Journaux Gabonais: nouvelles sur les méfaits de Bongo

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Emile Doumba Privatise l'Administration publique

Misamu , 31/05/1999, F. BOUNDA

On l’attendait sous un autre angle, c’est finalement sous celui d’une privatisation de l’administration publique qu’est apparu l’actuel et nouveau ministre de l’Economie et des Finances. Et si «chambardement» il y a eu, comme l’avait titré notre confrère le quotidien l’union, c’est plutôt dans le sens d’une mise en coupes sombres des services publics de l’Etat par les lobbies pétroliers et autres du patronat néocolonial gabonais que ledit chambardement s’est fait au même niveau du ministère de l’Economie et des Finances. Une véritable mainmise du privé sur l’Etat qui ne dit pas son nom.

Pas de surprise.

Nous sommes les derniers en être surpris. Dans une de nos éditions (Misamu n° 175 du 7 avril 1999), et à propos des réformes et des changements envisagés par le tout nouveau responsable du département de l’Economie et des Finances, nous écrivions : «Décidés à asseoir les bases de la bonne gouvernance et de la transparence financière au Gabon afin de se conformer aux vœux exprimés par le chef de l’Etat dans sa “Lettre de cadrage” au Premier ministre Jean François Ntoutoume-Emane, et afin de bénéficier d’un minimum de crédit auprès des bailleurs de fonds internationaux, il (Emile Doumba) envisage de faire un vrai toilettage au département de l’Economie et des Finances» Puis, toujours dans le même article, nous révélions ce qui suit: «devant le blocage, la mauvaise foi et l’emprise des réseauux sur les leviers de commande du ministère, il a trouvé une solution qui fait trembler : faire venir de l’extérieur, notamment du secteur privé, comme gage au Fonds monétaire international et au patronat gabonais, des cadres intègres, spécialistes en matière de finance».

Nous ne nous sommes donc pas trompés dans ces analyses prévisionnelles. La publication des nominations intervenues lors du dernier conseil de ministres au niveau du département de l’Economie et des Finances vient de nous donner raison. Désormais, les services stratégiques de l’administration de l’Economie et des Finances publiques gabonaises sont verrouillés par des hommes «intègres», venant du secteur privé, secteur lui-même entièrement contrôlé par un patronat expatrié. Etait-ce cela le passage obligé pour la «bonne gouvernance» et la «transparence financière»? Pas si sûr, quand on sait qu’au sommet de la hiérarchie, des indéboulonnables ont échappé à la «purge». A la Direction générale du Budget, à la Trésorerie générale, au Secrétariat général du ministère, aux domaines et aux contributions directes, seuls les subalternes ont été sacrifiés. Seule la direction générale des douanes constitue l’exception qui justifie la règle. Est-ce à dire donc que le «poisson» économie et finances gabonaises avait commencé à pourrir par le corps et non par la tête ? Le train de vie ostentatoire de certains potentats ayant échappé à la «purge» ne permet pas de l’affirmer. Que de somptueuses villas ! Que de dépenses faramineuses ! Que de limousines et autres voitures de luxe ! L’un d’entre eux, le plus fortuné, celui qui garde les cordons de la bourse de l’Etat, s’est acquis plus d’une quarantaine de mini-bus privés pour convoyer séminaristes et autres conférenciers en séjour au Gabon. Tout ceci a échappé à l’œil vigilant d’Emile Doumba, ou alors il l’aurait tout simplement fermé. Du coup, loin de casser la baraque comme d’aucuns l’avaient naïvement cru, ce dernier a plutôt colmaté les brèches pour que l’édifice puisse encore tenir le coup pendant un moment qui risque d’ailleurs d’être court.

Le public livré au privé.

En revanche, un regard beaucoup plus attentif sur les changements effectués révéle qu’Emile Doumba, banquier de son état, très lié aux milieux et autres lobbies politico-affairistes de la haute finance internationale vient de livrer, sans que personne n’y prenne garde, l’administration publique gabonaise aux intérêts privés, notamment étrangers. Une très grande confusion totale risque donc de s’installer entre la gestion des biens publics appartenant à l’ensemble des Gabonais et ces intérêts privés étrangers. Ce, d’autant plus qu’il est dit que les cadres gabonais nouvellement promus resteront attachés à leurs entreprises respectives tout en gérant les services publics de l’Etat. Une telle disposition est-elle conforme au statut qui régit la Fonction publique gabonaise ? Quel sera le comportement de ces cadres qui continueront à obéir aux injonctions de leurs employeurs du privé, quand ils viendront à traiter des dossiers engageant leurs entreprises respectives et l’Etat gabonais ? Quelle sera la frontière entre le domaine exclusivement privé (Elf, Shell, Bicig, etc.) et le domaine public lorsque le directeur général délégué d’Elf-Gabon est en même temps, même à titre de consultant, chargé du «reengeneering de l’économie et de l’alignement stratégique auprès du Ministre de l’Economie, des Finances, du Budget, chargé de la Privatisation» ? Ou lorsqu’un ex-directeur de la Bicig, restant toujours lié à sa banque devient «directeur de la Programmation des Ressources et Règlements» ? Ou encore quand un autre ex-directeur des finances et du budget à la Bicig est chargé de l’optimisation de la dépense publique ? Etc. A toutes ces interrogations, point de réponses encore. Mais une chose est sûre, il va y avoir confusion entre les intérêts privés et publics, les premiers risquant de l’emporter sur les seconds. Lorsqu’il y aura appel d’offres, ces cadres ne seront-ils pas juge et partie ? Que de délits d’initié en perspective!

Les limites et la logique des réformes d’Emile Doumba

Les réformes que tentent d’entreprendre l’actuel patron du département de l’Economie et des Finances et sur lesquelles beaucoup ont glosé commencent à montrer leurs limites. Les quelques remplacements faits obéissent à la logique du partage ethnique du pouvoir. L’organigramme reste le même, avec une pléthore de conseillers en tous genres, de secrétaires particulières, d’agents de sécurité et de chauffeurs particuliers. Tous ceux qui ont cru à une éventuelle réduction du train de vie de l’Etat en ont eu pour leurs comptes. Ne dit-on pas que «la charité bien ordonnée commence par soi-même» ? Les grosses cylindrées immatriculées 151 continuent à sillonner de jour comme de nuit les rues, ruelles et autres sentiers boueux de Libreville, quand elles ne font pas le transport clandestin sur la route de Kango. Et la logique qui consiste à faire appel au privé est on ne peut plus étonnante. Depuis les années 60, l’Etat gabonais forme des cadres de haut niveau et compétents dans des domaines divers : économie, fiscalité, finances, douane, domaine, etc. Tous ces cadres fonctionnaires sont-ils atteints du virus de la corruption au point qu’ils soient tous disqualifiés pour assainir les finances publiques ? Cela nous paraît invraisemblable. La réalité est qu’après avoir bradé les entreprises para-publiques sur recommandations des bailleurs de fonds internationaux, voilà que l’Etat gabonais, sur injonctions des lobbies pétroliers et autres groupes de pression au patronat gabonais, il a décidé de livrer ces services publics à ces intérêts privés. Le reste n’est que du vent.


Retour du Président : Rien qu'une Pilule Amère dans sa Gibecière

F. BOUNDA, 17/05/1999

Les Gabonais n’ont pas eu le temps de chanter comme le font les enfants pour saluer le retour de leur maman à la maison : «Maman est venue, chocolat et bonbons!» Toutes ces rencontres outre-atlantique et outre-méditerrannée avaient pourtant suscité en eux un grand espoir. Michel Camdessus du F.M.I., James Wolfensohn de la Banque mondiale et autres décideurs des institutions de Bretton Woods, industriels et autres hommes d’affaires américains et français, tout ce beau monde ne pouvait laisser le président Bongo rentrer au bercail la gibecière vide. Il y avait donc du «blé» dans l’air. Cet espoir était de plus en plus entretenu par les rumeurs à propos d’un mystérieux vol de la Compagnie nationale Swissair, le jeudi 22 avril dernier. C’est quand même dans les banques suisses que gisent les colossales sommes d’argent amassées sur le dos du peuple gabonais. Leur rapatriement ne peut donc pas être considéré comme un acte courageux et patriotique.
Les doigts croisés, les Gabonais attendaient donc beaucoup du long périple américano-européen de leur président, confiants que les relations très étroites que ce dernier a eu à tisser en quarante ans de pouvoir avec les milieux politico-affairistes mondiaux, tous ces lobbies et tous ces cercles occultes de la haute finance internationale ne pouvaient le laisser rentrer bredouille au Gabon.
Les premières inquiétudes ont été nourries par des nouvelles alarmantes qui leur parvenaient des Etats-Unis d’Amérique et du Canada. Là-bas, au pays de l’oncle Sam et chez son voisin du Nord, il leur parvenait que les portails se sont fermés au nez et à la barbe du président gabonais. Il a dû user de son talent d’homme politique rusé pour que certaines portes lui soient ouvertes. Et ceux qui lui en ont ouvert quelques unes n’ont pas été tendres avec leur hôte de marque. La tendance était plutôt à lui remonter les bretelles. C’est ce que traduit par un épheumisme cette phrase d’un confrère qui accompagnait le président Bongo tout au long de son périple : «Omar Bongo a écouté les réserves émises par les experts de ces vénérables institutions sur les véritables efforts investis dans son pays». Et, «en toute franchise, ont insisté les “Nganga” de l’économie mondiale, les montants colossaux affectés dans un secteur tel que l’éducation nationale, pour ne citer que cet exemple, se sont avérés décevants pour ne pas dire stériles». Et le même confrère de préciser : «Il a donc fallu à Omar Bongo faire appel à tout son talent de négociateur séduisant pour convaincre ses interlocuteurs qu’il a donné des directives à son Premier ministre, M. Jean François Ntoutoume-Emane, pour assainir les finances publiques nationales…». Ce n’est qu’après ce baratin, semble-t-il, et selon le confrère, «qu’il y a désormais un léger mieux» entre la partie gabonaise et les institutions de Bretton Woods. C’est juste ce «léger mieux» que le président gabonais a ramené dans sa gibecière en attendant l’aboutissement d’un accord «salvateur» pour l’économie gabonaise avec les institutions sus-mentionnées.
Pour le moment, les Gabonais doivent donc se contenter de ce «léger mieux» tout en continuant à vivre les affres et les vicissitudes d’une récession économique sans précédent. Du coup, depuis l’aéroport international Léon Mba, l’heure n’était pas à l’euphorie et à la liesse. Le ton et le timbre du président Bongo sont même devenus menaçants et inquiétants. Il s’en est pris à tous ceux qui, dans le pays, fomentent des grèves et font des revendications catégorielles. Une bonne manière de signifier à Jean François Ntoutoume-Emane que tous les «rapports d’experts» et autres «protocoles d’accords» qu’il signe par ci et par là avec tel ou tel autre syndicat sont nuls et non avenus. De la vraie poudre aux yeux de ces organisations syndicales qui, au vu des fameux «rapports d’experts» et protocoles d’accord, continuent à entretenir l’illusion auprès des adhérents. D’ailleurs, le président Bongo ne pense-t-il pas que ces revendications ne le sont que de «nom» (suivez notre regard) ? L’espoir de conclure un accord avec le F.M.I. est permis, a laissé entendre avec un léger optimisme le président Bongo. Cependant, a-t-il martelé, «la conclusion définitive de cet accord appelle de l’ensembe des forces vives du pays une prise de conscience de la passe difficile que nous traversons». Après avoir assuré le gouvernement de son «soutien total», il a, par la suite, exhorté le Premier ministre, Jean François Ntoutoume-Emane, à veiller à «l’application stricte de la loi contre les fossoyeurs de l’ordre public».
Puis, vint la surprise. Le président Bongo a révélé qu’il était désormais le vrai ministre de l’Economie et des Finances. A ce titre, il se donne personnellement la mission de jouer au «Monsieur propre» afin d’assainir les finances publiques. L’actuel titulaire de ce portefeuille, M. Emile Doumba, n’agira plus que dans l’ombre. Est-ce une manière d’empêcher le Premier ministre, Jean François Ntoutoume-Emane, d’avoir un droit de regard sur des dossiers financiers ? Il y a des raisons de le croire. Tout se passera désormais entre lui et le virtuel ministre de l’Economie et des Finances. Hors-jeu et disqualifié, M. Jean François Ntoutoume-Emane. D’aucuns n’hésitent pas à parler d’un désaveu cinglant.
C’est donc une pilule amère pour tous les Gabonais que le président Bongo a ramenée dans sa gibecière en attendant que l’«accord» soit conclu avec le F.M.I. Mais les «accords» avec le F.M.I., tout le monde sait ce qu’il en est : réduction des salaires, restrictions budgétaires, dégraissage de la Fonction publique et donc chômage, arrêt des subventions par l’Etat des produits d’importation de première nécessité, etc. Autrement dit, lorsque cet «accord» tant attendu par les autorités gabonaises sera conclu, la pilule deviendra de plus en plus amère, voire nocive.


Et les Papis firent de la Résistance

Par Fréderick BOUNDA, Misamu, 08/02/1999

On l’avait d’avance affublé de tous les qualificatifs : «gouvernement de combat», «inventif», «créatif». On le prédisait animé par des hommes «neufs» et « dynamiques» . Finalement, la montagne a fini par accoucher d’une souris, et d’une toute petite souris. Le premier gouvernement Ntoutoume Emane n’aura donc pas été celui attendu par l’immense majorité des Gabonais. Ce n’était qu’une grande illusion entretenue. Et nous l’avons prédit (cf : Misamu n° 169, du 11 janvier 1999). C’était en connaissance des arcanes, des réalités, et des pesanteurs socio-politiques gabonaises…

Au bout du compte donc, vous prenez quelques nouveaux venus ou revenus : Richard Onouviet, Emile Ndoumba, Zéphirin Rayita, Ursule Ekié, Yolande Assélé Ebinda, Ali Bongo, Paul Biyoghe Mba, et vous leur collez les étiquettes : «inventif», «créatif», «neuf», «dynamique», le tour est joué. Vous l’avez votre «nouveau modèle gabonais». Reste qu’ à la lecture de la copie du nouveau gouvernement qui vient d’être mis en place, point n’est besoin de sortir de hautes études des sciences politiques pour comprendre l’esprit qui a animé le chef de l’Etat Gabonais et son nouveau premier ministre à servir cette énième bouillabaisse au peuple gabonais. Certaines données sautent aux yeux : le respect des équilibres géoethniques, ce qui justifie en soi la pléthore de l’équipe gouvernementale, le dosage partisan, et surtout le maintien de tous les caciques, poids lourds du système,. Signe évident de l’immobilisme. Tout le contraire du dynamisme.

Le respect des équilibres géoethniques

Un fang de l’Estuaire à la primature, un autre fang, cette fois-ci du Nord à la Vice-Primature -Les vœux de Bonjean François Ondo partiellement exaussés-, ajoutés au punu du Sud Ouest qui occupe la Vice- Présidence de la République, et sans oublier le ndziebi du Sud Est remonté en 3e position de la hierarchie de l’exécutif, la répartition spatiale et géoethnique se trouve ainsi savamment respectée. Le «nouveau modèle gabonais» n’échappe donc pas à la géopolitique. Cela aurait été trop rêveur pour être vrai. Et si cela avait été le cas, on aurait probablement assisté à l’amorce du démantèlement des valeurs et de l’ordre anciens. Mais peine perdue, le changement n’est pas encore à l’ordre du jour.

Une équipe pléthorique

Ceux qui ont cru à la réduction de l’effectif de l’équipe gouvernementale en ont eu pour leur compte. C’est plutôt à la hausse que le chef de l’Etat et le nouveau premier ministre ont préféré voir les choses. De 41, on est passé à 42 membre du gouvernement. Les considérations et les combines politiciennes n’ont que faire de la réduction du train de vie de l’Etat que réclame haut et fort l’ensemble des partenaires sociaux. Au Gabon, le politique ne prime-t-il pas sur le social ? Aussi, la distribution des strapontins dans chaque province, chaque département , chaque district, chaque canton, chaque ethnie, chaque tribu, chaque clan, chaque famille oblige-t-elle le Président Bongo, au nom de la géopolitique, et sans le faire exprès, d’augmenter à chaque fois le nombre de membres du gouvernement. Plus grave pour lui serait d’oublier une de ces composantes géographiques et sociologiques. Si jamais tel était le cas, l’édifice s’écroulerait.

Le dosage partisan

Toutes les formations et autres groupouscules politiques - à quelques exceptions près- qui ont contribué à la reélection du Président Bongo devaient avoir leur part du gateau. La répartition a été faite en tenant compte du poids réel et la représentativité de chacun. Ainsi, si le Parti Démocratique gabonais se taille la part du lion avec 35 membres reconfirmés ou nouveaux, le RDP et le PGCI se maintiennent avec Pierre Eboni et Antoine Yalazélé. L’ADERE fait son apparition avec Gaston Noël Boumbou Ngoma, et le MCD y est présent avec le retour de Paul Biyoghe Mba. Seuls les Morena manquent à l’appel. Peut-être va-t-on leur réserver d’autres sinécures.

Le maintien des caciques ou l’immobolisme

C’est là la caractéristique principale de ce nouveau gouvernement. Nouveau du point de vue évènementiel. Dans notre dernière édition (Misamu 170 du 25-01-99), nous faisons état de certaines indiscrétions glanées autour du Palais de marbre. Indiscrétions selon lesquellles, le club des gérontocrates qui constituent l’ossature du système Bongo et qui siègeaient dans le cabinet sortant faisaient de la résistence. Ils n’entendaient pas céder aux sirènes de ceux qui, le Président de la République y compris, pensaient que la mise en œuvre du «pacte national de solidarité et de développement» et la réalisation du «nouveau modèle gabonais» passaientt nécessairement voire impérativement par leur départ du gouvernement.

En nous interrogeant et en émettant des doutes sur les chances de réussite du premier ministre nouvellement promu, nous écrivions (Misamu n°170, du 25/01/99) : «des hommes neufs, intègres, dynamiques, c’est ce qu’il lui faut, dit-on. Mais alors, parviendra-t-il à se débarasser de tous ses anciens caciques qui, comme des ventouses, saccrochent au pouvoir, ne comprennent pas que les temps ont changé? «La réponse à cette interrogation est là. La résistance des caciques l’a emportée sur les attentes du peuple. Même si cela ne s’est pas fait sans concessions de taille. Parfois même au prix du déshonneur. C’est ainsi qu’en échange de leur maintien dans l’équipe gouvernementale d’aucuns n’ont pas hésité d’accepter d’être rétrogradés. Les ex-Premiers ministres deviennent aussi ministre d’Etat certains acceptant même de passer de la première à la cinquième position, d’autres de la deuxième à la quatrième, cependant que certains ministres d’Etat se sont vus rétrogradés au rang de simple ministre. C’était le prix à payer à la résistence opposée contre velleité de renouvellement de la classe politique et au changement.

Difficile d’entrevoir des éléments de changement dans l’équipe gouvernemental qui vient de s’installer aux commandes de l’Etat gabonais. A telle enseigne que çà et là, l’on se pose la question de l’opportunité d’avoir simulé un remaniement ministériel. Ne valait-il pas mieux garder l’ancienne équipe du Docteur Paulin Obame Nguema ? Pour un gouvernement baptisé d’avance de «combat», c’est plutôt un gouvernement de coma qui vient de voir le jour. Et le peuple gabonais qui attendait le changement s’en relèvera difficilement. Peut-être même jamais.


Gouvernement et partenaires sociaux: les négociations

par Niwoumbi Mambacka, Misamu, 11/01/1999-

Les partenaires sociaux auront une idée de l‘effort du gouvernement à l’issue de la grande plénière de ce lundi matin. Depuis deux semaines, le gouvernement est en négociation avec les partenaires sociaux. Ces négociations font suite au climat social déletère consécutif au ralentissement de l’activité dans certains secteurs comme la santé et l’éducation nationale. Entamées le 28 décembre dernier à la Chambre de Commerce, les négociations se poursuivent au minietère des finances, sous la houlette du duo ministériel Patrice Nziegui pour la fonction publique et d’Antoine Yalazélé pour le compte des finances. Jusqu’à présent, les rencontres se bornent encore à un balisage du terrain, notamment par la mise en place d’une méthode de travail. Celle-ci a pris du temps à se mettre en place compte tenu des exigences inopportunes de l’USAP. En effet, l’union des syndicats de l’administration publique estime et le fait savoir à chaque rencontre qu’elle est la partenaire privilégiée sinon unique, de ces négociations, voulant écarter les autres centrales syndicales (COSYGA et la CGSL) et les syndicats de la fonction publique hors USAP (FESEENA, SAEG). En accédant à la requête de l’USAP, celle de discuter indépendamment des autres corporations sociales, dont les points de revendications se recoupent pourtant, le gouvernement s’est fait prendre au jeu de l’USAP. Ce qui, à la longue, peut exacerber l’impatience des fonctionnaires qui attendent beaucoup de ces négociations. Mais le gouvernement se défend en relevant que le fait de céder aux caprices infantiles de l’USAP, n’est en rien une marque de faiblesse. C’est la volonté d’éviter des réactions passionnelles qui peuvent déboucher sur des débordements malheureux.

Les choses sérieuses commencent

Aujourd’hui, les négociations rentrent dans leur phase décisive. Lors de la réunion du 06 janvier dernier, le gouvernement a présenté aux partenaires sociaux, un tableau synoptique des estimations de coûts des revendications syndicales. Dans l’hypothèse d’une prise en compte des coûts minimaux de ces revendications, la masse salariale augmenterait de 41 123 880 000 Fcfa soit un déficit budgetaire de 384 215 880 000 Fcfa. En maximisant les coûts des revendications, l’Etat dépenserait la rondelette somme de 118 210 880 000 Fcfa soit un déficit budgetaire de 461 302 880 000 Fcfa.. Au regard de ces chiffres estimatifs, le message du gouvernement est très clair : les revendications telles que posées par les partenaires sociaux ne peuvent pas être financées par le budget de l’Etat. Et le ministre délégué aux finances a été on peut plus clair. Compte tenu de la recession économique que connaît le Gabon par la mévente de ses matières premières et tenant compte du déficit budgetaire estimé au 1er janvier 99 à 60 milliards auquel s’ajoute le P.A.S. (programme d’ajustement structurel). La tâche apparaît herculéenne pour le gouvernement. C’est pourquoi, en renvoyant les partenaires sociaux à leurs chères études, le ministre délégué aux finances leur à demandé de prendre en compte les contraintes auxquelles l’Etat fait face pour pouvoir négocier; surtout qu’une augmentation de salaire n’impique pas forcément l’amélioration des conditions de vie des travailleurs. Car, celle-ci influence toujours le comportement des agents économiques. Une augmentation de salaire entraîne automatiquement la hausse des prix, ce qui rend nul et nul effet l’opération. Dans ce cas, comment améliorer le pouvoir d’achat des Gabonais ? Cette amélioration passe-t-elle nécessairement par une augmentation de salaire? Ne convient-il pas de trouver d’autres moyens pour arriver au même résultat ? Voilà le casse-tête que le gouvernement a posé aux partenaires sociaux. L’heure est maintenant à la réflexion et non à la dénonciation tonitruante. Il s’agit pour les partenaires sociaux, de démontrer au gouvernement de combien leur pouvoir d’achat s’est dégradé, et provoquer en conséquence leur manque à gagner.

Vers une solution politique ?

De cette proposition dépendra l’issue heureuse de ces négociations. A ce qui semble, les syndicats donnent l’impression d’accuser le coût. Leur sachant assez peu outillés pour opposer une riposte chiffrée au coût de la vie, le gouvernement veut entraîner les syndicats vers un terrain glissant, malgré sa profession de foi. Au regard des coûts prévisionnels des revendications, le gouvernement semble habilement opposer à une fin de non recevoir aux revendications. Surtout que même la proposition de réduction de la masse salariale existante préconisée par la FESEENA ne semble pas trouver l’assentiment du gouvernement. Les simulations opérées par les services techniques du ministère de finances en vue de la suppression -du moins la diminution- de nombreux postes politiques ne génèrerait qu’une économie d’un peu plus d’un milliard. Ce qui est une broutille au regard des appétits aiguisés depuis le début des négociations. De même le gouvernement ne semble pas disposé à enlever au chef de l’Etat, l’un des fondements de sa politique : la distribution des postes politiques aux pleurnichards.

Pourtant les revendications sont posées et les Gabonais attendent un geste significatif de la part du gouvernement. On voit mal les syndicats battre leurs troupes en retraite au seul fait que le Gabon serait en crise; alors que certaines centrales ont arrêté le travail depuis deux mois. La plénière d’aujourd’hui permettra non seulement aux syndicats de proposer de nouvelles pistes, mais le plus intéressant sera de savoir ce que compte faire concrètement le gouvernement pour apaiser les partenaires sociaux. Mais à entendre le ministre délégué aux finances à la télévision le mercredi 07 janvier dernier, tout porte à croire que le gouvernement veut emmener les syndicats à accepter des mesures paliatives à même de diminuer la cherté de la vie. Dans cette hypothèse, il faudrait s’attendre à des jours à venir très chauds. Comme cela se passe toujours dans ce pays, Omar Bongo rentrera dans la danse pour calmer les esprits en prenant une décision politique. Nous l’avons vu lors des négociations de la prime de logement du personnel de l’éducation nationale. En ce temps-là, le ministre des finances entonnait son refrain habituel «il n’y a pas d’argent dans les caisses de l’Etat».

Affaire à suivre.

J. Robert Niwoumbi Mambacka