Le Gabon
entre pétrole et démocratie
Fondé par le président Omar Bongo, le Parti démocratique gabonais (PDG) a
remporté plus des deux tiers des sièges aux élections législatives de décembre 1996.
L'opposition, sur la lancée de ses succès aux élections municipales, à Libreville et
Port-Gentil, croyait pouvoir inquiéter le pouvoir. Elle n'a pu triompher du
"système Bongo", dans ce qui est un des plus petits et des plus riches Etats du
continent et aussi l'un des plus fidèles cliengts de la "Françafrique" à
l'ancienne. Pourtant, le désengagement de Paris pose de nouveaux défis à un pouvoir
affaibli.
PAR STEPHANE ODZAMBOGA, LE MONDE DIPLOMATIQUE, DÉSENGAGEMENT DE LA FRANCE, RÉSEAUX DE
FINANCEMENT OCCULTE, FÉVRIER 1997 - Page 10
Au Gabon, plus de deux décennies de régime de parti unique avaient institutionnalisé
clientélisme et corruption tandis que l'endettement s'alourdissait du coût
d'investissements hasardeux, tel le chemin de fer transgabonais. Peu de voies discordantes
s'élevèrent alors : le pays connaissait une certaine prospérité grâce à la rente
pétrolière, tandis que la presse restait sous contrôle et que les rares opposants
étaient muselés par la police politique et la garde présidentielle, quand ils
n'étaient
pas emprisonnés, exilés ou assassinés, comme Germain Mba en 1971.
Dans la seconde moitié des années 80, la chute des revenus pétroliers et
l'accroissement de la pauvreté stimulent l'opposition au régime, la contestation gagne
la rue. Le président Omar Bongo est contraint de convoquer en janvier 1990 une
conférence nationale qui aboutit à la proclamation du multipartisme. Une façon de
calmer le mécontentement populaire et de respecter les " recommandations " du
sommet franco-africain de La Baule, en juin. L'avancée démocratique concédée par le
président Omar Bongo n'est qu'un simulacre : les dizaines de partis politiques qui se
créent sont financés par l'Etat, l'ancien parti unique conserve la majorité absolue
lors des élections législatives, outrageusement truquées, de 1990, un des dirigeants de
l'opposition, Joseph Renjambe, est mystérieusement assassiné...
Lors de l'élection présidentielle de décembre 1993, le président Omar Bongo est
réélu dans des conditions douteuses au premier tour, devant son principal adversaire, M.
Paul Mba Abessolé, avec 51,18 % des voix. Des manifestations, réprimées par la garde
présidentielle, font de nombreuses victimes. Dans une atmosphère de guerre civile, les
responsables de l'opposition regroupés au sein du Haut Comité de la résistance (HCR) et
les partisans du président Bongo engagent des négociations qui se concluent, en octobre
1994, par la signature des accords dits de Paris. Il s'agit de mettre en place les
instruments juridiques de la transparence : commission nationale, code électoral, etc.,
en vue des futures échéances. Si le président a su tirer parti des contradictions
internes de l'opposition pour se maintenir au pouvoir, il a également profité des
failles d'un système juridique inadapté et d'une administration à sa solde. En 1997, le
jeu démocratique paraît une nouvelle fois bloqué. Certes, le dernier scrutin municipal
dans la capitale s'est soldé, après une première annulation en octobre 1996, par la
victoire de l'opposition. Mais ce succès prend un relief différent à la lumière du
résultat des élections législatives des 15 et 29 décembre 1996. Reportées tout au
long de l'année, en violation des accords de Paris (1), elles ont permis à l'ancien
parti unique de confirmer sa domination dans des conditions de transparence contestables.
Faute d'un improbable consensus et malgré quelques acquis, telle la renaissance d'une
presse libre, les perspectives ne sont guère encourageantes. La version démocratique du
système Bongo, marquée par une insécurité croissante et une incapacité relative à
gérer le pays, a remplacé la version autocratique. Mais pour la population,
démobilisée par les fraudes électorales et perdue dans un paysage politique complexe
où se mêlent ambitions personnelles et rivalités ethniques, la rue apparaît comme le
seul lieu d'expression.
Au-delà des apparences, le pouvoir reste depuis bientôt trente ans concentré entre les
mains du même homme, qui dispose à sa guise de la richesse clef du Gabon : l'or noir.
Premier client et premier fournisseur, la France constitue le principal partenaire
économique d'un pays où vivent plus de 10 000 de ses ressortissants, les entreprises
françaises tirant pleinement profit de la zone franc (2). Aux sociétés de négoce et
d'exploitation forestière héritières des concessions d'antan sont venus s'ajouter les
intérêts miniers : uranium, manganèse et surtout pétrole. Après le premier choc
pétrolier de 1973, les gisements découverts dans les années 50 par l'Erap, ancêtre
d'Elf Aquitaine, vont représenter la première ressource du pays, contribuant, sur la
période 1974-1985, pour plus de 40 % du produit intérieur brut (3). L'épuisement
temporaire des réserves et la chute du prix du baril vont contraindre le pays à traiter
avec le Fonds monétaire international (FMI) en signant le 22 décembre 1986 un
programme d'ajustement structurel.
Au Gabon, comme ailleurs en Afrique noire, la France abandonne progressivement ses
responsabilités économiques aux institutions financières internationales, se résignant
à la dévaluation du franc CFA, à la grande fureur du président Omar Bongo, le pays
étant lourdement tributaire des importations, notamment alimentaires. En revanche, en
vertu d'un accord liant les deux pays, l'armée française dispose toujours d'une base
permanente de 650 hommes à Libreville. Quant à Elf, véritable
Etat dans l'Etat, il continue de jouer un rôle actif, grâce notamment à ses réseaux de
financement occulte (4).
Mais la position privilégiée de la France suscite de multiples convoitises, en
particulier aux Etats-Unis, et le président Bongo a toujours su jouer des rivalités
pétrolières franco-américaines pour faire pression sur Elf ou sur le gouvernement
français. Au début des années 90, les scrupules de Washington à l'égard du
pré-carré français en Afrique se sont évanouis avec l'effondrement de l'empire
soviétique (5). Le retour du multipartisme s'est accompagné de rumeurs sur le soutien
apporté par les Américains à l'opposition. L'organisation du premier sommet
Afrique-Amérique, à Libreville en 1992, a confirmé le regain d'intérêt des
Etats-Unis. Les séjours d'opposants gabonais à Washington, l'attitude circonspecte de
l'ambassade américaine après la réélection controversée du président Bongo en 1993
ou encore l'aide qu'aurait reçue M. Paul Mba Abessolé pour sa station de radio tendent
à indiquer que Washington, par l'intermédiaire de Ron Brown, secrétaire d'Etat au
commerce (décédé en 1995), et de M. George Moose, sous-secrétaire d'Etat aux affaires
africaines, mise résolument sur l'après-Bongo.
En Afrique, " la fiction d'une greffe accélérée de l'Etat-nation s'est effondrée
(6) ". Au Gabon, depuis l'indépendance, le pouvoir central, divisant pour mieux
régner, a multiplié le nombre de circonscriptions administratives, trop élevé au
regard de la démographie du pays. Les ethnies vivent séparées chacune dans leur
province d'origine. Seul l'exode rural a permis de brasser les populations à Libreville,
Port-Gentil et depuis peu Franceville. Même en milieu urbain, les Gabonais se regroupent
par ethnies dans les quartiers pauvres. La relative opulence des années de croissance
pétrolière, l'entrée au gouvernement d'opposants notoires ou la présence dissuasive
des militaires français ont préservé le pays de rivalités ethniques trop violentes.
Mais la construction de la nation gabonaise, à coups de slogans antitribalistes et de
discours sur l' " unité nationale ", n'est qu'un leurre visant à tromper
institutions internationales et gouvernements étrangers, tandis que les postes
ministériels continuent d'être attribués en fonction de considérations ethniques.
Le débat nécessaire sur la place des ethnies dans la nation, supposé dangereux et
subversif, a toujours été repoussé. Les principales ethnies ne perçoivent pas l'Etat
comme un instrument politique au service du développement mais comme un enjeu qui assure
à celle qui est au pouvoir sécurité, richesses et domination. Celle du président est
sur-représentée par rapport à son poids démographique, et les clivages entre partis
politiques s'opèrent essentiellement sur des critères ethniques en dépit
des dénégations des principaux responsables politiques du pays (7). Le Gabon joue
un rôle important en Afrique centrale par la volonté de son président. Sa longue
pratique du pouvoir, les rapports privilégiés qu'il entretient avec la France, son
mariage avec la fille de son ancien homologue congolais Denis Sassou Nguesso sont autant
d'atouts dont M. Omar Bongo sait user avec habileté. Le Gabon finance largement les
organes politiques, économiques ou culturels de la région (Banque des
Etats d'Afrique centrale, Union douanière des Etats d'Afrique centrale [Udeac], Centre
international des civilisations bantoues...). En contrepartie, il exerce des
responsabilités importantes qui lui permettent, malgré sa petite taille et sa population
peu nombreuse, de disputer le leadership au Zaïre et au Cameroun. La participation
gabonaise dans le règlement des conflits angolais et tchadien ainsi que dans la récente
crise congolaise, la réunion des chefs d'Etat de l'Udeac en 1995 et le sommet spécial de
la Banque africaine de développement en 1996, tenus tous deux à Libreville, témoignent
ainsi des prétentions du Gabon à imprimer sa marque à la politique régionale.
Pourtant, cet activisme, marqué par une suite d'initiatives dispersées, apparaît
davantage comme le fruit de la stratégie personnelle du président Bongo que comme le
signe d'un grand dessein collectif, que pourrait effectivement constituer l'intégration
régionale. Un tel objectif, le seul qui vaille pour le Gabon dans la perspective de
l'après-pétrole, paraît pour l'heure inaccessible. Comment, en effet, les dirigeants
d'Afrique centrale à la tête d'Etats fortement centralisés et sans réelle assise
populaire pourraient-ils consentir à pratiquer de larges abandons de souveraineté et
réussir à entraîner l'indispensable adhésion des populations ?
STEPHANE ODZAMBOGA
(1) Lire Jean de Dieu N'Doutoumey, " Les accords de Paris seront-ils respectés ?
", Le Nouvel Afrique-Asie, no 79, avril 1996.
(2) Lire Jean -Baptiste N. Wago, Zone franc : outil de développement ou de domination ?
L'Harmattan, Paris, 1995.
(3) Lire Hugues Alexandre Barro Chambrier, " L'économie du Gabon ", Economica,
Paris, 1990, p. 26.
(4) Lire Pierre Péan, Affaires africaines, Fayard, Paris, 1983. Lire Stephen Smith,
" Jacques Chirac revient au pays d'Elf ", Libé ration, 17 juillet 1996.
(5) Claude Wauthier, " Appétits américains et compromissions françaises ", Le
Monde diplomatique, octobre 1994.
(6) Thierry Michalon, " Légitimité de l'Etat et solidarités ethniques ", Le
Monde diplomatique, novembre 1993.
(7) Lire l'entretien de M. Paul Mba Abessolé in Jeune Afrique du 20 mars 1996.
LE MONDE DIPLOMATIQUE - FÉVRIER 1997 - Page 10
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Economic
Systems in Developing West Africa
After emerging from the colonial rule of France, two West African states with many similar
characteristics experienced economic development decidedly different rates. Economic data
show that Gabon has experienced relatively high levels of growth with respect to the rest
of sub-Saharan Africa, while Congo has declined, which is more representative of the rest
of the African economic experience. We intend to analyze this difference from several
different angles and will attempt to determine what factors or combination of factors
caused this disparity.
Selecting these two countries controls for a number of factors. Both nations were under
[French] colonial rule at the turn of the century. Both populations are predominantly
Bantu-Christian in their backgrounds, and both have many tribal subgroups. Both states
have some similar natural endowments, such as oil, timber, and agricultural products.
Gabon and Congo are neighboring states, being located on the western coast of Africa,
which controls for any differences that might be a result of different geographical
locations.
The criteria by which we will evaluate and compare these two states will be the following:
Post-colonial development: Both African states have experienced different
courses of history since their emancipation from French rule. This section will
concentrate on external influence and political culture. External influence will
concentrate first on what forms influence took. Influence came primarily from the Eastern
and Western blocs during the Cold War. Continuing French presence and involvement in Gabon
ensured the influence of the Western states in Gabon, and Congos single party,
centrally-planned Marxist rule attracted the attention of Eastern powers. It will also
focus on how significant this influence was on economic development. Political culture
will focus on the variations between governmental practices and leadership in
the two nations. Gabon, for example, was partially centrally-planned with a multi-party
system, while Congo was almost completely centrally-planned, and single-party. Tammy Katz
and Matthew Schruers will address the various facets of this section.
Cultural/Social background: Despite the strong religious and tribal
similarities between the two states, there are some notable differences. About 1/6 of the
Gabonese population is composed by some 20,000 French nationals. There are also
indications of differences in education systems and equity, as evidenced by variations in
literacy rates.
Economic factors: This section will analyze the similarities and
differences in balance of trade, investment by powerful Western or Eastern powers, (Gabon
has high levels of foreign investment, Congo does not) foreign exchange, economic policies
and international economic relations (eg. Who are major trading partners?) It will also
consider any decisive factors in agriculture and industry. An example of an issue to be
explored would be the fact that both states began their growth by focusing on natural
endowments exports, and continue to do so, however Gabon has ceased to rely upon oil and
petroleum products, while Congo is still heavily reliant upon oil. Alan Mak will address
this subject.
Pour lire la suite (To read the rest of the article, follow the link to Duke University), allez sur
le site de Duke University.
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