Opinions et Dossiers


Quand les chiffres parlent plus que les mots

Par Dr. Daniel Mengara

Coordinateur, BDP-Gabon Nouveau

29 avril 1999

Ni les Gabonais, ni le régime Bongo ne semblent pas encore vraiment comprendre l'étendu des dégats que la gestion désastreuse de Bongo a causé à notre pays. Ces dégats sont tellements profonds qu'il faudrait, pour les alléger, une forte ascèse que seul un nouveau régime débarrassé des lourdeurs de l'ancien pourrait mettre en oeuvre. Les chiffres ci-dessous sont plus révélateurs que des mots et nous font comprendre pourquoi la Banque Mondiale, le FMI et certains pays occidentaux regardent Bongo avec mépris et refusent d'alléger la dette du Gabon. Ce refus est révélateur car parfaitement justifié si l'on considère le chiffres ci-dessous.

PREMBULE

Comparaison Gabon-Russie

GABON: Dette Gabonaise: 4 milliards de dollars (soit deux mille deux cent (2200) milliards de FCFA) (Reuters, 21 avril 1999)

RUSSIE: Pour alléger ses problèmes actuels, la Russie vient de négocier un emprunt de... 4,5 milliards de dollars (Reuters 28 avril 1999), l'équivalent de la dette gabonaise. Or, la Russie est 146 fois plus peuplée que le Gabon.

COMPARAISONS

Comparaison Revenu PIB (Produit Intérieur Brut) par habitant GABON-CERTAINS PAYS INDUSTRIALISES.

Note: Certains des pays industrialisés ci-dessous sont des pays capables de produire des ordinateurs, des avions, des satellites, ont de grandes universités et ont des grosses industries d'armement et de production, etc. Certains de ces pays comme la Russie, l'Inde et la Chine ont non seulement la bombe et des industrie nucléaires, mais sont de grands exportateurs de technologie et de biens. Comparativement, le Gabon n'a rien de tout cela.

Source: Chiffres tirés du rapport 1998 de la CIA (Online)

PAYS REVENU PAR HABITANT (PIB)

GABON:.............................5000 dollars (1996)

RUSSIE: ............................4 700 dollars (1997)

CHINE...............................3 460 dollars (1997)

INDE................................. 1 600 dollars (1997)

PAKISTAN.......................2 600 dollars (1997)

UKRAINE..........................2 500 dollars (1997)

ROUMANIE .....................5 300 dollars (1997)

SERBIE et MONTENEGRO ........2 280 dollars (1997)

COREE DU NORD...........900 dollars (1997)

LITHUANIE.......................4 230 dollars (1997)

BOLIVIE............................3 000 dollars (1997)

BULGARIE.......................4 100 dollars 1997)

CROATIE..........................4 500 dollars (1997)

EGYPTE............................4 400 dollars (1997)

GEORGIE..........................1 570 dollars (1997)

INDONESIE...................... 4 600 dollars (1997)

JORDANIE.........................4 800 dollars (1997)

PARAGUAY......................3 900 dollars (1997)

PERU..................................4 420 dollars (1997)

CONCLUSION

Tirez vos propres conclusions.

Note: Les chiffres ci-dessus concernent uniquement le PIB. Si l'on considérait le PNB (Produit National Brut) par habitant, le Gabon serait encore mieux classé dans la hiérarchie et dépasserait de loin la plupart des pays d'Europe centrale, d'Amérique du Sud et d'Asie . Par exemple, le PIB par habitant de l'Afrique du Sud est supérieur à celui du Gabon, mais le PNB par habitant du Gabon est supérieur à celui de l'Afrique du Sud. Or, c'est le PNB qui est le plus révélateur de la vraie richesse qui, en réalité, devrait revenir à chaque habitant. Ainsi, le Gabon est le pays le plus riche d'Afrique noire quand on considère son PNB par habitant, mais il demeure néanmoins l'un des plus riches quand on considère son PIB par habitant. Le PNB fera l'objet d'une autre étude.


Niger Troubles Common in Africa

By Tim Sullivan

Associated Press Writer

Saturday, April 17, 1999

NIAMEY, Niger (AP) -- The official portrait of Niger's president still hangs in the hotel lobbies and government offices of this dusty capital city, a lingering reminder of the former coup leader gunned down last week by his own soldiers. Days after the April 9 assassination of President Ibrahim Bare Mainassara, few people in Niamey were angered by the killing of the corrupt, ineffectual ruler, or by the seizure of power by a military junta, which promised a return to civilian rule in nine months. Many were hoping the assassination would bring a clean political slate to Niger, a poverty-wracked nation that straddles the southern edge of the Sahara Desert. ``Someday we'll have democracy, but I'm not sure when,'' said mechanic Sidi Gabrini. ``Niger has suffered too much.'' One year after President Clinton came to Africa predicting a renaissance -- and nearly a decade after journalists and politicians began saying democracy was finally making inroads on the continent -- African politics remain largely mired in questionable elections, wars and coups d'etat. In West and Central Africa alone, the last two years have seen widely disputed elections in Cameroon, Togo, Gabon, Guinea, Mali and Equatorial Guinea and wars in Sierra Leone, Guinea-Bissau, Congo and the Republic of Congo. Just a few years ago, it seemed to be a different story for Niger and much of Africa.

Democracy appeared to be brewing across the continent, with opposition parties legalized, dictators bowing to demands for raucous national conferences and the first signs emerging that Africa's Big Men, the archetypal dictators who came to power and tried to stay for life, might not make it that long. Spurred by the burgeoning democratic movements in Eastern Europe and the collapse of apartheid in South Africa, democracy appeared to be on the verge of blossoming in dozens of African nations. Change came, or appeared to be coming, to many nations; Zambia, Zaire, Republic of Congo, Benin, Cameroon, Mali and others appeared on the verge of significant reform. And change did come to some, with Benin, Zambia, Mali and a handful of other countries casting aside their dictators in the early 1990s. In 1993, Niger voted in its first democratically elected president -- only to see him ousted in the Bare-led coup in 1996 after months of political gridlock. Bare seized power promising a return democracy and civilian rule. Instead, he had himself elected in presidential voting a few months later. It's a practice many African leaders have learned over the past decade -- build the appearance of democracy while blocking real political freedom. Perhaps more than anything else, it's been these phony democracies that have eaten away at the hope for change.

In Cameroon and Gabon, single-party states have given way to myriad opposition groups. But in each country, the long-serving president has stayed in power after widely disputed elections. With their vast financial resources, enormous political machines, support of the military -- and often of the media and electoral commissions as well -- they have all the power to quash potential opponents. If overwhelming strength doesn't work, opposition leaders say, ballot-rigging is frequently the answer. Often, the opposition feels its only real choice is to boycott the vote, hoping for at least a symbolic victory. Such was the case last year in Cameroon, where President Paul Biya -- who had already ruled for 15 years -- won again. Despite such problems, there are bright spots on the continent. Ghana and Benin have both held solidly to democracy while Nigeria -- the giant of Africa, with some 110 million inhabitants -- appears to be moving firmly toward civilian rule next month. In southern Africa, democracy is increasingly entrenched in Botswana, Mozambique and South Africa. But the predicted African renaissance has fallen by the wayside, lost in a morass of war, phony elections, and lust for power.

© Copyright 1999 The Associated Press


"La Griffe", Bongo et le Gabon: jusqu'où ira la dictature bongolienne?

(BDP-Gabon Nouveau - 20 mars 1999) En interdisant une nouvelle fois, ô scandale notoire, la parution de l'hebdomadaire satirique gabonais "La Griffe", le régime d'Omar Bongo a plus que jamais confirmé son retour programmé à une dictature pure et dure, comme au bon vieux temps du monopartisme qui a marqué les trente et une dernière années de notre pays.

Les signes du retour à la dicature sont plus qu'évidents quand on regarde la parcours pré-électoral et post-électoral de Bongo:

Préparation à la guerre

Avant les élections du 6 décembre 1998 dernier, des sources dignes de foi confirment l'achat d'armes par le régime Bongo qui, dit-on, se préparait à la guerre s'il venait à perdre les élections. En effet, selon la Lettre du Continent No. 317 du 19 novembre 1998, un sondage de l'INAFRES (Institut Africain de Futurologie et de Recherche économique et sociale) commandité par le pouvoir et réalisé entre le 20 juin et le 19 juillet donnait Bongo perdant sur toute la ligne, le situant à des niveaux ridicules (4,5% à Libreville, 2-3% à Oyem, 3% à Tchibanga, etc.) qui ne laissaient rien présager de bon pour le candidat Omar Bongo. Confronté à un tel rejet, Omar se prépara à conserver le pouvoir par tous les moyens possibles. Son plan: il n'accepterait pas d'abdiquer le pouvoir s'il perdait les élections. Dans ce contexte, Bongo s'attendrait à un soulèvement généralisé dans le pays qui n'excluerait pas la formation par quelque opposant d'une armée de rébellion. Pour parer à toute éventualité, l'achat d'armes diverses était destiné à renforcer le dispositif militaire de la garde présidentielle qui, par ailleurs, était assurée d'être appuyée par des unités venues du Congo de Sassou et de quelques troupes françaises qui opéreraient en soutien. Evidemment, ce sont les ministres et conseillers de Bongo, notamment Mboumbou Miyakou et Ntoutoume Emane, qui "sauvèrent" le Gabon de la guerre civile en faisant gagner le candidat Bongo par la fraude électorale systématique et massive. La Lettre du Continent n°318 du 03/12/98 confirme l'état de fébrilité militaire qui animait le régime Bongo peu avant les élections présidentielles du 6 décembre dernier.

Bâillonnement des oppositions et des médias

Outre la corruption directe des opposants dans son désir de s'offrir une opposition de façade, Bongo entreprit également de resserrer son étau de répression sur les médias de l'opposition. Après la "Griffe" interdite de publication quelques mois auparavant, c'est l'émission Feed-Back de Radio-Soleil qui, le 7 décembre 1998, soit un jour après l'élection présidentielle, est frappée d'un avertissement du CNC accompagné du brouillage des émissions de Radio Liberté. En mars 1999, le CNC récidive et l'émission Feed-Back est censurée: l'animateur de Feed-Back ne peut plus concevoir d'émission "phone-in" car le pouvoir n'aime pas qu'on le critique en direct sur la radio. Mais ce n'est pas tout: à peine rétabli dans ses droits le 5 mars dernier, "La Griffe" est de nouveau interdite de parution le 18 mars 1999.

Assauts militaires sur les manifestations étudiantes

A peine réélu le 6 décembre dernier, le régime de Bongo fut secoué par une vague de manifestations syndicales et estudiantines qu'il mata par la violence policière, blessant et torturant grièvement plusieurs étudiants.

La monarchisation du pouvoir au Gabon

Dans le but de parer à toute éventualité, Bongo entreprit, par Ntoutoume Emane interposé, de se doter d'un gouvernement ridiculement formé parce que tribaliste, gouvernement dont la tâche est de préserver à tout prix les acquis du système Bongo. Ainsi, en nommant son fils au ministère clé de la défense, Bongo assure la survie de son régime qui, en cas de coup dur ou de mort prématurée de Bongo, pourrait voir Ali Ben Bongo se hisser automatiquement à la présidence du pays. Il lui suffirait tout simplement de se servir de la Garde présidentielle comme outil de conquête du pouvoir. C'est ce que confirmait La Lettre du Continent No. 324 du 4 mars 1999. En effet, ce organe d'information révélait que, dans le cadre des calculs autocratiques de Bongo, un constitutionnaliste français avait été chargé d'étudier une révision de la Constitution (Une nouvelle révision après celle qui avait déjà, en 1997, ramené le mandat présidentiel à 7 ans au lieu des cinq décidés par la Conférence Nationale) qui se rapprocherait du modèle ivoirien. Dans ce modèle, en cas de vacance du pouvoir, ce n'est pas le président de l'Assemblée Nationale qui assure l'intérim, mais plutôt un Conseil national de sécurité qui se chargerait d'assurer directement la "gérance" des "affaires". Comme par hasard, ce modèle prévoit que le Ministre de la défense serait l'un des "gérants" clé d'une telle structure. Et comme par hasard, le Ministre de la défense du Gabon aujourd'hui est... Ali Ben Bongo.

Les signes du retour programmé du Gabon à une dictature pure et dure sont donc déjà là. Il s'agit pour Bongo non seulement de faire taire l'opposition et ses médias par tous les moyens possibles, mais aussi de pérénniser son système en le monarchisant. Son but semble être aujourd'hui de doter le Gabon d'un système quasi monarchique qui verra s'établir dans le pays la Dynastie Bongo. Ainsi, le pouvoir au Gabon se confinerait éternellement dans les mains de la même famille qui, de père en fils, puis de fils en grand-fils, dirigerait le Gabon sans partage. Or, cela ne pourrait se faire que dans le cadre d'une dictature forte et répressive. Les mois qui viennent vont donc être chauds pour le Gabon. Confronté à des ressources qui s'épuisent chaque jour (aujourd'hui l'uranium, le pétrôle dans 8-10 ans), le Gabon est plus que jamais une bombe à retardement qui risque d'exploser très bientôt. Malheureusement, Bongo et son régime ne semblent faire montre d'aucune capacité de gestion susceptible de redresser la situation socio-économique du Gabon

La question qui se pose alors est la suivante: puisque Bongo est prêt à aller jusqu'au bout pour asseoir son pouvoir autocrato-monarchique sur le Gabon, jusqu'où ira la patience des Gabonais?

Eveillons-nous, Gabon!

BDP-Gabon Nouveau
20 mars 1999


Air Gabon: symbole de la décadence du régime Bongo

BDP-Gabon Nouveau, 8 mars 1999

 S'il y a une compagnie au Gabon qui symbolise bien la gestion désastreuse que le régime Bongo a fait du Gabon au cours des trois dernières décennies, c'est bien Air Gabon. En effet, Air Gabon est une compagnie qui n'a pu assurer son existence que par un renflouement permanent par l'état de ses caisses vides, ou par les diverses prises en charge tentées par Air France. Cependant, ni l'argent versé dans les caisses de la compagnie moribonde, ni les tentatives de reprise vite abandonnées d'Air France n'ont suffi à remettre sur pied cette compagnie qui, à l'époque glorieuse du plein-pétrole et du dollar dopé, faisait la fierté de plus d'un Gabonais et l'envie de nos voisins démunis.

Les diverses tentatives de sauvetage n'ont rien donné pour une raison très simple: elles se sont toutes heurtées à la corruption malsaine de... l'état Bongo. Pourquoi? Parce que l'état Bongo ne semble pas comprendre qu'une compagnie d'état a le droit, comme toute autre compagnie, de faire du profit. L'agressivité et la santé internationale démontrées par des compagnies publiques ou para-publiques comme Air France, Sabena ou British Airways ne leur vient pas de l'argent qu'elles reçoivent de l'état, mais plutôt des profits qu'elles font dans le cadre de la concurrence internationale. Dans ce contexte, la rentabilité compte énormément.

Ainsi, ce qui distingue une compagnie aérienne publique d'une compagnie aérienne privée dans les pays qui savent ce que c'est que le business ne se trouve point dans l'esprit de compétition qui les anime: à ce niveau, elles fonctionnent de la même manière. Par contre, ce qui les différencie se trouve dans le fait que l'état peut, EN CAS DE NECESSITE, se porter au secours d'une entreprise à caractère public si celle-ci se trouve dans des difficultés conjoncturelles causées par un contexte économique difficile (concurrence trop rude, crises économiques internationales, etc.). Ce qui intéresse l'état moderne dans ce type d'entreprise à caractère public, c'est la capacité à générer de l'emploi dont peuvent faire montre de telles entreprises. Voilà pourquoi certains états gardent souvent des parts importantes dans de telles entreprises car leur but est d'avoir à leur disposition des structures compétitives capables d'absorber la main-d'oeuvre afin de réduire le chômage. Cependant, cette génération d'emplois ne peut être faite artificiellement. Il faut à l'entreprise subventionnée fonctionner structuralement et infrastructurellement comme une entreprise privée sur le marché national et/ou international afin de faire du profit. La loi du profit, pour une entreprise à caractère public, est donc de faire des bénéfices qui lui permettraient de grossir. Et ce n'est qu'en grandissant compétitivement qu'elle emploiera plus de main d'oeuvre, réduisant donc ainsi le taux de chômage et de pauvreté dans le pays.

Le subventionnement d'une entreprise par l'état n'est donc pas synonyme de versement à perte de revenus, mais plutôt l'équivalent d'une action sociale indirecte entreprise par l'état dans le cadre de sa politique de l'emploi. Certes, des compagnies nationales telles Air Gabon visent aussi à assurer le service dans un domaine que l'on ne voudrait pas voir contrôlé par des intérêts privés ou étrangers, mais ce service rendu à la nation par la présence d'une entreprise étatique ne veut pas dire un fonctionnement à perte de l'entreprise. Au contraire, il faut à l'entreprise une capacité de survie propre qui doit répondre aux contraintes compétitives du marché national et/ou international.

Au Gabon, la philosophie bongolienne semble avoir été de définir une entreprise d'état comme un service à perte au service du seul régime Bongo. Air Gabon, OCTRA, Sotravil, et j'en passe, sont des entreprises qui ont toutes fonctionné sur le même modèle. L'on sait le résultat qui a salué leur activité: banqueroute totale. Air Gabon est aujourd'hui sur la même voie.

Air Gabon se meurt, non pas parce que la compagnie est mal gérée de l'intérieur, loin s'en faut. Au contraire, il est même admirable qu'elle ait survécu jusqu'à présent. Air Gabon se meurt parce que c'est l'état Bongo qui l'asphixie économiquement. De quelle manière Bongo tue-t-il Air Gabon?

1) Les fils à papa et les sbires du régime Bongo

Toute le monde le sait: Air Gabon ne réalise pas de bénéfices. Cette situation prévaut parce que, comme il le fait avec les caisses de l'état, le régime Bongo considère Air Gabon comme une entreprise personnelle au service non pas du Gabon, mais du régime en place. Il arrive, pendant certains étés, périodes où le traffic international est intense, mais aussi très rude de par la compétition qui y sévit, qu'Air Gabon ne voyage qu'avec 10-20% de passagers réels, le reste (80%) étant occupé par des dignitaires du régime et leur progéniture voyageant gratuitement "au compte de l'état", même pour des voyages privés. Pour le régime Bongo, ceci est devenu une culture. Quand la femme ou la fille d'un ministre veut aller faire ses courses à Paris, il lui suffit de prendre le téléphone et d'appeler Air Gabon. Il obtient un billet automatiquement qui est aussitôt facturé à l'état. La petite amie de tel ministre veut aller aux USA passer quelques jours auprès de son frère qui y étudie? Pas de problème, Air Gabon est là. Au bout du compte, bien que toujours rempli de passagers, Air Gabon navigue en fait à vide car les passagers transportés sont des passagers fantômes qui n'ont pas payé leur billet. Ils voyagent "au compte de l'état".

2) Le non-paiement des factures de l'état.

Puis vient ensuite l'état Bongo. Cet état qui utilise les services de l'état ne sait jamais régler les factures de l'état. Mauvais payeur, l'état Bongo suce les caisses du pays, mais ne paie jamais les factures dues aux compagnies d'état. "Après tout, tout ça c'est l'état non?" vous répondront souvent des gens hauts placés. Telle est la logique du régime Bongo.

En attendant, l'état se meurt et les entreprises qui comptent sur l'argent que l'état leur doit se meurent également. Résultat: chômage pour le peuple et banqueroute pour les entreprises. Tout cela à cause de l'état Bongo qui n'arrive pas à voir que l'économie c'est comme une voiture. Pour qu'elle fonctionne proprement, toutes les parties de la voiture, de la roue aux freins et des freins au moteur, etc. doivent s'accorder avec la précision d'une minuterie. En plus, parce que la voiture a besoin d'huile et d'essence, il faut de temps en temps penser à en mettre, par peur d'une panne sèche qui pourrait s'avérer fatale pour tout le système. Au Gabon, l'on se contente de rouler jusqu'à la panne sèche qui détruira le moteur. Il est alors trop tard pour entreprendre quelque action que ce soit, à moins de dépenser encore plus d'argent à réparer une panne que l'on aurait pu éviter par la prévention.

Air Gabon subit donc de plein fouet les conséquences désastreuses de la gestion Bongo. Quant on sait combien de personnes voyagent sur Air Gabon sous le couvert de l'état au Gabon, l'on comprend le calvaire de cett compagnie et sa décadence économique. Qui voyage sur Air Gabon aux frais de l'état?

  • 1) Les ministres et autres dignitaires du régime
  • 2) les enfants, femmes, familles (élargies) et petites amies des dignitaires du régime
  • 3) les divers administrateurs et autres hauts fonctionnaires relevant de l'état
  • 4) Les parlementaires et leurs familles
  • 5) Les étudiants gabonais pendant les vacances (nationalement et internationalement)
  • 6) Les employés d'Air Gabon ainsi que les familles entières des cadres dirigeants de la compagnie.
  • 7) Les évacués sanitaires
  • 8) Les poules et les cabris des.... (non, là nous blaguons)

En gros, des milliers et des milliers de voyageurs qui auraient pu pour certains payer leur propre billet et pour d'autres bénéficier, quand ils le méritent (étudiants par exemple), de billets subventionnés que l'état devrait régler IMMEDIATEMENT à Air Gabon. Or, ce sont ces mêmes personnes qui ont la capacité de payer, de leur propre poche, les billets avec lesquels ils voyagent qui continuent à bénéficier des largesses du pouvoir et de l'état Bongo.

Le système Bongo est tellement inefficace et corrompu dans sa gestion du pays qu'il empoisonne la vie de toute la structure économique du pays. Or, la réalité est que l'état devrait, dans tous les domaines, avoir des seuils salariaux au-delà desquels les faveurs de l'état seraient refusées aux prétendants. Cela vaut également pour les bourses accordées aux enfants des dignitaires du régime. Pourquoi faudrait-il que l'état continue à perdre des revenus alors que ces messieurs et dames pourraient eux-mêmes s'acheter des billets pour leurs affaires personnelles ou payer les études de leurs enfants à l'étranger vu qu'ils négligent de les voir étudier à l'UOB? En fait, ne touchent-ils pas, par ces moyens indirects, des salaires doubles ou triples qui, au bout du compte, font que l'état doit non seulement leur payer des millions en salaires, mais aussi leur donner des millions en bourses, billets d'avion et faveurs diverses?

Un seuil salarial et une rigueur qui ne donnerait de billet subventionnés qu'aux nécessiteux (qui se limiteraient aux étudiants, évacués sanitaires, et aux agents de l'état en mission HONNETEMENT officielle) permettraient ainsi à Air Gabon de récupérer naturellement de l'argent dans le cadre d'une clientèle normale et de recevoir les revenus qui lui sont dus par l'état. Notons également au passage que de bonnes routes (bitumées) sur toute l'étendue du territoire favoriseraient le tranport terrestre, évitant ainsi à Air Gabon les déboires de factures impayées par l'état.

L'avantage d'un système de gestion responsable et assaini de l'économie gabonaise dans sa globalité est que l'état retrouverait immédiatement une énorme solvabilité. Dans le cadre de celle-ci, tous ceux qui sont capables de payer paieraient, l'état honoreraient ses dettes et des compagnies à caractère public ou parapublic comme Air Gabon fleuriraient, créant au passage des emplois dont le Gabon a vivement besoin aujourd'hui avec ses 20% de chômage tristement affichés et des entreprises publiques ou privées qui périclitent au jour le jour (Evidemment, il faudrait que l'économie entière tourne bien sur le plan interne, que le tourisme international et national se développe et qu'une direction responsable de la structure économique du pays soit mise en place pour que des compagnies comme Air Gabon puisse redémarrer).

Malheureusement, la conséquence fâcheuse de la ruine que cause l'état à la compagnie aérienne nationale est qu'Air Gabon est obligé de pratiquer des prix impossibles pour survivre. Or, avec des prix aussi élevés, personne n'achète les billets Air Gabon. A titre de comparaison, là où, en période creuse, Royal Air Maroc vend des billets à 700 dollars US (350.000CFA) pour un trajet Libreville-New York, Air Gabon exige 2000 dollars (1 million de CFA) que ni le Gabonais moyen, ni le touriste étranger qui tient à tout prix à faire des économies ne seraient prêts à débourser. Toute la recette va donc dans les caisses de compagnies étrangères concurrentes telles Sabena, Air France, Royal Air Maroc, etc. Le coût élevé des billets d'Air Gabon demeure aussi très inaccessible pour le Gabonais moyen qui aimerait bien sortir du pays et faire du tourisme international. Or, c'est là une clientèle dont Air Gabon aurait pu se servir pour se consolider et se placer sur le plan international comme la compagnie préférée des Gabonais qui ont assez d'argent pour voyager. Dans le contexte actuel, le maître d'école ou le militaire Gabonais n'a aucun espoir de jamais voir la France ou l'Amérique vu le salaire miséreux avec lequel il survit et le coût élevé de la vie au Gabon.

Au rythme où vont les choses, la situation d'Air Gabon ne semble pas reluisante. Sa chute annoncée est donc à l'image du pays. Aucun remède valable ne peut y être apporté tant que le système Bongo sera en place et contunuera à asphixier l'état et toutes les entreprises qui en dépendent ou font des affaires avec l'état Bongo. Les mesures de redressement économique recommandées par les organismes internationaux se sont toutes, comme Air France avec ses tentatives de reprise d'Air Gabon, soldées par des échecs répétés qui n'ont d'autres sources que les malversations du régime Bongo et la culture assassine de progrès économique que ce régime a mise en place au cours de 31 ans de politiques désastreuses sous Bongo.

Mai là encore, faut-il vraiment s'étonner du sort d'Air Gabon? N'est-il pas normal que l'on retrouve dans un état décadent des entreprises décadentes?

Ô Gabon, éveille-toi.

BDP-Gabon Nouveau


"Abandonner la politique? J’y ai songé, mais..."

Paul Mba Abessole: Président du Rassemblement national des bûcherons (RNB) et maire de Librevile.

Opposant historique à Omar Bongo et maire de Libreville, le père Paul Mba Abessole, avec 13 % des voix, n’est arrivé qu’en troisième position à l’élection présidentielle du 6 décembre, derrière le président Omar Bongo, mais aussi Pierre Mamboundou, le leader du Haut Conseil de la Résistance (HCR). Depuis le scrutin, il ne s’est pratiquement pas exprimé dans les médias, mais a fait une exception pour J.A.

Propos recueillis par MARC PERELMAN
Jeune Afrique du 16 au 22 février 1999

JEUNE AFRIQUE: Vous êtes resté très silencieux depuis l’élection du 6 décembre. Quelle réflexion vous inspire-t-elle aujourd’hui?

PAUL MBA ABESSOLE: Il n’y a pas eu d’élection au Gabon. J’avais dit sur tous les tons que le pouvoir était incapable d’organiser la consultation dans la transparence, mais personne ne m’a écouté... On ne peut pas demander à un enfant de sixième de résoudre une équation d’un niveau de terminale. Mais aujourd’hui, je ne veux plus en parler.

Qu’allez-vous faire désormais?

Ma priorité, c’est la mairie. Je vais tenter d’y faire tout ce qui pourra l’être, si on m’en laisse la possibilité. Après, on verra.

Pensez-vous être désormais en mesure d’accomplir pleinement votre travail de maire?

J’ai rencontré le président Bongo à deux reprises, au début du mois de janvier. Nous avons décidé, conformément à la loi, de transférer à la mairie les fonds provenant de la collecte des ordures ménagères, soit 3,3 millions de F CFA. J’ai également obtenu le départ du secrétariat général de la mairie de Chris Kombila, un membre du comité directeur du PDG (le parti au pouvoir), et son remplacement par Laurent Minko-Bengone, l’un de mes proches. Et nous allons avoir des policiers municipaux sous nos ordres.

L’élection passée, la cohabitation entre la mairie et le « palais du Bord de mer w sera-t-elle plus facile?

Que ce soit bien clair je n’ai rien demandé d’autre au pouvoir que d’appliquer la loi. Le budget de la mairie, je ne le réclame pas comme un cadeau, mais comme un droit, celui de percevoir les taxes qui nous sont dues.

Si on vous le proposait, accepteriez-vous d’entrer au gouvernement?

Depuis 1990, le RNB répète qu’il ne souhaite pas participer à un gouvernement d’union nationale.

Envisagez-vous de collaborer avec Pierre Mamboundou?

Arrivé deuxième à l’élection, il devient le leader de l’opposition. C’est donc à lui de tendre la main à l’honorable troisième que je suis. Je suis prêt à m’entendre avec tout le monde à partir du moment où il existe, disons, 60 % de points communs. À lui de voir...

La campagne a été plus calme que les précédentes. Craignez-vous néanmoins des troubles, dans les mois à venir?

Si la paix civile règne au Gabon. c’est grâce à l’opposition. Regardez ailleurs: ce sont les opposants qui ont pris les armes! Mais rappelez-vous en 1993, des incidents ont eu lieu plusieurs mois après le scrutin. J’espère que cela ne se reproduira pas.

Vos rapports avec Omar Bongo ont-Ils changé?

M. Bongo n’est pas mon ennemi, c’est un compatriote. Nous sommes dans le même bateau, et n’avons pas intérêt à faire le coup de poing. Quand nous nous rencontrons en tête à tête, ce que j’évite au maximum de faire pour que les gens n’aillent pas raconter n’importe quoi, l’entretien est toujours très courtois. Il me dit souvent: "Toi et moi, on est les modèles du pays. Nous sommes continuellement traînés dans la boue par la presse et nous ne portons jamais plainte contre personne. "Et c’est vrai : ce qu’on a écrit sur M. Bongo et sur moi est absolument inimaginable! Mais je maintiens que lui demander d’instaurer la démocratie et un État de droit, c’est lui demander l’impossible.

Avez-vous songé à vous retirer définitivement de la politique?

Vous savez, on dit que Mba Abessole est sur le déclin depuis 1989... Arrêter mon combat? Je l’ai envisagé. Mais je ne suis ni désabusé ni découragé. Il faut continuer la route.

Songez-vous à passer la main?

Quand je suis entré en politique, je n’avais pas l’intention d’y rester aussi longtemps. Quand on dirige un parti, on ne peut pas dire « je vais passer la main ", ce serait prendre le risque d’aiguiser des ambitions néfastes. Mais passer la main est une chose à laquelle tout être normalement constitué doit penser en permanence. Et, en effet, j’y pense. Si j’arrive un jour au pouvoir. ce sera bien. Mais si c’est quelqu’un qui se réclame de mon école de pensée qui y parvient, dans deux ou trois ans, tant mieux !