales ou gouvernements étrangers, le Gabon pourra tirer des revenus qui, paradoxalement, en feront plus que jamais la propriété d'organismes, banques ou gouvernements étrangers. Nous ne pouvons nous permettre une telle démarche. Toute solution aux problèmes du pays passe donc par un changement de régime qui, avant que le pays ne s'enlise un peu plus dans une crise politique, sociale, économique et culturelle irrévocable, verrait le départ de Bongo et de son équipe. En d'autres termes, la suppression du système Bongo sera à même de libérer les intelligences dont le pays a besoin pour se reconstruire. Les lourdeurs financières que le régime actuel impose au pays ne peuvent se résorber avec ce même système en place. Tout comme l'on ne pourrait construire un immeuble pyramidal à partir de la structure d'un immeuble rectangulaire, l'on ne peut résoudre les problèmes posés au pays par l'existence continue du système même qui en porte la responsabilité. De même que l'on se doit de détruire de fond en comble un immeuble rectangulaire si le but est d'édifier à sa place un immeuble pyramidal, le système Bongo doit être totalement remis en cause et supprimé pour que puisse s'établir, à sa place, le véritable état de droit que les Gabonais attendent. Cependant, la destruction dont il est question ici comporte à la fois des processus pacifiques et des processus violents. Les solutions pacifiques tournent nécessairement autour du départ volontaire, mais immédiat, de Bongo du pouvoir. Ce départ pourrait se faire constitutionnellement au travers d'une démission en bonne et due forme, ou d'une transformation de notre présidence en présidence symbolique: ces deux voies ont l'avantage de mettre en place des structures qui, pacifiquement, accompagneraient la transition politique du pays vers un nouveau système construit autour de nouvelles compétences débarrassées des lourdeurs de l'ancien régime. Malheureusement, les grèves actuelles semblent annoncer des périodes de trouble qui ne pourront aller qu'en s'accentuant. Face à l'incompétence d'un régime qui ne sait plus par quel pied danser pour faire front à la débâcle économique qui pénalise actuellement notre pays, les troubles actuels risquent de plonger le pays dans un cycle de violence sans précédent que seuls le départ de Bongo et la suppression de son régime pourraient permettre d'arrêter. Que Monsieur Bongo, pour une fois, fasse donc le geste patriotique que les Gabonais attendent de lui, s'il veut éviter à notre pays les violences sociales qui l'attendent au cours des années ou mois à venir. Qu'il sache quitter les choses avant que les choses, elles, ne se décident à le quitter. Le BDP-Gabon Nouveau. |