Journaux Gabonais:  L'Union


Quelle politique d'immigration et de sécurité ?

L'Union, 26-28/03/1999 par Jean Christian KOMBILA

LORS de son intervention devant les députés, jeudi 11 mars, à l’Assemblée nationale, le nouveau chef du gouvernement a élaboré un programme qui met l’accent sur de nouveaux champs d’action politiques au cours du septennat qui commence, en particulier dans le domaine des finances, de l’économie, de l’environnement, des affaires sociales, et surtout de l’immigration et la sécurité. En outre, Jean-François Ntoutoume-Émane accorde une priorité absolue à la lutte contre le chômage, la réforme de l’État, ainsi qu’à la restauration de son autorité. Dans une société gagnée par le doute, devant un présent sombre, aggravé par les difficultés quotidiennes auxquelles font face les citoyens, ces derniers, ont besoin de se savoir partie prenante du groupe social auquel ils appartiennent. Et partant protégés par celui-ci.

Et la déclaration du Premier ministre, chef du gouvernement, devant les représentants du peuple, mettant "la sécurité des biens et des personnes" au cœur des préoccupations des plus hautes autorités de l’État, au moment où la recrudescence du grand banditisme devient, chaque jour plus inquiétante a, pour le moins, été annonciatrice de l’entrée du pays dans une ère nouvelle. S’exprimant sur la question de l’immigration et de la sécurité, le Premier ministre a affirmé : " L’autorité de l’État, dans ce contexte, est indissociable de l’action des forces de sécurité ". Puis, il devait poursuivre : " Elles doivent être performantes dans l’accomplissement de leurs missions ". Car, pour lui, "la sécurité des biens et des personnes exige de l’État une volonté réelle" .

SEUIL DE NON-RETOUR

Situant les "responsabilités" du grand banditisme, ce phénomène des sociétés contemporaines, Jean-François Ntoutoume-Émane allait pointer du doigt les "immigrants clandestins". Origine première, selon lui, de cette situation qui, "si l’État n’y prend garde", deviendra "invivable" et prendra ainsi une "orientation incontrôlable". Certes, le Premier ministre n’avait pas exclu "certains de nos compatriotes délinquants" comme figurant parmi les causes de l’essor de ce fléau, mais il avait insisté pour dire que "la montée du grand banditisme correspond à un accroissement exponentiel des immigrants clandestins". Cet état de choses est-il alors fatal comme le faisait observer un député de l’opposition ? Le moins que l’on puisse dire est que le Premier ministre, en notant que le seuil de tolérance qui, selon les normes internationales, se situe entre 5 et 7%, est largement dépassé puisque, les chiffres actuels font état de 18% ne s’était pas moins montré anxieux au regard du pari à relever dans ce domaine.

Toutefois, il devait annoncer un "accroissement" des effectifs des forces de sécurité par des recrutements "significatifs" avait-il indiqué, ainsi que l’octroi à ces forces de moyens logistiques "idoines", pour lutter contre ce phénomène. Mais bien qu’il n’ait pas précisé la périodicité et l’ampleur de ce renforcement d’effectifs, il avait pour le moins adressé des mises en garde à ces "clandestins" dont le nombre semble avoir atteint le seuil de non-retour.

UNE NOUVELLE POLITIQUE

Alors, bien qu’une politique visant à sécuriser le plus grand nombre soit en cours d’élaboration, le moins que l’on puisse souhaiter aujourd’hui, c’est qu’à côté de cette stratégie visant à vaincre l’immigration clandestine devenue galopante, il y ait lieu, en définitive, d’imaginer une politique plus conséquente et plus conforme aux réalités démographiques locales? Pour de nombreux citoyens dorénavant, il s’agit aussi d’impulser des changements majeurs à même de favoriser, pourquoi pas, l’intégration de certains de ces bras valides venus d’ailleurs, et disposés à revenir dans leur "deuxième patrie" au cas où ils auraient été frappés d’expulsion. Dans l’opinion d’ailleurs, certains n’hésitent pas à appeller une nouvelle politique des étrangers établis sur le territoire, porteuse de cette idée d’intégration, qui explore la perspective de transformer nombre d’entre ces derniers en nationaux.

Dès lors, dans un pays où les étrangers ont même pénétré les coins les plus réculés de la République, la double nationalité pour faciliter leur socialisation, ne doit-elle pas maintenant faire l’objet d’une réflexion particulière ? Pour le Gabon cette question mérite à présent une réponse. Car, outre "l’impossibilité d’obtenir une autorisation administrative quelconque" et "l’expulsion systématique" dont ils pourraient être frappés, quelle stratégie, au fond, le gouvernement adoptera-t-il pour juguler le phénomène de l’immigration, surtout "clandestine" ?


Réforme fiscale : les intentions du gouvernement

L'Union, 26-28/03/1999, Par Franck NDJIMBI

FRAPPÉ de plein fouet par une crise économiquement structurelle et financièrement conjoncturelle, notre pays doit faire montre d’inventivité et d’imagination débordante s’il veut s’en sortir avant que le pire ne se produise. Ainsi, le gouvernement de Jean-François Ntoutoume-Émane est-il condamné à déployer des trésors d’ingéniosité s’il veut rendre l’espoir aux populations tout en créant les conditions susceptibles de lui permettre de laisser une marque dans l’Histoire. Face aux députés, le Premier ministre avait fait part de son intention de "procéder à une révision de notre politique fiscale" afin d’"assainir l’économie des distorsions que l’ancien système a générées". C’est pourquoi, a-t-il expliqué, "il convient de ne plus accepter des exonérations fiscales, d’élargir l’assiette fiscale afin de faire entrer le secteur informel dans le champ des contribuables qui alimentent le budget". De plus, "la baisse de la pression fiscale sur les revenus des personnes physiques doit au préalable être précédée par une extension de l’imposition de l’ensemble des revenus des personnes physiques" en même temps que, "les (…) placements à long terme doivent être moins fiscalisés".

Pour ainsi dire, Jean-François Ntoutoume-Émane entend réformer la fiscalité à travers une guerre sans merci à l’informel dont l’accroissement exponentiel de l’activité constitue un manque à gagner important pour le Trésor public. Dans le même élan, il entend imposer d’autres revenus individuels tout en faisant en sorte que les dépôts à long terme puissent être les plus rentables possibles.

LOURDE HYPOTHÈQUE

Pour rassurantes que ces mesures puissent paraître, elles n’en suscitent pas moins des interrogations. Car, non seulement notre pays est signataire de l’acte de naissance de la CEMAC qui l’astreint au respect d’un cadre fiscal sous-régional mais en plus, la lutte contre l’informel risque de prendre des allures de quadrature du cercle tant il est vrai que généralement, ceux qui opèrent dans ce registre-là appartiennent à des réseaux maffieux, adeptes de la contrebande. Lutter contre l’informel est donc une opération qui nécessite des mesures d’ordre global puisque, la question de la porosité de nos frontières se pose en filigrane. S’agissant des mesures annoncées au sujet des personnes physiques, le gouvernement semble vouloir jouer les prestidigitateurs en reprenant d’une main ce qu’il donne de l’autre lorsqu’il n’alourdit pas carrément les charges individuelles. Car, comment comprendre que l’imposition soit étendue à d’autres revenus au moment où l’on parle de faire baisser la pression sur les ménages ? Pis, que dire d’un gouvernement qui ne contrôle ni la politique des banques commerciales -- elles sont souvent des filiales de majors internationales -- ni celle de la banque centrale sous-régionale mais qui parle de modifier les taux d’intérêt? La finance internationale ayant des règles peu ductiles, surtout au moment où l’intégration devient le credo des dirigeants, une lourde hypothèque pèse sur le caractère opératoire et opérant des décisions gouvernementales. Sauf, bien sûr, s’il s’agira de négocier avec les partenaires de la BEAC la baisse des taux directeurs. Ce qui, à ce jour, est peu probable dans la mesure où, ceux-ci sont un moyen terme qui essaie de prendre en compte les intérêts de l’ensemble de la sous-région.


Réforme du système judiciaire

L'Union, 25/03/1999 par ONDOUBA’NTSIBAH

LES Gabonais qui ont suivi l’intervention du Premier ministre, chef du gouvernement, Jean-François Ntoume-Émane, ont salué les projets que son équipe et lui entendent réaliser. Parmi ces intentions d’actions figure celle relative à la réforme de notre système judiciaire. Sur cette question, nombre de compatriotes fondent énormément d’espoirs. Au point que l’annonce de cette initiative, a suscité plusieurs commentaires. Y compris parmi les députés. Jean-François Ntoutoume-Émane entend rendre la justice gabonaise crédible, indépendante et respectée. Certains commentaires ont assimilé ce projet à une "révolution". Une telle réaction montre que les Gabonais ne font plus confiance à leur propre justice. Ce qu’a reconnu le locataire de l’immeuble du "2-Décembre", allant jusqu’à souligner que "nos juges sont, à tort ou à raison, accusés d’allégeance politique et d’indélicatesse… " Au terme d’un constat pas tout à fait élogieux pour les magistrats, le Premier ministre a énoncé quelques mesures qu’il prendra. Selon lui, "la situation actuelle a pour conséquence une crise de confiance frappée au coin de l’affairisme". Ce qui dénie toute crédibilité aux jugements et décisions des juges. Le gouvernement s’est engagé à prendre des mesures qui tournent essentiellement autour de la formation des magistrats, l’intégrité des juges, etc.

Reste que d’aucuns s’interrogent sur les chances de réussite de la "révolution" qu’entend initier Jean-François Ntoutoume-Emane dans ce secteur. Tant le système est verrouillé, pour ne pas dire gangréné, à la fois de l’intérieur et de l’extérieur. La justice au Gabon semble être l’affaire de certaines couches sociales...

INDÉPENDANCE

De l’intérieur, la justice subit une chaîne d’influences où les interventions occultes et l’argent sale sont rois. C’est ainsi que les agents de sécurité ont toujours déploré le fait que leurs efforts quant à la lutte contre le grand banditisme, par exemple, soient toujours anéantis par leurs supérieurs. Ces derniers intervenant pour exiger la libération des détenus… De l’extérieur, il faut dénoncer l’affarisme et le poids du politique dans l’application de la loi. Quelquefois les deux sont liés. Si l’influence d’un homme politique ne suffit pas pour faire classer une affaire, c’est l’affairisme qui intervient par le biais de la corruption. D’où le manque d’objectivité dans le traitement de nombreux cas. Mais la corruption du juge peut aussi venir du grand bandit arrêté pour braquage. La dernière "fuite" rocambolesque d’un dangereux délinquant récidiviste dans le bureau même d’un juge d’instruction, en plein tribunal de Libreville, n’a fait qu’ajouter au discrédit qui pèse sur la justice gabonaise de nos jours. Tout compte fait, Jean-François Ntoutoume-Emane a trouvé lui-même le remède : l’indépendance et la crédiblité de la justice. C’est une double urgence prioritaire qui contribuera à l’instauration de l’autorité de l’État. Et l’indépendance de la justice exige le respect de la séparation des pouvoirs ainsi que la volonté de s’attaquer aux réseaux mafieux dans lesquels se trouvent compromis pas mal d’officiers, de magistrats, et d’hommes politiques.

L’indépendance de la justice signifie également le renforcement des pouvoirs des juridictions. De telle sorte que le principe selon lequel "nous sommes égaux devant la loi" soit appliqué à tous. Ce qui signifie que tous les délits ou autres crimes soient jugés dans la transparence. Qu’il s’agisse de viol, vol à main armée, meurtre, détournement de deniers publics, etc. De fait, si aujourd’hui il y a des faussaires qui purgent leur peine, il n’en demeure pas moins que des hommes puissants qui se sont rendus coupables des mêmes crimes circulent en toute quiétude… Voilà le sens dans lequel devrait aller la réforme du système judiciaire gabonais, c’est-à-dire : une réforme combattant l’affairisme et la corruption et non celle tendant à renforcer des lois qui ne seront jamais appliquées.


Le web sous toutes ses facettes

L'Union, 23/03/1999 par NDEMEZO’O ESSONO

La fête internationale de l’Internet, qui se tenait depuis trois jours sur le site officiel de la direction générale des Archives nationales, de la Bibliothèque nationale et de la Documentation gabonaise (DGABD), a pris fin dimanche soir comme elle avait commencé. Sur un succès. L’objectif visé à travers les différentes manifestations programmées à cet effet, dont des séances d’initiation, des offres de connexion gratuites et des conférences-débats pour populariser un outil déjà jugé "indispensable" par beaucoup d’accros, a de l’avis général été largement atteint. C’est pourquoi, en clôturant officiellement cette rencontre au nom du secrétaire général du gouvernement empêché, le patron de la DGABD, Roger Valère Ayimambenwe, a "chaleureusement félicité" tous les participants, organisateurs et internautes, particulièrement ceux qui animent le projet RDD-Internet et tous les partenaires impliqués dans le projet contribuant ainsi à en faire une réalité. M. Ayimambenwe s’est surtout dit conforté par la conviction des plus hautes autorités du pays décidées à consentir tous les moyens pour encourager et appuyer toutes les initiatives, publiques et/ou privées, pour mettre un accent particulier au développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication, et de leur accessibilité au plus grand nombre.

La fête internationale de l’Internet a pour objectif de permettre à un large public d’internautes potentiels de découvrir les nouvelles technologies de l’information et de la communication. En même temps que les efforts faits par le Gabon pour s’approprier ses bienfaits en favorisant la constitution de banques d’informations nationales par les institutions et organismes producteurs, se basant sur un environnement réglementaire permettant l’explosion d’initiatives et des intelligences, moyen indispensable de gestion de l’information pour le développement avec pour objectif la communication, les échanges et l’accès généralisé à l’information et à la connaissance dans tous les domaines face aux enjeux de la mondialisation. A l’ouverture de la session vendredi matin, le Premier ministre, chef du gouvernement, Jean-François Ntoutoume-Emane, avait dégagé l’importance des enjeux que commande l’appropriation des nouvelles technologies par la société gabonaise afin qu’elle participe harmonieusement et avec efficacité à la construction de cette "nouvelle société gabonaise fortement orientée vers la modernisation et le développement socio-économique". M. Ntoutoume-Emane s’était ensuite réjoui de cette orientation en rappelant que le Gabon a toujours porté une attention particulière à l’émergence et à l’affirmation des nouvelles technologies sous l’impulsion du président Bongo.

Cette première édition de la fête internationale de l’Internet a donc été bénéfique puisqu’elle a permis à des centaines de personnes de découvrir le fascinant monde de l’Internet. Cependant, le faible niveau de vie d’une tranche importante de la population gabonaise, comparé aux coûts élevés des ordinateurs, des communications téléphoniques et des abonnements (à Internet), constituera encore pendant longtemps un handicap pour beaucoup de personnes qui souhaitent rejoindre les milliers d’internautes déjà abonnés chez les fournisseurs d’accès locaux et ceux qui se retrouvent dans les cybercafés et dans les entreprises.


Autopsie d'une représentation nationale

L'Union, 22/03/1999 par MBEGAH EFFA

La fièvre politique est brusquement tombée avec la fin du long processus électoral enclenché depuis 1996 et dont la présidentielle du 6 décembre dernier a été le point d’orgue. Même les communiqués invitant les militants à faire le point sont devenus rares. Tout se passe comme si, après coup, les Gabonais en venaient à se désintéresser de la politique tant il se sont dépensés au cours des mois qui ont précédé cette échéance. La lassitude aussi. On en a tellement entendu qu’on n’a pratiquement plus envie de recommencer. Et puis, le gouvernement est maintenant formé et a même déjà été investi par le Parlement. Toutes choses qui pouvaient encore entretenir l’ambiance et le suspense. Seulement, voilà, on a tout épluché et les Gabonais ont désormais la tête ailleurs. Le quotidien les a pris en tenaille et même si la politique semble bien nourrir son homme au Gabon, elle ne saurait, à elle seule, résoudre tous les problèmes ni les supprimer d’un trait de plume. Les derniers soubresauts sociaux ont montré qu’il y avait autre chose que les joutes oratoires et les meetings enflammés. Mais dans un pays où tout le monde s’est pris au jeu, où la politique fait et continue de défaire les individus, personne n’a perdu de vue qu’elle semble tout régir et que, si certains sont aujourd’hui ce qu’ils sont, c’est grâce à elle. Et même si on est en train de vivre un répit, chacun campe dans sa formation politique. Histoire d’assurer les lendemains. Et les partis, il n’en manque pas sur la place. Après le boom démocratique de 1990 où on enregistra plus de soixante-dix partis et associations à caractère politique, neuf ans après, il n’en reste plus guère qu’une trentaine. Et encore, il y en a qui n’ont même pas l’air d’être vrais. C’est ici que les choses ont tendance à se corser et à s’éclaircir en même temps. A ce jour, en effet, pour une population d’un million d’habitants environ et pour un peu moins de cinq cent mille électeurs, treize partis politiques se partagent les suffrages des compatriotes dans un esprit de compétition n’ayant rien à envier aux grandes démocraties occidentales. Sur ce plan-là au moins, le multipartisme a fait beaucoup de bien au pays.

En revanche, et quand on y regarde de plus près, on se rend compte que pour un pays de cette taille démographique, on a un peu forcé la dose. Ceux qui ont quitté le PDG (Parti démocratique gabonais) pour créer leur propre formation politique, sont venus inutilement allonger la liste. On sait maintenant que c’était à dessein. Ils avaient reculé pour mieux sauter. Un repli tactique qui continue de leur garantir une place au soleil. C’est ainsi que l’unique sénateur du MCD (Mouvement commun de développement) a suffi au bonheur du parti pour être représenté au cabinet Ntoutoume Emane.

RETOUR AUX SOURCES

Dans ce contexte, hormis le PDG qui, en dépit des viscissitudes du temps, continue de voler de victoire en victoire à chaque échéance électorale, le Parti gabonais du progrès (PGP) a ravi la seconde place à l’Assemblée nationale au Rassemblement nationale des bûcherons (RNB), avec neuf députés contre six. De quoi constituer un joli groupe parlementaire. Mais c’est au Sénat que les bûcherons ont pris leur revanche. Viennent ensuite dans l’ordre : le CLR, le FAR et l’USG avec chacun deux députés. Les autres partis représentés à l’Assemblée nationale, à savoir : le Morena, le PUP, l’UPG, le PSD, l’ADERE, le MAD, le RDP et le CDJ s’en sortent chacun avec un élu. Pas de quoi fouetter un chat. Cette pléthore a pourtant fait des heureux. Pas nombreux, évidemment, en raison de la taille de ces formations politiques. Principaux bénéficiaires de ces micros partis : leurs fondateurs qui ont décidé de faire alliance avec le PDG. Même avec leur unique député, ils sont représentés au gouvernement et au Parlement. Beau doublé tout de même. Le scénario est simple : l’unique élu est nommé ministre alors que son suppléant siège à l’Assemblée nationale. On aurait appelé cela du rafistolage politique.

Le cas le plus atypique est celui du PUP dont le représentant au gouvernement est le suppléant de M. Georges Rawiri au Sénat. Zéphirin Rayita est en effet le numéro 2 du Parti de l’unité du peuple. Autant dire, une alliance tirée par les cheveux. A moins que le Gabon vive sur une coalition à l’équilibre instable, où la non prise en compte d’un parti créerait une crise politique, les analystes sérieux n’ont jamais vraiment compris la tentation qu’il y a à intégrer les formations n’ayant qu’un élu et dont l’aura se limite au seul canton, voire au seul village de leur fondateur. Le résultat de cette politique est la pléthore des ministres que beaucoup de Gabonais déplorent. Tout se passe comme si l’on ne pouvait pas faire autrement. Après tout, un député, c’est pour représenter ses électeurs à l’Assemblée nationale. Pas forcément d’entrer au gouvernement. Or, tout compte fait, c’est bien ce dernier aspect qui paraît être l’objectif principal. Tant et si bien qu’un député débarqué du gouvernement boude les bancs de la représentation nationale et considère comme une sanction ce retour aux sources.Drôle de conception des principes démocratiques!


Interview du président de l'Assemblée Nationale

L'Union, 20-21/03/1999, Propos recueillis par ONDOUBA’NTSIBAH & MBEGAH EFFA

L’Union : M. le président, vous avez dernièrement ouvert la première session ordinaire de l’année, peut-on en connaître l’ordre du jour ?

Guy Nzouba Ndama : Au cours de cette session, nous avons à finaliser un certain nombre de textes que nous n’avions pas terminé d’examiner au cours de la précédente session. Nous avons d’autres textes en chantier. Je voudrais plus particulièrement parler du projet de loi sur les problèmes de la famille, de la mère et de l’enfant qui était en navette entre le gouvernement et l’Assemblée nationale. Il nous est déjà revenu. Nous avons le projet de loi portant code forestier, c’est un texte important à plus d’un titre. Parce qu’aujourd’hui l’essentiel de notre forêt est exploité et exporté sous forme de grumes. Or je pense qu’avec le développement des associations des Verts, bon nombre d’entreprises ont du mal à recevoir les grumes des pays producteurs de bois, et vous savez que notre pays est une des réserves mondiales connues. La politique du gouvernement serait qu’une bonne partie du bois soit transformée sur place. Nous avons également une proposition de loi que j’ai élaborée de concert avec le Conseil national de la communication qui porte sur le code de la communication au Gabon. Je ne suis pas très exhaustif mais, ces deux textes constituent une tâche immense qui va solliciter l’énergie des députés pendant au moins un bon mois.

Vous nous avez devancé sur le code de la communication au Gabon. Peut-on savoir où vous en êtes concrètement ?

C’est une proposition de loi. Donc elle vient de l’Assemblée nationale. Et, il n’y a pas de raisons que les choses n’aillent pas mieux. Nous allons l’examiner dans les prochains jours. La commission de la communication devrait commencer à travailler dès lundi prochain. Nous nous donnons 15 jours à 3 semaines pour examiner ce texte. Dès que nous l’aurons adopté en commission, il sera envoyé au gouvernement pour avis. Le gouvernement a 60 jours pour se prononcer sur le texte. Passé ce délai, nous considérerons le texte comme étant approuvé. Nous l’adopterons et nous le transmettrons ensuite au Sénat.

Depuis quelques années le sport, comme d’autres secteurs d’ailleurs, connaît une crise profonde. Le ministre Patrice Nziengui, alors ministre délégué chargé de la Jeunesse et des Sports, a mis en place un projet de loi sur la réorientation de la politique sportive nationale au Gabon. Ce document, déjà entériné par le gouvernement d’alors, traînerait sur la table de l’Assemblée nationale. Qu’en est-il exactement ?

Je ne souhaite pas que le Parlement soit le souffre douleur de l’exécutif. Dans la mesure où chaque fois qu’il se sent acculé quelque part, il dit : nous avons fait ceci, le dossier se trouve de manière globale au Parlement. J’ai la chance d’avoir été député de la 8e législature, nous n’avons pas ici à l’Assemblée nationale un texte en souffrance émanant du ministère de la Jeunesse et des Sports. Nous avions reçu pour la 8e législature un projet de loi d’orientation sur l’enseignement envoyé par le ministre de l’époque, Mme Paulette Missambo. La commission des Affaires sociales avait estimé que ce texte était incomplet. En ce sens que l’enseignement ne concerne pas que ses domaines à proprement parler, qu’il fallait également intégrer la Jeunesse et les Sports. Nous avions alors demandé au gouvernement de complèter ce texte dans ce cadre. Et nous en sommes là à ce jour.

Le Premier ministre a récemment présenté son programme à l’Assemblée nationale. Avec succès puisqu’il a obtenu la confiance des députés. Vous avez également assuré le gouvernement de votre soutien. Peut-on savoir exactement comment se traduira ce soutien ?

Lorsque j’ai introduit le débat à propos de cette séance plénière, j’ai dit que celle-ci était d’abord un rituel républicain. Lorsqu’un nouveau gouvernement est formé, il faut que le Premier ministre vienne devant l’Assemblée nationale présenter les grands axes de sa politique. Mais que cette présentation est suivie d’un débat sanctionné par un vote. L’aspect politique est que cette séance est pour le nouveau Premier ministre, l’opportunité de jauger de la solidité de ses rapports avec sa majorité. Le gouvernement est en quelque sorte l’enfant de la majorité parlementaire. Donc il ne peut en être autrement que de voir la majorité parlementaire accorder un blanc-seing au gouvernement qui est issu de ses rangs. Outre que ce gouvernement venait d’être formé à l’issue d’une élection présidentielle à laquelle le candidat Omar Bongo a obtenu un oui massif de la part de ses concitoyens. Et cette majorité n’a pas dérogé à la règle en accordant à son tour un oui massif au programme du gouvernement. Maintenant, comment va-t-il se traduire concrètement ? C’est que le gouvernement, à partir des grands axes de son programme, va initier des projets de loi. Ceux-ci vont venir au Parlement dont le rôle, en pareille circonstance, sera d’être en homogenéité avec le oui accordé au Premier ministre. Il fera donc en sorte que tous les textes qui vont dans le sens de la défense des intérêts du plus grand nombre des Gabonais reçoivent l’assentiment de l’Assemblée nationale, pour ne parler que de la chambre que je dirige

Mais c’est un soutien qui sera conditionné par le fait que le gouvernement doit prendre les décisions qui s’imposent pour faire face à la situation très difficile que nous connaissons. Le climat social est dégradé, je crois que le gouvernement a devant lui un grand chantier. Il devra profiter de ce qu’aujourd’hui la demande de réformes vienne de la base elle-même. En 1990, le gouvernement du Premier ministre Oyé Mba avait eu le courage de s’attaquer aux soldes fonctionnelles, il avait réussi. Actuellement nous savons que dans notre Fonction publique, il y a beaucoup de choses qui ne vont pas, il faudra bien y mettre de l’ordre.

Les Gabonais ont souvent reproché aux parlementaires de ne pas rigoureusement remplir leurs missions constitutionnelles. Notamment, celles relatives au contrôle de l’exécutif. D’aucuns souhaitent que vous interpelliez régulièrement le gouvernement sur des questions d’actualité nationale ou internationale. Qu’en pensez-vous ?

Le public a raison en partie. Parce que la 8e législature était celle qui a posé les fondations de notre démocratie pluraliste retrouvée. Donc pendant cette législature,il y a eu de grands débats au niveau de l’Assemblée nationale. Il y a eu les déclarations de politique générale des différents gouvernements, il y a eu les deux motions de censure déposées contre les gouvernements du Premier ministre Oyé Mba. Ceci a constitué des moments forts de la 8e législature. Aujourd’hui, le contexte est différent, parce qu’au cours de la législature précédente la majorité était de 64 ou 66 députés sur 120. Actuellement elle est de 92 ou 97 députés sur 120. Ce n’est pas pour autant que je sous-estime le rôle de l’opposition. Bien que minoritaire, nous avons une opposition qui réaffirme avec fermeté ses principes. Mais le contexte ne permet plus à cette opposition de jouer le jeu qu’il a joué au cours de la 8e législature. La deuxième remarque c’est qu’effectivement, l’Assemblée nationale n’a pas pleinement joué jusque-là, le rôle qui était le sien dans le contrôle de l’action gouvernementale. Notamment en utilisant les instruments mis à sa disposition, à travers les interpellations, à travers les questions orales et écrites. Mais je puis vous promettre, si nous avions eu jusque-là quelques difficultés à l’appliquer, cela était dû au fait que nous souhaitions que ces débats soient retransmis en direct à la radio et à la télévision.

Mais le Premier ministre a évoqué cette question ?

Vous savez, quand j’ai dit au Premier ministre que je lui donnais un nom, "Ya na mawè", c’est parce que j’étais satisfait que de lui-même, il ait pris l’engagement de tout faire pour que les débats à l’Assemblée soient retransmis, de façon que le public puisse les suivre. Nous sommes donc en train de préparer une proposition de loi organique pour voir dans quel cadre doivent se dérouler ces questions orales ou écrites et les interpellations des membres du gouvernement.

M. le président, que sont devenues les différentes enquêtes diligentées sur certaines sociétés (la CNSS par exemple) ou sur des projets comme la construction de l’aéroport de Mouila ?

En ce qui concerne la commission d’enquête parlementaire sur la CNSS, cela date de la 8e législature. Je l’avais suivie d’assez loin. Toujours est-il qu’il y avait déjà eu un début de réalisation par rapport aux conclusions de cette enquête puisque peu après, nous avons examiné le statut général des fonctionnaires. Ce qui a fait qu’aujourd’hui, les pensions des retraités soient mensualisées. Je ne voudrais pas m’aventurer davantage, n’ayant pas été directement impliqué dans cette commission. S’agissant de l’enquête sur les travaux de l’aéroport de Mouila, la commission d’enquête parlementaire a démontré qu’il y a eu surfacturation des travaux; que le ministère de la Construction n’a pas été associé à l’exécution ou au suivi de ce projet et encore moins le ministère des Transports. Cela avait été le fait du seul ministère de la Planification. Nous avions donc saisi le gouvernement pour attirer son attention sur le fait que désormais il serait souhaitable que lorsqu’il y a les grands travaux, que ce soit les départements ayant en charge les problèmes de Construction qui aient à s’occuper de ce genre de dossiers…

À l’époque des travaux de l’aéroport de Mouila, c’était bien le gouvernement de la Démocratie ?

(Sourire entendu). Je ne sais plus quel gouvernement était en place à cette époque.

Lors de la célébration du 31e anniversaire du PDG, le secrétaire général de cette formation, l’honorable Simplice Guédet Manzéla, a revendiqué un statut pour les leaders des partis politiques. Peut-on savoir votre avis personnel sur cette question ?

Je pense qu’il faut faire un distingo entre les partis. Parce qu’il y a des partis qui ne se manifestent qu’à l’occasion des élections et cessent d’exister après. Il y a des partis qui font parler d’eux de manière permanente mais qui n’ont pas d’assise nationale par le fait qu’ils n’ont pas d’élus. Il y a également des partis qui ont des élus sur une partie du territoire ou sur tout le territoire national. Et il s’agit d’accorder aux responsables de ces partis la place qui leur revient au sein de l’État. Comment pouvez-vous concevoir qu’à l’occasion des fêtes du 17 août par exemple, qu’on ne sache pas où placer le secrétaire général du PDG ou le président du RNB, même si ce dernier est aujourd’hui scindé en deux, etc. Toujours est-il qu’on doit savoir qu’à telle manifestation on est à mesure de trouver le président du PGP, le secrétaire général du PDG qui est quand même le parti majoritaire. On a vu dans certains pays que le chef du parti au pouvoir occupe une place de choix dans l’appareil gouvernemental. Ce qui permet de résoudre un certain nombre de problèmes… Je suis d’avis avec le secrétaire général du PDG. Je pense que c’est un problème réel qu’il a posé et il faut réfléchir rapidement et, au niveau du protocole d’État, réserver une place de choix aux chefs des partis représentés dans les assemblées. Particulièrement au chef du parti majoritaire. Cela peut se faire par un acte reglémentaire… Je verrai bien un décret.

Certains compatriotes disent que vous avez privilègié votre groupe ethnique ou votre province lors de la constitution de votre cabinet. Que leur répondez-vous ?

Je vous laisse le soin de vérifier sur place, vous me direz si les assertions qui vous ont été rapportées s’avèrent exactes. Je me passe de tout commentaire, mais je pense que le cabinet du président de l’Assemblée nationale est représentatif de la République gabonaise. Tout le Gabon y est représenté.

Votre mot de la fin ?

Je voudrais lancer un appel à M. le Premier ministre pour dire que l’Assemblée nationale lui a accordé la confiance lors de son passage. L’Assemblée nationale fonde beaucoup d’espoir sur les initiatives que le gouvernement devrait prendre dans les prochaines semaines en vue de s’attaquer aux maux qui minent notre société. Plus particulièrement notre administration de façon à ce qu’elle devienne plus performante, pour atteindre l’excellence et pour résoudre ce problème de contradiction. Parce que notre administration aujourd’hui, au lieu d’être une pyramide est plutôt un losange. Il faut revenir à la pyramide initiale, ce qui ne serait que dans l’intérêt de notre administration et de notre pays.


Internet au service du développement du Gabon

L'Union, 19/03/1999 par Gérard MALEKOU

A l’instar des autres pays francophones, le Gabon célèbre à partir d’aujourd’hui la fête de l’Internet sur le thème "L’Internet au service du développement du Gabon". Les manifestations se déroulent sur plusieurs sites, jusqu’à dimanche. A la direction générale des Archives nationales, de la Bibliothèque nationale et de la Documentation gabonaise - site officiel de la fête placée sous le haut patronage du Premier ministre, chef du gouvernement - les internautes vont communiquer dans l’allégresse. Plusieurs conférences figurent au programme: "L’Internet au service de l’administration et du développement du Gabon"; "Les NTIC au service de l’entreprise gabonaise"; "L’infrastructure technique et les perspectives de développement de l’Internet au Gabon"; "L’administration de l’Internet" ; "Gabon 2025" ; "Créons le futur" ; "La Fondation Raponda sur le Web" ; "Le téléenseignement et la télémédecine" ; "Apports des NTIC dans l’enseignement"; "L’Internet au service des ONG" ; "Apports de l’Internet dans la presse" ; "L’Internet dans la lutte contre la toxicomanie" ; "Le Bogue de l’an 2000" ; "L’Internet, l’éthique et le droit à l’information". Le dossier que nous vous proposons ci-dessous passe en revue les bienfaits de l’Internet et les efforts faits par le Gabon pour être à l’heure de cette technologie de l’information.

Une interview de R.V. Ayimambenwe, coordinateur national du projet gouvernemental Réseau du développement durable (RDD).

* Qu’attendez-vous du gouvernement au moment où vous célébrez la fête de l’Internet ?

- C’est un honneur pour nous de recevoir le Premier ministre. Cela confirme la matérialisation de la place qu’occupe notre institution dans le paysage national. Nous souhaitons que la DGABD fasse l’objet d’un intérêt particulier de la part du gouvernement, car elle a pour mission de soutenir la production de l’histoire et de la culture de notre pays, et de conserver l’histoire du Gabon pour les générations actuelles et futures.

Il s’agira d’ouvrir les bases de connaissances nationales et universelles, ce n’est pas négligeable dans un pays qui veut asseoir son développement à travers la capacité de ses citoyens par le biais de l’histoire et de la culture en général. La DGABD doit donc bénéficier à mon avis d’une impulsion nouvelle pour en faire une cité de la connaissance dans laquelle les NTIC demeurent une exigence, un vecteur incontournable du développement. L’environnement international et la volonté politique du gouvernement inspirée par le président de la République et mise en œuvre par le Premier ministre, nous laissent entrevoir de bonnes perspectives.

* La fête de cette année comporte-t-elle des innovations ?

- C’est dû à l’action entreprise par les différents acteurs, notamment le RDD, l’OPT, le PNUD et l’ensemble des autres organismes et institutions privés qui ne ménagent aucun effort pour une réelle insertion des NTIC au Gabon. Cette première édition officielle au Gabon est la résultante d’une synergie efficace. Cette fête est décentralisée , il y va de l’intérêt des chercheurs, des étudiants et autres industriels qui bénéficient ainsi des expériences des divers sites.

* Quels sont les principaux objectifs du RDD ?

- L’objectif prioritaire est l’appropriation par la communauté gabonaise des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). Il s’agit de sensibiliser les pouvoirs publics et les utilisateurs des NTIC; et d’aider à la constitution de banques d’informations nationales par les institutions et organismes producteurs qui devront réfléchir sur un environnement réglementaire permettant l’explosion d’initiatives et des intelligences dans le domaine de l’Internet. Enfin, permettre l’accès au savoir mondial du plus grand nombre de Gabonais, à moindre coût.

* Et le bilan de vos activités, à ce jour ?

- Il est largement positif, au regard de l’organisation de la fête de l’Internet et du nombre croissant d’internautes aux points d’accès de la bibliothèque nationale. L’intérêt exprimé par les acteurs des NTIC qui mettent un maximum de moyens pour son développement, n’est plus à démontrer, c’est le cas notamment du gouvernement en amont.

* Et pourtant le Gabon, selon certains spécialistes, accuse du retard sur plusieurs plans. Peut-on espérer une amélioration de la situation ?

- Notre pays a travaillé sur plusieurs fronts, sur les infrastructures, les utilisateurs par l’OPT et des privés, puis sur le contenu grâce au RDD. De ce point de vue le Gabon avance lentement mais sûrement vers la création d’une véritable autoroute nationale de l’information. C’est une action de grande importance, à partir du moment où il s’agit d’un phénomène de masse. Le problème de notre pays est sa faible densité, ce qui crée vraisemblablement un manque à gagner pour les personnes qui investissent à ce haut niveau, cela favorise l’augmentation des coûts par rapport à l’utilisateur final. Sans faire montre d’autosatisfaction, je dirai que le Gabon est bien parti. La couverture globale du pays et la nécessité d’améliorer le réseau téléphonique sont des préoccupations qui nous concernent directement dans l’utilisation de notre outil. Toutefois, l’existence de sites à travers le pays se fera avec la collaboration des acteurs du secteur. Au niveau de l’OPT, par exemple, nous avons bon espoir. Le Gabon se situe à un niveau important à l’échelle internationale. Depuis près de deux ans l’évolution du processus de vulgarisation des NTIC est considérable et avance résolument vers une meilleure appréciation et appropriation par notre société.

* Votre mot de fin ?

- L’entrée dans le 3e millénaire se fera avec l’Internet. Ce sont certes les parents qui financent, mais il convient d’indiquer, que les jeunes effectivement sont les premiers bénéficiaires. J’invite les jeunes à aller vers les NTIC car les analphabètes de demain ne seront pas les personnes qui ne sauront pas lire ou écrire, mais ceux qui ne maîtriseront pas les NTIC. Le gouvernement a pris résolument la volonté de faire des NTIC l’un des secteurs du développement pour répondre aux besoins légitimes de la jeunesse gabonaise. C’est dans ce cadre que des espaces multimédia d’accès au réseau mondial d’Internet sont ouverts dans plusieurs endroits.Sur le nombre d’usagers, depuis trois mois nous sommes saturés par les visiteurs. En revanche, nous constatons qu’un grand nombre de jeunes n’est pas encore sensibilisé sur l’intérêt des NTIC, c’est dans ce sens que le RDD et les archives nationales mettront en place une politique avec le concours des établissements de la place afin que les élèves puissent prendre contact avec ce nouvel outil . Nous établissons des conférences tournantes et du fait de l’accès temporaire ( une semaine ) à l’Internet dans ces établissements à des cybercafés. Plus de cinq mille jeunes sont attendus dans nos différents sites. Ce sera l’occasion pour eux d’être citoyens à part entière du village planétaire. Tous les participants bénéficieront de l’initiative lancée par le RDD et la DGABD appelée " initiative: un Gabonais un Email gratuit " pour leur permettre d’utiliser réellement l’Internet au niveau de notre cybercafé.


Discours-programme du premier ministre : des suggestions pertinentes

L'Union, 13-14/03/1999 par MBEGAH EFFA

ON attendait Jean-François Ntoutoume Emane. On l’a vu. En grandeur nature et dans toute sa splendeur. Le Premier ministre a incontestablement innové dans sa présentation de politique générale à l’Assemblée nationale. Il est vrai que le contexte donnait au chef du gouvernement les coudées franches et l’occasion, particulièrement bonne pour qu’il montre de quoi il est capable. Du moins, sur les idées, en attendant de voir comment cela va se traduire dans les faits. Un discours révolutionnaire, méthodique et qui sortait des sentiers battus même si certains l’ont trouvé trop académique et un tantinet provocateur. Mais Jean-François Ntoutoume Emane n’avait droit, ni à l’erreur, ni à l’à peu près. Un Premier ministre au fait de la réalité socio-économique de son pays et qui a voulu pousser son avantage en se présentant, tantôt comme l’homme idoine, tantôt comme l’homme de la situation. Ou simplement, les deux à la fois. Son discours, qui s’est voulu le phare et le miroir de l’action gouvernementale, n’a voulu rien laisser au hasard. Il ne s’est pas surestimé. Mais il a voulu surtout montrer la voie à suivre. Une voie difficile qui nécessite courage, abnégation et détermination. Car, il faudra tout cela à Ntoutoume Emane qui ne doute pas que le chemin sera semé d’embûches. Le ton employé pour s’adresser aux parlementaires et en réalité, aux membres de son gouvernement, sonnait comme une sorte d’avertissement sans concession. Il s’agit, pour le Premier ministre, d’imprimer sa marque sur l’Histoire. Etant bien entendu que rien ne se fera sans l’effort de tous. Autrement dit, il va falloir faire violence sur nous-mêmes pour réussir cet ambitieux programme.

Dans le domaine de la réforme de l’Etat par exemple, le Premier ministre estime que l’administration, telle une entreprise privée, se doit d’être productive. Pour y arriver, préconise-t-il, cinq choses sont à faire : le respect scrupuleux des conditions et des procédures d’intégration dans la Fonction publique, ainsi que le déroulement des carrières des fonctionnaires, le rétablissement des concours professionnels pour assurer une carrière motivante au fonctionnaire, le retour aux conseils de discipline, la réactivation des commissions paritaires dans les secteurs publics pour une meilleure carrière reposant sur le mérite et la remise au goût du jour des fichiers de la fonction publique pour dénicher les fonctionnaires fantômes.

L’AUTORITÉ DE L’ETAT

Autre point développé par le Premier ministre : la restauration de l’autorité de l’Etat qui revient, selon Ntoutoume Emane, à se plier à une éthique, celle qui consiste à servir l’Etat avec dignité et abnégation. Mais il n’a pas oublié que cela passe par un certain nombre de paramètres à remplir. D’où son idée qui consiste, pour le gouvernement, à améliorer les capacités et les conditions de travail dans l’administration. Pour être tout à fait concret sur ce chapitre, le chef du gouvernement a dit qu’une attention spéciale sera accordée à ceux des agents de l’Etat qui exercent dans ce qu’il a baptisé "le commandement" du fait que ceux-ci participent à l’expression de la souveraineté de l’Etat dans leurs circonscriptions respectives : "Un gouverneur locataire, un préfet ou un sous-préfet à pied, cela ne va certainement pas dans le sens que nous souhaitons." Le Premier ministre a alors préconisé la réfection des résidences de ces personnels. Parlant de la démocratie communautaire, Jean-François Ntoutoume Emane, après en avoir fait la genèse qui procède de "l’écriture de partage", a souhaité inaugurer avec les présidents des nos institutions des relations d’un type nouveau, fondées plus sur la confiance que sur la simple courtoisie d’usage. Tout en reconnaissant qu’un "gouvernement démocratisant peut se révéler inefficace, le Premier ministre a décidé de rouvrir le chapitre de la retransmission des débats à l’Assemblée nationale en raison de leur valeur pédagogique.

Pilier de l’Etat de droit, comme l’a reconnu l’orateur, Jean-François Ntoutoume Emane a annoncé un train de mesures susceptibles d’impulser une dynamique nouvelle à notre justice : "C’est pourquoi, dorénavant, un contrôle par l’inspection des services judiciaires se fera tant sur les juges et leurs auxiliaires, que sur leurs décisions", a-t-il dit en substance. Abordant le volet sensible de l’immigration et de la sécurité, le Premier ministre a introduit son sujet par un constat alarmant : l’accroissement exponentiel des immigrants clandestins dont le nombre, a-t-il révélé, a dépassé les 18 % de la population, alors que les normes moyennes internationales se situent entre 5 et 7 %. Evidemment, un tel constat appelle des mesures énergiques. Que le chef du gouvernement a annoncées avec une fermeté qui sied aux circonstances.

RENÉGOCIER LA DETTE

C’est, entre autres, accroître les effectifs de nos forces de sécurité par des recrutements significatifs, la création de la police municipale qui va dans le sens d’une police de proximité et doter ces forces de moyens logistiques idoines en rapport avec le volume et la nature de leurs missions. Outre la fiscalité et l’option industrielle du Gabon dont il a abondamment développé les grands contours, le Premier ministre a surtout été suivi sur la gestion de la crise financière actuelle. D’entrée, il a fait observer que celle-ci ne sera nullement un feu de paille. Et prenant le taureau par les cornes, le chef du gouvernement a énoncé une batterie de mesures pour y faire face. La réforme des structures de l’Etat sera l’un des ses chevaux de bataille avec, en filigrane, une rationalisation des choix budgétaires. M. Ntoutoume Emane a dit qu’il faudra gérer serré. Des économies seront opérées sur la masse salariale des fonctionnaires. Il s’agira, plus concrètement, de s’attaquer à la pyramide inversée des rémunérations dans la Fonction publique. La bataille de la dette aussi sera vigoureusement entreprise. Son remboursement absorbe, a révélé le Premier ministre, 45 % des crédits inscrits au budget de l’Etat, freinant la croissance et obérant notre capacité de développement. Parlant en expert, il souligne qu’une baisse d’un point sur les taux d’intérêt se traduit par une économie budgétaire de 22 milliards de FCFA.

MENEUR D’HOMMES

Au chapitre des investissements, le chef du gouvernement a dit que l’accent sera mis sur les infrastructures routières et de télécommunication. Sans se voiler la face, le Premier ministre a reconnu que le chômage frappait des franges entières de notre population, d’où la plus grande solidarité qui est exigée de toutes les composantes de la Nation. Il a souligné néanmoins que les causes du chômage résident dans le manque de qualification professionnelle des demandeurs d’emploi et l’inadéquation formation-emploi. Un clin d’œil a donc été fait en direction de l’enseignement supérieur, entre autres, pour des formations plus appropriées. Enfin -- c’est là où tout le monde l’attendait -- , le Premier ministre a abordé la nouvelle gestion budgétaire. Là où tous les gouvernements échouent. Le train de vie de l’Etat sera revu à la baisse, a-t-il affirmé. Et joignant la parole à l’acte, Ntoutoume Emane a annoncé la couleur : "Un contrôle rigoureux sera systématiquement opéré dans l’attribution et l’exécution des marchés d’Etat". Et pour plus de transparence, il a préconisé l’unicité des caisses.

Dans ces mesures d’assainissement, le parc automobile de l’Etat sera inventorié et aucune réforme de véhicule ne se fera avant cinq ans d’âge. De même que les organigrammes des ministères seront reconsidérés pour en alléger le trop plein de conseillers, de chargés d’études etc. Plus que jamais, Jean-François Ntoutoume Emane s’est présenté en redoutable meneur d’hommes. Une qualité qui sied bien à un Premier ministre.


Le Premier ministre a obtenu la confiance des députés

L'Union, 13-14/03/1999 par ONDOUBA’NTSIBAH

JEAN-FRANÇOIS Ntoutoume-Emane qu’accompagnaient plusieurs membres de son gouvernement a donc passé, avec brio, l’étape fatidique de l’Assemblée nationale. Le contraire aurait étonné. Pour plusieurs raisons dont voici les principales : le discours correspondait bien aux aspirations des populations; la majorité présidentielle dont est issu le gouvernement a le plus grand nombre de députés à l’Assemblée nationale; et, dans une certaine mesure, la carrure de l’homme lui-même et de certains de ses ministres. Le discours-programme du Premier ministre, chef du gouvernement a plu à nombre de Gabonais. Du moins dans son aspect théorique. Tant le chapelet des intentions ou des engagements pris correspond à ce qu’a longtemps souhaité le peuple gabonais : rompre avec un État faible encourageant l’impunité; réduire les inégalités sociales en combattant l’injustice et en prônant la solidarité sociale; relancer l’économie en l’étendant aux secteurs non rentiers ; etc.

Par rapport à ces engagements, l’élu du 5e arrondissement a atteint le cœur des Gabonais. Et le développement fait sur chacun des axes a convaincu plus d’un. Du moins au niveau de la logique et de la théorie. En annonçant que son gouvernement va restaurer l’autorité de l’État et réduire son train de vie, le locataire du "2-Décembre", sait qu’il devra s’attaquer aux privilèges, donc s’attirer des ennemis dans son propre camp. De même que, pour arriver à cet objectif, Jean-François Ntoutoume-Emane devra également, comme il l’a dit, abolir, entre autres, la multiplicité des caisses, les dépenses hors budget. Tout comme il devra veiller à rompre avec l’impunité. Sur ce point, les contrôles préconisés par le chef du gouvernement doivent aboutir à la poursuite et à la punition des détournements des deniers publics.

SCEPTICISME

Dans le cadre de la lutte contre les inégalités, le Premier ministre a pris l’engagement de s’attaquer à la pyramide inversée des salaires qui fait en sorte qu’aujourd’hui, les salaires les plus élevés soient à la base et les moins élevés au sommet. Tout en sachant que plusieurs personnalités politiques sont impliquées dans l’encouragement de l’immigration clandestine et le grand banditisme, M. Ntoutoume-Emane a dit prendre des mesures pour combattre ce fléau. Autant d’engagements qui ont séduit les députés de la majorité. C’est donc pourquoi, outre la logique démocratique, ces derniers ont donné leur confiance à l’actuelle équipe gouvernementale. Il faut dire que cette confiance a également été obtenue grâce, d’une part, à la carrure personnelle de Jean-François Ntoutoume-Emane, homme multi-diplômé, ayant une grande expérience de la gestion de la chose publique; et de l’autre, à la présence dans son gouvernement de personnes honnêtes, soucieuses de l’intérêt général et méticuleuses dans le travail. Ces atouts laissent espérer que l’équipe de Ntoutoume-Emane sera à la hauteur de son programme. Cependant, en dépit de tout cela, certains députés, aussi bien de la majorité que de l’opposition, ont exprimé leur scepticisme. Scepticisme justifié par l’expérience et l’inefficacité des gouvernements précédents malgré leurs beaux discours. Les honorables Mouity Nzamba, Obame Abessole et Mamboundou, ont catégoriquement rejeté la politique gouvernementale, tandis que les députés Assélé et Ndemezo’o lui ont donné comme un "quitus sous réserve". Comme a souligné le député maire du 3e arrondissement, "on juge le maçon au pied du mur".

Et le maçon s’y trouve désormais. Les députés toutes tendances confondues, la nation toute entière et la communauté internationale, restent suspendus à l’ambitieux programme de Jean-François Ntoutoume-Emane. Les objectifs essentiels étant de faire du Gabon un État moderne, de réduire les inégalités sociales et la pauvreté croissante des populations. Une ambition dont le prix à payer est avant tout la traduction des paroles en actes.