Journaux Gabonais:  L'Union


Politique Sociale : Toujours l'Expectative

ONDOUBA’NTSIBAH (L'Union, 3/05/1999)

LA tradition exige que 100 jours après la mise en place d’un gouvernement, on revienne un tant soit peu sur le chemin déjà parcouru. Pour voir la voie dans laquelle il s’engage, surtout en faisant un rapport avec les grands axes annoncés dans sa déclaration de politique générale. Le champ d’action de cette analyse qui s’inscrit dans ce sens, est essentiellement social. Sur ce point, il convient d’abord de faire un rappel. Dans sa déclaration de politique générale plébiscitée par l’Assemblée nationale, le chef du gouvernement inscrivait son action dans quatre axes principaux : la réforme de l’État, la relance de l’économie, la lutte contre les inégalités (sociales) et la poursuite d’une politique extérieure d’ouverture. Développant l’aspect relatif à la lutte contre les inégalités sociales, le Premier ministre Jean-François Ntoutoume Emane avait envisagé le renforcement des missions des organisations non gouvernementales qui, selon lui devraient être de plus en plus actives auprès des plus démunis.

MOINDRE INTÉRÊT

Tout comme le locataire de la Primature avait prévu la réorganisation de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), de la Caisse nationale de garantie sociale (CNGS); la révision à la hausse du financement de l’habitat; un vaste programme de l’habitat pour les plus démunis ; la construction des casernes pour les forces de l’ordre ; etc. Notre analyse consiste donc à inventorier ce qui a été déjà fait ou est en cours de réalisation dans chaque volet. L’heure n’est plus à se demander si les ONG vont se substituer aux pouvoirs publics dans son rôle d’assurer le bien-être des populations, il y a lieu de préciser une chose. Demander aux ONG d’être plus actives dans la lutte contre la pauvreté, revient à garantir une allocation ou des moyens considérables aux différentes organisations non gouvernementales. Dans cet esprit, il faut se demander comment. Sera-ce à partir d’une loi ? Sous la forme d’aide directe ? Dans tous les cas et conformément au cadre de cette analyse, il faut dire que rien n’est encore fait. Au contraire, certaines ONG continuent à se plaindre du peu intérêt que l’État continuerait à leur accorder. S’il y a un domaine qui inquiète les Gabonais aujourd’hui, c’est incontestablement celui de la sécurité sociale. Depuis plusieurs années, la CNSS et la CNGS connaissent de sérieuses difficultés. C’est pourquoi, nombre de travailleurs et d’assurés avaient salué l’idée de réorganiser ces deux sociétés. Cependant, aujourd’hui encore, la CNSS et la CNGS ne sont toujours pas sorties de la tourmente.

LOIN DE LA RÉALITÉ

Le ministère des Affaires sociales tolère toujours que des enfants soient pris en “otage” à la Pédiatrie, parce que leurs parents n’auraient pas payé la facture d’hospitalisation, etc. Certains cotisants se demandent où vont leurs cotisations dès lors que leurs retraités ne perçoivent pas facilement leurs pensions…L’habitat est un véritable casse-tête chinois au Gabon. Ancien ministre de l’Habitat, Jean-François Ntoutoume-Emane avait vu juste en accordant une place de choix à ce secteur. Il faut souligner que les précédents gouvernements avaient déjà créé des sources de financement de l’habitat. Et malgré, la SNI, le CNH et le FNH, le problème se pose toujours avec acuité aujourd’hui. L’affaire confine à la quadrature du cercle. Le gouvernement actuel s’était engagé à élaborer un vaste programme de l’habitat en faveur des plus démunis (encore eux). Mais jusqu’à présent, tout le monde attend. Sans trop y croire. Car, les rares efforts faits dans ce domaine ne sont pas de nature à faire accéder le démuni à la proprieté. D’une manière générale, les Gabonais attendent un geste significatif du gouvernement dans ce domaine. De même que pour les casernes des forces armées. En somme, 100 jours après, le gouvernement de Jean-François Ntoutoume Emane, et en dépit d’un frémissement notable dans la résolution des conflits sociaux, a encore du pain sur la planche. Cependant, il faut souligner qu’à son installation, ce gouvernement n’a rien trouvé et doit pratiquement tout refaire. C’est à Ntoutoume Emane de monter au créneau comme il le fait depuis qu’il a été nommé. Comme le maçon, on le jugera au pied du mur. Pour sûr cependant, dire que l’équipe actuelle ne bouge pas serait aller un peu trop vite en besogne.


Privatisation des Entreprises : du moins d'État au mieux d'État

NDEMEZO’O ESSONO (L'Union, 6/05/1999)

LA privatisation des entreprises publiques suscite d’une manière générale, des réactions controversées. Confusion est faite souvent entre moyens et objectifs en brandissant les effets négatifs des uns et les apports positifs des autres. Pour certains, c’est une mesure économique qui évoque particulièrement le licenciement, le bradage du patrimoine national, la réduction des salaires, etc… Pour d’autres, elle favorise l’afflux d’investissements, moteur de croissance économique et de création d’emplois. Signe des temps, la privatisation est devenue un phénomène global, qui refaçonne les relations entre l’Etat et l’économie. Mesure de politique économique ancienne, elle se généralise depuis la décennie 80. Après les grands pays industrialisés, la plupart des pays africains opte pour cette solution. Le gouvernement gabonais, dans le cadre de la restructuration de l’économie, a décidé de désengager l’Etat des activités productives afin de se recentrer sur ses fonctions régaliennes. Cette politique, initiée en 1995, fait partie du Programme d’ajustement structurel mis en place avec l’assistance du FMI. Elle a donné lieu à une loi sur les privatisations qui oblige l’Etat à ne plus participer directement aux opérations de production et de commercialisation de biens et de services.

CHOIX

Le gouvernement a donc décidé de céder les entreprises publiques à des opérateurs privés car, généralement, l’échec de l’économie planifiée dans les pays communistes, celui de l’Etat comme gestionnaire des entreprises et ses difficultés financières, renforcent le choix porté sur la privatisation. Défini succinctement, le processus permet, par le transfert de la propriété des entreprises du secteur public au secteur privé, d’accroître l’influence du marché dans la production et la distribution des biens et des services. L’un des aspects de la politique d’ajustement structurel préconisée par le FMI et la Banque mondiale (BM) - et dont l’objectif est de redresser l’économie de pays lourdement endettés et confrontés à des problèmes chroniques de balance des paiements - consiste à réduire rigoureusement le secteur public. La privatisation est devenue la condition sine qua non pour obtenir une aide des institutions multilatérales tels que le FMI et la BM et des donateurs bilatéraux. Devenue donc impérative au Gabon, la privatisation reste, selon le gouvernement, l’une des «grandes priorités» en matière de restructuration économique. Le secteur public a pris trop d’ampleur (il représentait en 1996 7,5% du PIB); or, la chute des cours des produits de base a montré les lacunes de ce secteur. D’abord, beaucoup d’entreprises sous contrôle de l’Etat, mal conçues au départ, n’étaient pas compétitives en dehors de marchés intérieurs fortement protégés et leurs personnels étaient trop nombreux (20% des travailleurs du secteur formel). Ensuite, le secteur public était devenu un fardeau pour le budget national. Loin de constituer une source financière pour le développement économique, de nombreuses entreprises publiques grevaient le budget de l’Etat, en engloutissant les maigres réserves en devises et en contribuant au fardeau général de la dette du pays. Leur rentabilité était négative, de -2,4% en moyenne entre 88 et 95, et la sous-utilisation des capacités de production était importante, de l’ordre de 40 à 65%. La privatisation a été présentée comme une solution nécessaire à la crise du secteur public pour plusieurs raisons. D’une part, les entreprises privées sont supposées être mieux gérées que celles du secteur public, les dirigeants des premières se préoccupant en priorité des bénéfices et étant moins influencés par des objectifs politiques que ceux des secondes. D’autre part, la privatisation, en contribuant au développement des marchés financiers, peut financer des entreprises nouvelles ou présentant un potentiel de croissance. En outre, la privatisation attire les investisseurs étrangers. Par ailleurs, les entreprises privées sont plus compétitives puisque leur survie dépend justement de leur efficacité et de leur compétitivité. Enfin, la vente d’entreprises publiques peut constituer une source de recettes de l’Etat.

ACCUEIL FERTILE

Sur la base de ces principes, peu de personnes s’opposent théoriquement à la privatisation. Cependant privatiser c’est bien, mais prêter une oreille attentive aux préoccupations de ses concitoyens, dans toutes les couches de la société ; mettre en place une fonction publique saine, juste, crédible, inspirant confiance ; et renforcer ou créer des institutions spécialisées dans le financement des entreprises pour attirer et maintenir les entreprises du secteur privé, c’est encore mieux. Car ce n’est pas parce que l’on est entrepreneur privé que l’on est assuré de réussir et surtout d’apporter un plus à l’économie nationale. La promotion du secteur privé, la mutation vers une économie de marché qui est son corollaire, supposent la mise en place d’instruments de financements, de mesures d’incitation fiscales et sociales. En clair, elles supposent un terrain d’accueil suffisamment fertile et incitatif pour inspirer la confiance sans laquelle il n’y aura pas d’entrepreneurs, ni d’entreprises. C’est ainsi que la politique de privatisation intègre dans son exécution diverses mesures devant permettre de créer un cadre favorable pour l’épanouissement de l’initiative privée en matière de création de richesses. Le ministère en charge des Privatisations a des chantiers, comme on le sait. De l’aménagement des aspects légaux et réglementaires aux questions relatives au financement des entreprises (marché financier national et sous-régional, sollicitation de l’épargne privée locale, etc). Avec l’appui des bailleurs de fonds, la Banque mondiale, l’Agence Française de Développement et la Banque africaine de développement, le gouvernement a mis en place depuis début 97 le projet de «Privatisation et renforcement du cadre réglementaire des entreprises», visant à mettre à la disposition du programme de privatisation tous les moyens nécessaires à sa réussite.

Le projet comporte cinq composantes: communication, renforcement des capacités réglementaires, réforme et privatisation des grandes entreprises, participation des nationaux à la privatisation, modernisation de l’environnement juridique des affaires. La composante “Communication” a pour mission d’obtenir l’adhésion de la population et le soutien politique à la privatisation. En clair, développer une capacité institutionnelle qui permettra de mettre en œuvre un programme d’information destiné à la compréhension des enjeux des réformes économiques et à établir un dialogue favorisant une plus grande participation nationale. La composante “Renforcement des capacités réglementaires” vise à asseoir des réglementations concurrentielles et à mettre en place des capacités de réglementation. Il s’agit concrètement, d’une part, de la mise en route d’une structure multi-sectorielle de régulation, autonome sur le plan juridique et financier, pour les secteurs de l’eau, de l’électricité, des communications, de la poste et des transports. Et, d’autre part, la révision du droit des affaires. La composante “Réforme et privatisation des grandes entreprises” soutient la restructuration et la privatisation des grandes entreprises publiques ciblées. Tous les secteurs économiques importants sont touchés par la restructuration et les privatisations : agro-industrie, autres industries, postes et télécommunications, eau et énergie, transport, services etc… La composante “Participation des nationaux à la privatisation” met en place des mécanismes qui permettront d’une part la vente au public des participations minoritaires de l’Etat et d’autre part de trouver une stratégie favorable à l’apurement des dettes réciproques qui existent entre l’Etat et les sociétés du secteur public et parapublic, encore appelées «dettes croisées». Les  actions prévues sont: la préparation de la législation régissant les fonds mutuels de placement et l’appel public à l’épargne ; la valorisation et la cession des parts minoritaires de l’Etat ; et l’apurement des dettes croisées. Enfin, la composante “Modernisation de l’environnement juridique des affaires” a pour mission la mise en place d’un cadre institutionnel et juridique apte à favoriser le développement du secteur privé. En définitive, tout a été prévu pour gagner le pari de l’excellence.


Assainissement des Finances : les Craintes Coupables des Agents de l'État

Jean Christian KOMBILA, (L'Union, 6/05/1999)

AU ministère de l’Economie, des Finances, du Budget et de la Privatisation, un haut cadre de retour de congé n’a pas hésité à reconnaître hier, en écoutant un concitoyen se plaindre de la disparition de son dossier d’intégration à la Fonction publique, que “depuis trois mois l’immobilisme a quasiment gagné toutes les administrations”. Aveu d’échec d’une culture particulière du service public, ou simple constat alarmant de l’image que renvoie un département ministériel qui était censé être un modèle de rigueur ? Le moins qu’on puisse dire est que ce concitoyen n’a pas hésité à décrire des administrations gagnées par une athmosphère devenue, dit-il, depuis la nomination du nouveau ministre, délétère du fait des informations selon lesquelles Emile Doumba devrait procéder au plus vite à une révolution de palais. Dans un pays où l’Etat reste le principal agent économique, sans lequel l’idée de développement ne peut être envisagée, le ministère des Finances et partant les titulaires qui se sont succédé à la tête de ce département ont acquis une puissance telle que certains d’entre ces derniers n’hésitent pas aujourd’hui à narguer l’Etat. Alors que ce n’est plus un secret pour personne que celui-ci n’a plus d’argent, ces agents qui n’étaient pourtant que passagers, ont amassé d’énormes fortunes sur son dos. Cette situation connue de l’opinion est donc venue renforcer l’idée selon laquelle aussi longtemps que l’Etat restait le facteur principal pouvant impulser la croissance durable, les ministres des Finances chargés d’arbitrer les choix économiques, voire politiques, devenaient, eux aussi, puissants. Ceci d’ailleurs, autant qu’on le sache, est une tradition observée même dans les plus vieux Etats du monde. Mais seulement, là où le bât blesse dans l’exemple de notre pays, c’est que le ministère des Finances, supposé jouer un rôle d’arbitre, a acquis au fil des ans, la réputation peu flatteuse de “mère dépensière” de l’Etat. A titre d’exemple, on estime que ce ministère peut coûter à l’Etat, en fonds communs ainsi qu’en primes de rendements octroyés à ses agents et en parc automobile, au bas mot la bagatelle de 20 à 30 milliards fcfa par an. Evidemmment, ainsi qu’on peut le noter, ceci n’est pas loin d’être considéré comme un paradoxe, d’autant qu’il a toujours eu à sa tête d’éminents économistes.

DELATION EN VOGUE

La cruauté et la soudaineté de la crise dans laquelle le pays a été plongé par ces pratiques procédant de la prévarication et de la concussion, et qui n’épargnent d’ailleurs aucune des administrations qui composent ce département a, semble-t-il, été à l’origine de la volonté des plus hautes autorités de l’Etat d’y placer un homme à poigne, agissant sans état d’âme, comme est justement supposé l’être Emile Doumba, austère banquier à la réputation sans tâche. Conscients des ambitions de cet homme, un vent de folie s’est emparé de l’ensemble du personnel du ministère des Finances. Davantage que par le passé l’ambiance entre agents, affirme un employé, est devenue délétère. La détermination au travail, quand elle a existé s’étiole sans cesse, affirme t-il avant d’asséner, “ d’ailleurs la délation n’y a jamais été aussi en vogue que maintenant”. Dans chacune des directions de ce département ministériel, chaque conseil des ministres, avoue un haut cadre, est désormais vécu comme un couperet de la guillottine. “Beaucoup d’entre nous redoutaient la venue de M. Doumba”, a-t-il déclaré. Au-delà, le sentiment selon lequel la venue du nouveau ministre des Finances va entraîner des mutations profondes dans les pratiques qui ont toujours prévalu là-bas, vient rappeler la nécessité d’envisager un contrôle véritable de l’action de ce ministère. Et pourquoi donc, l’action de la Cour des Comptes ne s’étendrait-elle pas à son niveau ? Et pourquoi aussi n’introduirait-on pas dans notre pays des signes extérieurs de richesse à partir desquels le fisc pourrait, à l’avenir, diligenter au plus vite des enquêtes ?


Immigration : la Quadrature du Cercle

MBEGAH EFFA - (L'Union, 4/05/1999)

DEPUIS deux ans maintenant, les forces armées gabonaises sont en alerte maximum le long de la frontière sud et sud-est du pays. Elles le sont plus précisément depuis que la guerre civile fait rage au Congo voisin. La peur de la contagion et surtout, l’hydre d’une arrivée massive d’immigrés sur leur territoire ont poussé les autorités gabonaises à prendre certaines précautions. Dont justement faire déployer les militaires tout le long de cette frontière de près de 1000 kilomètres. Du coup, nos bidasses reprennent du service dans un contexte marqué par des soubresauts dans la sous-région. Au Gabon, où il devient difficile de se voiler la face, les langues se délient tout naturellement. Avec comme unique préoccupation, l’angoisse d’une possible extension du conflit congolais chez nous. Au commencement était l’Eldorado. Mais avec les difficultés économiques, le Gabon a petit à petit perdu ce rôle. Notre pays n’en continue pas moins d’être considéré comme un pays riche. Et à défaut d’être l’Eldorado d’antan, il peut maintenant se targuer d’être un havre de paix où en plus, il fait bon vivre. Le fait que depuis son indépendance, le Gabon n’ait pas connu de secousse notable, hormis les échauffourrées de 1994, lui vaut d’être cité en exemple dans une Afrique centrale en proie à des crises de toutes sortes.

LA CHANCE DU GABON

Des voyageurs revenus du Congo, alors que la guerre civile pointait le bout de son nez, avaient rapporté les propos d’un haut responsable de là-bas qui se demandait comment le Gabon a pu passer au travers alors que toute la région était secouée par des conflits tribaux ou ethniques. La sagesse d’Omar Bongo est revenue, très souvent, comme la seule explication à cette exception. Ce ne sont pourtant pas les raisons, encore moins les circonstances qui ont manqué pour transformer le Gabon en brasier. Au plus fort de la contestation sociale, avant et après la Conférence nationale, certains faucons du régime avaient manqué de peu de pousser Omar Bongo à la faute en lui demandant l’autorisation d’arroser la foule des manifestants. Pour la première fois dans l’histoire de son long règne politique, l’homme apprit alors qu’un chef d’Etat est toujours un homme seul. Et il lui fallut toute sa maîtrise et sa parfaite connaissance des Gabonais et de son pays pour surmonter ces malheureux évènements. Et c’est lui qui eut raison. Aujourd’hui, le danger est autre. Il s’agit de protéger notre pays contre les infiltrations étrangères qui peuvent être préjudiciables à la stabilité du Gabon. La rumeur court que certains opposants, qui n’ont jamais perdu l’espoir de prendre le pouvoir par la force à défaut de le conquérir par les urnes, verraient d’un bon oeil que les frontières nationales s’embrasent.

TRADUIRE DANS LES FAITS

En quittant le Gabon il y a deux semaines, Omar Bongo avait laissé des instructions fermes à son Premier ministre et l’opération Koubia, récemment renforcée, procède de cette logique. Selon certaines indiscrétions, l’ancien chef de l’Etat congolais (actuellement en exil à Londres) aurait juré de nous faire trébucher. L’avertissement est pris très au sérieux à Libreville où Jean-François Ntoutoume Emane veille au grain. Les militaires gabonais ont récemment reçu du matériel pour parer à toute éventualité. Interrogé il y a quelques jours par RFI, le colonel Apanga, le patron de l’opération Koubia, s’est voulu rassurant : “Nous ne sommes pas en guerre. Mais nous nous regardons en chiens de faïence, nous et les soldats d’en face et s’ils osent, nous ripostons”. Il s’agit donc, côté gabonais, d’une opération préventive au moment où de nombreux compatriotes se disent ulcérés par la présence massive des ressortissants étrangers sur leur sol. Jusqu’ici, le Gabon n’avait affaire qu’à des hordes d’ouest-africains et beaucoup de ressortissants d’Afrique centrale, essentiellement camerounais et équato-guinéens, soucieux de commercer pacifiquement. Bientôt, il lui faudra aussi gérer les réfugiés. Une situation nouvelle qui ne laisse pas indifférentes les autorités gabonaises. Et qui vient poser, avec acuité, un autre problème, celui de la prise en compte des préoccupations de nos forces armées. On se rappelle que lors de sa présentation de politique générale à l’Assemblée nationale, Jean-François Ntoutoume Emane était revenu avec force sur ce dossier et même si rien n’a encore démarré, les militaires gardent bon espoir. Ayant placé son action, entre autres, sous le signe de la restauration de l’autorité de l’Etat, le Premier ministre avait promis de “doter nos forces de moyens logistiques idoines, en rapport avec le volume et la nature de leurs missions”. Plus, la construction des casernes pour regrouper les militaires et les rendre plus opérationnels en cas de besoin. L’urgence commande que tout cela soit traduit dans les faits, même si, dans un passé récent, des moyens conséquents avaient été débloqués pour y parvenir et qu’à l’heure qu’il est, il est absolument impossible de savoir où sont passés les fonds !


Furia Lycéenne à Moanda

ONDOUBA’NTSIBAH (L'Union, 28/04/1999)

Le Premier ministre, Jean-François Ntoutoume-Émane, s’est entretenu hier pendant une demi-heure avec plusieurs membres de son gouvernement, Zacharie Myboto (Équipement), Ali Bongo (Défense), Antoine Yalanzele (Éducation nationale), Fabien Owono Essono (Finances), Alfred Mabicka (Planification), David Bomby-A-Nzengue (Intérieur) et Yolande Assélé Ébinda (Économie et Finances). Au centre de cette rencontre, l’évaluation de la situation à Moanda dans le Haut-Ogooué au lendemain de la furia lycéenne qui a abouti à l’incendie du CES “Saint Dominique”, au pillage du lycée Henri Sylvoz et à la mise à sac du lycée technique par des élèves de ce dernier établissement en grève depuis une semaine (“L’Union” d’hier). Une délégation devrait rapidement se rendre sur place, faire les comptes estimés d’ores et déjà à une centaine de millions de nos francs et décider des mesures à prendre. Les événements qui se sont déroulés à Moanda, dans le Haut-Ogooué, ont été au centre de l’audience que le chef du gouvernement, Jean-François Ntoutoume-Emane a accordé hier à certains de ses ministres. Zacharie Myboto (Équipement), Ali Bongo (Défense), Antoine Yalanzele (Éducation nationale), Fabien Owono Essono (Finances), Alfred Mabicka (Planification), David Bomby-A-Nzengue (Intérieur) et Yolande Assélé Ébinda (Économie et Finances), notamment, ont pris part à cette réunion.

Le Premier ministre a voulu, en invitant ces membres de son gouvernement, demander de plus amples informations sur les tristes événements qu’a connus avant-hier Moanda. Lesquels ont conduit à l’incendie du Collège d’enseignement secondaire Saint Dominique de cette ville du Haut-Ogooué, ainsi que le pillage et la mise à sac d’autres établissements de la place. Plus précisément le lycée technique et le lycée Henri Sylvoz. Après une séance de travail de plus d’une demi-heure, Jean-François Ntoutoume-Emane et ses hôtes ont décidé d’envoyer une délégation sur place pour en savoir un peu plus afin de prendre des mesures en conséquence. Il faut rappeler que les événements de Moanda ont été provoqués par un malentendu entre le proviseur du lycée technique et les membres de la coopérative. Ce conflit avait conduit à la grève dans cet établissement. Ce sont donc les élèves du seul établissement technique du département de la Lébombi-Léyou qui sont à l’origine de l’incendie et des pillages dans les autres établissements.


Succès des Opérations de Plantation d'Hévéa

Gérard MINKO, (L'Union, 28/04/1999)

LE programme de plantations villageoises d’hévéa connaît un vif succès dans le département du Woleu, dans la province du Woleu-Ntem. En effet, implanté dans ce département en 1993, après successivement Mitzic, dans l’Okano, et Bitam, dans le Ntem, ce programme qui est opérationnel depuis 1996 suscite un engouement certain auprès des planteurs locaux. C’est ainsi qu’à ce jour on enregistre déjà 178 planteurs répartis dans 38 villages du Woleu. Et ce n’est pas fini puisque de nombreuses demandes émanant des personnes souhaitant se lancer dans l’activité hévéicole villageoise affluent dans le bureau de Richard Idiata, chef de secteur “Plantations villageoises” d’hévéa, à Oyem. Jeune ingénieur des techniques agricoles spécialisé en production végétale, M. Idiata ne ménage aucun effort pour porter haut le flambeau du programme de plantations villageoises d’hévéa dans le Woleu, contribuant ainsi au développement de ce département. Ce qui ne peut que réjouir la communauté villageoise qui a trouvé là un créneau porteur. Initié par l’Etat grâce à un financement de la Banque africaine de développement (BAD) pour résoudre l’épineux problème du chômage et permettre aux populations rurales d’avoir un revenu mensuel conséquent, le programme de plantations villageoises d’hévéa est piloté par la société Hévégab. Il a pour mission d’encadrer et de soutenir les planteurs dans la mise en place des exploitations privées, tout en leur apportant des méthodes pratiques nécessaires à leur évolution. Dès que l’exploitation entre dans sa phase de production, son propriétaire commence à honorer les échéances dues à l’Etat gabonais et à la société Hévégab.

Actuellement, la surface plantée dans le secteur d’Oyem est de 961,16 hectares (490 hectares lors du lancement du projet en 1996). On dénombre deux types de planteurs : ceux qui se regroupent en association (la superficie minimale est de 10 hectares) et ceux qui exercent au sein des PMH (la superficie minimale par personne est de 10 hectares). Avec environ trois ans d’âge, les plantes n’ont pas encore atteint la maturité. Mais cela ne saurait tarder car, selon Richard Idiata, «nous comptons entrer en production en l’an 2000». Cependant, les planteurs regrettent que plusieurs exploitations soient actuellement envahies par les hautes herbes du fait de l’absence, depuis quelques années, de subventions devant servir à la bonne marche du projet. Mais qu’à cela ne tienne, Richard Idiata s’active régulièrement sur le terrain pour maintenir le contact avec les planteurs et parer au plus pressé. Commencé en 1991, le programme de plantations villageoises d’hévéa en République gabonaise a théoriquement pris fin en 1998, affirme M. Idiata qui souligne que les objectifs recherchés ont été «largement atteints». On attend maintenant que les pouvoirs publics lancent la deuxième phase du projet. Pour l’heure Richard Idiata exhorte les jeunes ressortissants du département du Woleu à se lancer dans l’exploitation de l’hévéa qui permet déjà aux populations des départements du Ntem et de l’Okano de gagner honnêtement leur vie.


La Polémique sur les Conséquenees des Pluies à Libreville

Franck NDJIMBI (L'Union, 27/04/1999)

LES années se suivent et se ressemblent pour les Librevillois. A chacune des averses qui s’abat sur notre pays, Libreville se retrouve littéralement inondée. Et pour cause : aux voiries mal conçues et loin d’être entretenues est venue s’ajouter, au fil des ans, l’anarchie née d’une urbanisation non maîtrisée. Au point que la viabilisation totale de notre capitale pourrait prendre des allures de chirurgie à vif. De quoi donner la migraine aux populations qui ne savent plus à quel saint se vouer tant la résolution de ce problème ressemble, de plus en plus, à la quadrature du cercle. Aussi, suite aux inondations qui ont récemment frappé notre capitale, l’ex-garde des Sceaux, Marcel Éloi Rahandi-Chambrier, en visite dans son fief du deuxième siège de la commune de Libreville, a-t-il eu un véritable coup de gueule. Selon lui, la question de la viabilisation totale de Libreville aurait dû être réglée depuis belle lurette si nos responsables respectaient leurs engagements. Car, a-t-il expliqué, elle a déjà été portée à l’appréciation du chef de l’État, Omar Bongo. Ainsi, au terme de débats entre techniciens gabonais, une solution fut elle trouvée : il s’agissait de l’octroi par l’Agence française de développement (AFD) d’une enveloppe de 20 milliards de nos francs. Mais, face à la prévarication dont fit montre la partie gabonaise en n’honorant pas ses engagements, le dossier fut mis sous le coude. C’est ainsi que plus de trois ans après ­ le dossier fut traité en avril 96 ­ la question des inondations est toujours au cœur des préoccupations des habitants de la capitale. Si elle ne venait d’un dignitaire du régime, cette mise au point serait, sans doute, passée inaperçue. Mais, compte tenu du poids politique de son auteur ­ ancien président de l’Assemblée nationale, Rahandi-Chambrier a été plusieurs fois ministre ­ cette déclaration pourrait susciter des réactions en chaîne et constituer le point de départ d’une authentique polémique.

CADAVRES MALODORANTS

Déjà, dans les couloirs, on entend d’aucuns fulminer et se répandre en objurgations de toute sorte contre l’ex-garde des Sceaux. Et, avec le climat de défiance réciproque qui préside aux relations entre cadres de la majorité, il ne serait guère étonnant que l’on assiste bientôt à une escalade verbale. Et si cela venait à se confirmer, il y a fort à parier que des placards contenant des cadavres malodorants pourraient être rouverts. Et, Dieu sait qu’il y en a ! Et, en quantité ! Pour mémoire et à titre d’exemple : lors de sa tournée républicaine, le chef de l’État, Omar Bongo, avait procédé au lancement des travaux de voiries dans la commune de Libreville, suscitant ainsi un véritable optimisme au sein de la population. Dix mois plus tard, force est de constater que les travaux n’ont guère avancé pour des raisons inconnues du grand public. Et pourtant avec une enveloppe estimée à trois milliards de nos francs, la puissance publique disposait de moyens financiers conséquents pour faire avancer ce dossier. D’autant qu’en marge du pont de Gué-Gué, il s’agissait, avant tout, d’aménager les abords des boulevards Triomphal et de l’Indépendance, deux artères essentielles de la capitale. Comme on le voit, la viabilisation de notre capitale a toujours été inscrite au nombre des priorités du chef de l’État, qui n’a jamais manqué de le faire savoir et de donner les moyens de cette ambition à qui de droit, sans que l’on sache exactement quelle destination prennent ces fonds ou, comme le dit Marcel Éloi Rahandi-Chambrier, sans que l’on comprenne pourquoi certains ont tant de mal à honorer leurs engagements. Le débat est ouvert…


Réforme Administrative : la Politique des Petits Pas

ONDOUBA’NTSIBAH (L'Union, 26/04/1999)

LA Commission interministérielle de la Réforme administrative (CIRA) s’est réunie récemment, à la chambre de Commerce, en présence de MM. Patrice Nziengui et Émile Doumba, respectivement ministres de la Fonction publique et des Finances. La secrétaire d’État aux Finances, Mme Yolande Asselé-Ébinda, y a également pris part. L’ordre du jour a porté sur le rapport d’avancement de la réforme, la loi sur les principes d’organisation des services publics, le recensement administratif des fonctionnaires, etc. S’agissant de l’avancement de la réforme administrative, il faut retenir que cette opération s’est, jusque-là, réduite aux travaux dans les sous-commissions, aux séminaires-ateliers, à la formation et aux missions. Tout a commencé par la collecte des textes organiques réalisée par le Commissariat général sous l’impulsion de Christophe Lindzondzo-Mambanya. C’est ainsi qu’un diagnostic des forces et des faiblesses organisationnelles de l’administration gabonaise a pu être dressé. Après cette étape, un séminaire-atelier a été organisé en juillet 1997 à Libreville. Ses assises visaient, entre autres, les objectifs suivants : informer les acteurs participants à la réforme sur les instruments mis à leur disposition ; organiser des échanges de points de vue au sujet des éléments de stratégies à adopter et des approches à respecter pour obtenir les meilleurs résultats ; arrêter un calendrier des opérations à mener au cours du 2e semestre 1997 et définir le programme des réunions de travail de la CIRA et de ses organes pour la période à venir… Dans le cadre des travaux en sous-commissions, il faut dire que celle qui travaille sur les structures a élaboré un avant-projet de loi portant principes d’organisation et de gestion des services publics de l’État. Lequel a été discuté en commission lors du séminaire-atelier organisé en juin 1998. 

DISPOSITIONS TECHNIQUES

Pour sa part, la sous-commission des ressources humaines a timidement démarré du fait d’un manque de matériels. Cependant, certaines actions ont été entreprises. Notamment la révision de la loi fixant les conditions d’emploi du personnel contractuel de l’État et la révision du statut général des fonctionnaires, deux textes suffisamment avancés. Quant à la sous-commission “Pratiques opérationnelles”, elle éprouve des difficultés dans l’exécution des missions qui lui sont dévolues, à savoir : l’audit de l’administration gabonaise et la stratégie générale de la communication car, il s’agit avant tout d’informer, d’éduquer et, enfin, de communiquer. La réactualisation de l’étude sur l’image de la Fonction publique et la conduite d’une opération pilote sur les pratiques dans l’administration étant prévues pour l’année en cours. Deux actions ont été menée par la sous-commission décentralisation-déconcentration. Il s’agit de la révision de la loi 15/96 sur la décentralisation qui reste à promulguer et le projet de décret relatif au corps des personnels de commandement qui est en discussion à la Cour administrative. Au niveau de la sous-commissions finances publiques, les travaux ont démarré timidement à cause du changement d’équipes devant la piloter. Toutefois, les études antérieures sur l’analyse des mécanismes salariaux seront réactualisées et serviront de documents de base tout au long du processus. Par ailleurs, la gestion des postes budgétaires pose des difficultés en matière de gestion prévisionnelle du fait des recrutements abusifs. Par rapport au projet de loi, il faut souligner que celui-ci vise à rationnaliser l’appareil exécutif de la puissance publique et la structure des missions par une série de dispositions techniques précisant le cadre institutionnel, managerial et financier de l’organisation administrative. Ce texte sera prochainement soumis au gouvernement.

SOUTIEN

Quant au recensement administratif des fonctionnaires, le travail consiste à mettre sous bon de caisse, chaque fin de mois, et ce pendant 6 mois, les agents de quatre à cinq ministères regroupés en fonction de leur volume. Ce recensement se fera principalement à Libreville. Il concerne les fonctionnaires, les contractuels et les agents de la main-d’œuvre non permanente et permettra de confectionner les cadres organiques des administrations. Le recensement comportera un volet financier, déjà lancé par les responsables du ministère des Finances, et un autre administratif, actuellement engagé par le Commissariat général. Le ministre Patrice Nziengui qui a dirigé les travaux a insisté pour une bonne gestion des ressources humaines. Il a ainsi demandé aux commissaires de se pencher davantage sur la maîtrise des postes budgétaires, celle de la mobilité des agents de l’État, les départs en stage. Le ministre des Finances, Émile Doumba, a, pour sa part, exprimé son soutien à l’action visant à réformer l’administration gabonaise, élément fondamental pour l’assainissement des Finances publiques. Il a, par ailleurs, promis les moyens nécessaires à l’aboutissement de cette entreprise capitale.


Pluie Diluvienne dans la Nuit : des Maisons Inondées

MOUIDY-MOUIDY (L'Union, 24/04/1999)

LE mois d’avril connu pour sa forte pluviométrie a justifié dans la nuit d’avant-hier à hier, puis aux premières heures de la matinée ­ après déjà un orage la veille qui a eu notamment pour effet de priver les téléspectateurs des images de la télévision en tout début de soirée ­ cette réputation. La pluie diluvienne qui s’est abattue sur Libreville a ainsi occasionné de nombreux dégâts dans les quartiers : maisons entières et véhicules sous les eaux, familles sans abri. Hier, sur le terrain, en parcourant certains quartiers, en fin de matinée, le constat était désolant. Quelques sans abri, pour manifester leur mécontentement, ont érigé des barricades sur les artères principales. Certains n’ont pas été tendres à l’endroit des pouvoirs publics. En certains endroits, il a fallu une intervention musclée des forces de l’ordre pour rétablir la circulation. À Akébé Belle-vue, non loin du B2, une dame devant l’ampleur des dégâts occasionnés par la pluie chez elle, n’avait plus que ses yeux pour pleurer. Elle est restée coincée chez elle avec ses enfants, plusieurs heures durant. Attendant que l’eau se vide. Le député de la circonscription, Marcel Eloi Rahandi Chambrier, n’est pas resté insensible. Il s’est déplacé pour constater lui aussi les ravages de la pluie. Consterné, il a fait remarquer que le problème n’était pas nouveau. En avril 1996, alors qu’il était président de l’Assemblée nationale, la question avait été portée à l’attention du chef de l’État pour qu’une solution soit trouvée au phénomène des inondations à Libreville. Et à cette époque, il s’était agi de l’octroi par la Caisse française de développement d’une somme de 20 milliards. La partie gabonaise n’ayant pas honoré ses engagements, l’affaire est restée sans suite. Des quartiers touchés, l’on citera les Charbonnages, Derrière-la- prison, Nkembo, Sotéga et la zone industrielle d’Oloumi. Sur le visage de quelques habitants, l’on lisait la tristesse, la désolation.


Assainissement des Finances Publiques : l'Obligation de Résultats

ONDOUBA’NTSIBAH, (L'Union, 23/04/1999)

L’UN des reproches que nous font aujourd’hui les organismes financiers internationaux est le “gaspillage d’argent”. Et, il ne faut pas limiter ce reproche à l’attribution des salaires et autres primes faramineuses aux membres “des réseaux” encore moins aux actions à caractère politique qui ne profitent pas souvent au plus grand nombre. La remarque doit être étendue aux institutions financières et à toutes les administrations aussi bien publiques que privées. L’heure étant à la réforme administrative, à l’assainissement des finances et à la réduction des dépenses publiques, il faut veiller à mettre fin au “gaspillage d’argent”. Cela peut passer par un contrôle strict et permanent des fonctionnaires ou autres personnalités chargées d’exécuter le budget de l’État. Mais il convient de souligner qu’aucun contrôle au monde, fut-il strict et régulier, ne peut être efficace si le contrôleur est dépendant et si aucune mesure répressive n’est prévue. Depuis des lustres, la tendance est au laxisme et à l’anarchie. Oubliant que le budget est, dans une certaine mesure, constitué par l’argent des contribuables, donc de tout le monde, nombre de responsables s’amusent à le détourner à des fins exclusivement personnelles. Défiant tous les instruments de contrôle existants. Ces compatriotes sont généralement motivés par le conformisme et l’absence d’obligation de résultats. Un aspect jusque-là oublié par les précédents gouvernements. Cette situation a été à l’origine de la survenance régulière de certaines inscriptions au budget de l’État et du mauvais fonctionnement de certaines administrations, malgré l’octroi d’allocations de fonctionnement. A ce sujet, les exemples sont légion et on les trouve dans tous les secteurs.

IMPUNITÉ

Les Gabonais attendent toujours l’hôpital militaire dans ses dimensions prévues, la cité de l’information, le campus de la faculté de médecine, l’école pour aveugles de Bongolo, la construction de la route de Cocobeach, l’équipement de l’hôpital provincial du Woleu-Ntem, les opérations zonales intégrées (OZI), la Société gabonaise de cellulose… Il y a de cela près de deux ans, nous faisions un dossier spécial sur la maison d’arrêt de Libreville. Elle connaissait des difficultés énormes dans son fonctionnement alors que l’État y avait consacré à l’époque plus de 200 millions de nos francs. Le même exemple avait été suivi avec l’hôpital psychiatrique de Mélen… Cette année encore, la tournée du ministre de la Défense a démontré que dans ce département-là aussi, beaucoup d’indélicatesses avaient été commises. Tout comme le ministre des Sports, Pierre Emboni, avait découvert, très déçu, les conditions dans lesquelles travaillent ses collaborateurs de la direction générale. Depuis quelques jours, l’Institut national de la Jeunesse et des Sports (INJS) est fermé. En raison, entre autres, des difficultés de fonctionnement. Le constat sur le terrain est tout simplement désolant et suscite la honte. Une institution chargée de former l’élite du sport dans notre pays. La structure est complètement par terre aujourd’hui. Le ridicule va jusqu’à imposer aux étudiants de vivre dans le noir. Jusqu’à présent, les pouvoirs publics se sont comportés comme si les cas que nous venons d’énumérer n’étaient imputables à personne. La rigueur que nous imposent les bailleurs de fonds nous commande de changer d’habitudes et d’être un peu plus rigoureux dans la gestion de nos finances publiques. Et dans le cas d’espèce, il s’agit de rompre avec l’impunité. Voilà un champ non exploré jusqu’ici. La question est de savoir si Jean-François Ntoutoume-Emane entend se démarquer de l’attitude de ses prédécesseurs. Dans cette perspective, le nouveau chef du gouvernement et ses ministres devront veiller à ce que le budget soit exécuté rigoureusement. En cas de manquement, il faut déterminer et sanctionner les coupables. L’Assemblée nationale devra aussi jouer son rôle de contrôle par rapport à cet objectif. C’est une voie efficace de lutter contre les détournements de deniers publics. Notre pays commence à se lasser de recevoir les mêmes leçons des institutions financières.


Loi de Finances Rectificative : le Gabon Rattrapé par son Passé

Franck NDJIMBI, (L'Union, 22/04/1999)

LA question de l’orthodoxie gestionnaire et financière est, plus que jamais, au cœur du débat politique chez nous. A la suite des institutions de Bretton-Woods qui n’ont eu de cesse d’inviter nos gouvernants à revoir leurs modes de faire, le président de l’Assemblée nationale, Guy Nzouba-Ndama, avait, lors de l’ouverture de la session parlementaire, demandé à l’exécutif de corriger la loi de finances, exercice 99, afin de la rendre plus conforme à nos réalités. Ainsi, au cours de sa séance du 16 du mois courant, le Conseil des ministres a-t-il procédé à la révision à la baisse du budget, exercice 99, faisant en sorte que celui-ci passe de 916 200 000 000 à 547 400 000 000 de nos francs alors même que les dépenses sont toujours estimées à 1 425 700 000 000 FCFA. Une situation qui ne se justifie pas outre mesure et confine à la réinvention de la science économique. Car, non seulement un budget est toujours équilibré en dépenses et en recettes, mais en plus, on ne saurait dépenser ce que l’on n’a pas, même si on espère emprunter par ailleurs. Bien que la porte de sortie semble bien étroite, nos dirigeants auraient dû demander un moratoire aux bailleurs de fonds internationaux, étant entendu que, pendant des années, nous sommes allés de rééchelonnement en rééchelonnement. De sorte que plus personne dans les sphères financières internationales ne peut consentir à faire une telle fleur à un pays dont les potentialités laissent rêveur.

DONNÉES OBJECTIVES

Toutefois, compte tenu de l’ampleur de la crise que traverse notre pays, les institutions de Bretton Woods n’ont pas intérêt à ce qu’il n’ y ait pas rééchelonnement. Car, le Gabon est en quasi-cessation de paiement. Et, si rien n’est fait dans un délai maximum de deux ans, ça pourrait être la faillite totale. Ce qui, somme toute, ne serait que le contrecoup du pilotage à vue pratiqué, des années durant, par les différents gouvernements. Du reste, loin de rompre avec cette pratique, le cabinet Ntoutoume-Émane semble s’y complaire. Car l’allocation budgétaire réservée au fonctionnement est trop importante par rapport aux recettes propres ­ elle est de près de 68 % ­ alors que celle destinée à l’investissement est insignifiante ­ elle représente 13,8%. En outre, avec un taux d’inflation estimé à 2% et une baisse d’activité de l’ordre de 3,9%, le pouvoir d’achat des Gabonais pourraient chuter de près de 6% durant l’exercice courant. Ce qui occasionnerait une baisse de la consommation et la banqueroute de pans entiers de notre économie tels que la distribution, le bâtiment… Du coup, des charrettes sont à redouter dans les entreprises qui pourraient être contraintes de licencier à tour de bras.

AUTRE POLITIQUE

Autant de données objectives qui dénotent du caractère non compétitif de notre économie et interdisent toute forme de prêt dans la mesure où cela alourdirait la dette. Or, ayant essentiellement investi dans le social et les dépenses somptuaires, notre pays ne peut plus s’acquitter de celle-ci. Et, il est quasi utopique de songer à créer des ressources supplémentaires au moyen d’un élargissement de l’assiette fiscale puisque, l’appareil productif lui-même est grippé, comme l’atteste l’état financier de tous les mastodontes locaux. Que faire devant une telle situation ? Faire montre de courage politique ! Car, la privatisation du secteur parapublic peut encore être une solution. Mais, pour cela, il faudrait que l’allocation réservée à l’investissement serve à recapitaliser les entreprises qui seront par la suite vendues, permettant ainsi de dégager une plus-value conséquente que l’on redéploierait dans le secteur productif. Ne pas le comprendre serait aller droit dans le mur car, à ce jour, l’État n’a pas d’autre solution que de les brader, favorisant ainsi la main basse de certaines majors étrangères sur le pays. Autre solution envisageable dans ce cadre-là : la définition d’une autre politique économique faisant en sorte que les dépôts à vue se muent en dépôts à terme. Mais, pour cela, il faudrait assouplir les procédures administratives, rallonger les délais de remboursement de crédits, autoriser des prêts bonifiés… Toutes choses que seul l’État peut initier. C’est pourquoi, plus que jamais, le Premier ministre se doit d’être inventif. La balle est dans le camp du gouvernement


Procès du RNB : le Bout du Tunnel ?

Jean Christian KOMBILA (L'Union, 21/04/1999)

PORTE à l’attention du public il y a plus de cinq mois, le procès en légitimité du Rassemblement national des bûcherons (RNB) se poursuit dans la lassitude et l’incompréhension grandissantes de l’opinion. Certes, la poursuite du procès il y a près de deux semaines est venue rappeler la volonté des parties en lutte de masquer la dimension politique du conflit qui les oppose, au point de se focaliser sur les questions de procédures alors même qu’il est établi depuis longtemps que l’ex-premier sécrétaire et les siens sont entrés en dissidence contre leur ancien chef pour protester contre l’arbitraire qui gagnait le parti. Du moins, à en croire leurs propos. Au-delà, cette affaire dont l’issue finale paraît pour le moins difficile à fixer par les juges, “mbaïstes” et “kombilistes” ne semblent plus s’opposer que pour l’appropriation du logo de leur fonds de commerce commun après une séparation de fait largement consommée. Ce qui démontre surtout le caractère ambigu de ce conflit pour lequel l’opinion doute de la capacité des magistrats à désigner un vainqueur. Après la confusion qui a été savamment entretenue par le camp du père Paul Mba Abessole il y a quelque temps, se gargarisant d’avoir obtenu des juges qu’il soit désormais interdit à l’ancien député de Moabi de s’exprimer au nom du RNB et de faire usage du logo du parti, cette “décision” contestée est venue plutôt relancer un vieux débat sur l’origine première du logo convoité. Du coup, de nombreux citoyens n’ont pas hésité ces temps derniers à monter au créneau pour affirmer que la discussion sur l’appartenance de cet emblême n’a plus lieu d’être. Affirmant que “c’est un faux débat”, un militant du Moréna “unioniste”, s’est étonné jeudi 8 avril que pour une même affaire le tribunal attribue le même symbole à deux propriétaires différents. Il faisait là allusion à une décision du tribunal correctionnel de Libreville, saisi il y a six ans du conflit qui opposait sur cette même question le père Paul Mba Abessole et le président du Morena “unioniste”, et qui avait vu la justice donner raison au “vieux lutteur” aux dépens du curé.

TROISIEME ACTEUR

Voilà donc que resurgit un litige pour lequel le père Paul Mba Abessole et le RNB ont été déboutés par la justice française et les magistrats locaux. Moins d’un mois avant l’examen définitif de ce procès, qui en définitive l’emportera ? Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette affaire interne au RNB pourrait se muer en une autre mettant en scène toutes les différentes tendances du Morena. Car, elle pourrait connaître dans les jours qui viennent un rebondissement inattendu. Le retour au pays du leader du Morena “unioniste”, Adrien Nguémah Ondo, ancien président de l’Association “Solidarité gabonaise” en France, propriétaire reconnu du logo en question, devrait constituer un tournant décisif dans cette affaire. Au détour d’un entretien, l’homme a dit avoir mis son voyage à profit pour venir convaincre la justice locale de l’urgence de priver les deux ex-compagnons du RNB d’une création qui n’est pas leur fait : « J’espère, a dit le vieux combattant, que les pièces en ma possession, et qui ont longtemps retardé le processus, permettront enfin de faire la lumière définitive sur ce problème qui, au fond, n’en est pas un » a-t-il déclaré. Selon lui, “tous (les cadres du Moréna savent) qu’(il) reste sur le territoire national, l’unique propriétaire de cet emblême”. Et d’ajouter : « Nous allons le prouver bientôt ». Sans préjuger des résultats de la rencontre imminente entre cette figure emblématique du combat politique et le procureur de la République, tout indique pour le moins que rien finalement n’est gagné d’avance entre “mbaïstes” et “kombilistes” qui, au finish, pourraient assister, impuissants, au triomphe d’un troisième acteur.